De matzneff aux attentats : le new york times, la france et ses zones d’ombre

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© Crédits photo : Illustration : Johanne Licard. Ils ne sont que cinq, mais ils ont publié quelques unes des meilleures enquêtes parues ces derniers mois sur la société française. Des


violences sexuelles à l'onde de choc qui a suivi l'assassinat de Samuel Paty, voici comment travaillent les journalistes du bureau du _New York Times_ à Paris.   Mathieu Deslandes


Publié le 09 novembre 2020 Pierre Verdrager a passé les fêtes de fin d’année au téléphone. En décembre 2019, quand les premiers exemplaires du _Consentement_, le récit de Vanessa Springora,


sont arrivés dans les rédactions, des dizaines de journalistes ont eu le même réflexe : contacter ce sociologue spécialiste de l’histoire de la pédophilie. _« C’était fou. J’ai donné en un


mois plus d’interviews qu’au cours de ma vie entière. »_ Les questions étaient souvent les mêmes. Les articles ont été publiés les uns après les autres._ « Et puis, _raconte Pierre


Verdrager,_ un truc tout à fait inhabituel s’est produit : l’un de ces journalistes m’a rappelé en janvier. Il voulait approfondir. Ça n’arrive jamais. »_ Ce journaliste, c’était Nori


Onishi. Nommé correspondant du _New York Times_ à Paris cinq mois plus tôt, il veut pouvoir répondre à une question simple : _« Matzneff est l’auteur de journaux intimes remplis de détails


sur ses relations sexuelles avec de très jeunes filles en France et avec des garçons encore plus jeunes aux Philippines ; comment est-il possible qu’il ne soit pas en prison ? » _Cette


histoire lui apparaît proprement _« hallucinante »_. Par qui et pourquoi Gabriel Matzneff a-t-il été soutenu si longtemps ? « PERCEVOIR LES ANGLES MORTS D'UNE SOCIÉTÉ » Nori Onishi ne


trouve pas de réponse à cette question dans la presse française, ce qui ne l’étonne qu’à moitié. _« Pour un journaliste français, certaines choses sont tellement évidentes qu’elles ne


suscitent peut-être pas d'intérêt, ou pas suffisamment pour justifier une couverture médiatique »_, commente-t-il entre deux gorgées de thé dans les confortables locaux du _New York


Times_, sur les Champs-Elysées. Il l’a constaté dans ses précédents postes — en Côte d’Ivoire, au Japon, en Indonésie et en Afrique du Sud : _« Le regard extérieur que j’ai me permet de


percevoir les angles morts d'une société. Je crois que c’est l’avantage que nous avons structurellement comme_ foreign correspondent_. »_ Nori Onishi, l'un des reporters du New


York Times à Paris NORI ONISHI, CORRESPONDANT DU _NEW YORK TIMES_ À PARIS. ILLUSTRATION : JOHANNE LICARD. Leur autre luxe, c’est le temps. Le bureau parisien, qui compte cinq journalistes,


n’a évidemment pas vocation à couvrir toute l’actualité française, et peut faire des choix radicaux. Avec Constant Méheut, un jeune reporter fraîchement recruté, Nori Onishi commence à


enquêter. Les deux hommes fouillent les archives, appellent des dizaines d’interlocuteurs, établissent des chronologies et se partagent la lecture des livres de Matzneff, tandis que Daphné


Anglès, _office manager_ et couteau suisse du bureau, file à la BnF pour scanner les _Carnets noirs _de l’écrivain qui ne sont plus disponibles en librairie. Bien sûr, Nori Onishi aimerait


recueillir le point de vue de Matzneff, mais ni son éditeur ni son avocat n’accèdent à ses demandes d’interview. HÔTEL PARIGI Le 29 janvier au matin, l’enquête du _New York Times_ est


presque bouclée quand Pierre Verdrager allume BFM TV. La chaîne diffuse un _« document » _: près de deux minutes d’entretien avec Gabriel Matzneff, filmé de dos dans la salle à manger d’un


hôtel italien. À 7 h 40, Pierre Verdrager envoie le lien du reportage à Nori Onishi. À 8 h 01, le journaliste lui demande s’il est capable d’identifier le lieu du tournage. L’universitaire,


sous le charme de l'irrésistible affabilité du journaliste, se prend au jeu : il scrute les inscriptions sur le mug posé devant Gabriel Matzneff, regarde à nouveau le front de mer, puis


repense aux séjours à Bordighera décrits dans le journal de l’écrivain. Il lance une recherche sur Twitter, combinant le nom de la ville et celui de l’auteur. Un internaute croit


reconnaître l’hôtel Parigi, alors Pierre Verdrager compare les photos de l’établissement disponibles sur Booking.com aux images tournées par BFM TV. À 8 h 36, il livre ses conclusions au


journaliste. À 8 h 37, Nori Onishi lui annonce son départ pour la Riviera italienne. SUR LA ROUTE DE BORDIGHERA _« En fait, _précise Constant Méheut, _Nori était à Londres, donc on est


partis le lendemain matin. »_ Dans l’avion, Nori Onishi lit sur son iPad les derniers volumes du journal de Matzneff. Il cherche les occurrences de Bordighera. Entre deux réflexions sur la


meilleure manière de perdre sa graisse abdominale, Matzneff note qu’il déjeune tous les jours à la même table de son hôtel. Il précise qu’il a fait l’acquisition, chez le _« marchand de


couleurs »_, de _« légères pantoufles aquatiques »_ pour ne pas s’esquinter les pieds sur les cailloux de la plage où il aime_ prendere la tintarella_, c’est-à-dire bronzer. Il mentionne


aussi _« la petite serveuse du café »_ qui sait qu’il prend toujours _« un espresso sans sucre et un verre d’eau pétillante »_. Le café, voilà la piste que Nori Onishi va suivre. _« À force


de lire ses journaux, je savais que Matzneff était un homme d’habitudes. Je me dis que s’il est effectivement à Bordighera, il ira probablement dans ce café avant de rentrer à l’hôtel. »_ De


Nice, où leur avion atterrit, Nori Onishi et Constant Méheut prennent la route de Bordighera. Le GPS, mal réglé, les fait passer par les montagnes de l’arrière-pays. Ils mettent plus de


deux heures à rejoindre la station balnéaire de Ligurie. MATZNEFF EN TRENCH ET BASKETS Dans le café, Constant Méheut s’installe face à la porte. _« Tout à coup, _décrit Nori Onishi,_ j’ai vu


le visage de Constant changer. » _Matzneff vient d’entrer, cinq minutes après leur arrivée. L’écrivain s’installe, boit son _espresso_ sans sucre, son verre d’eau pétillante, lit son


journal, puis s’en va. Les journalistes se lèvent à leur tour. Dehors, ils l’abordent. Gabriel Matzneff refuse de leur parler. Mais quand l’écrivain comprend que ses interlocuteurs ont lu


plusieurs de ses livres, il se ravise. Les trois hommes s’assoient sur un banc, face à la Méditerranée. Nori Onishi allume son dictaphone Olympus. Au bout de deux heures d’entretien,


Matzneff annonce qu’il est fatigué. Nori Onishi lui laisse sa carte. En début d’après-midi, Gabriel Matzneff rappelle les journalistes. Il part en promenade et leur propose de l’accompagner.


Deux heures supplémentaires de conversation sont enregistrées. deux reporters du new york times avec gabriel matzneff CONSTANT MÉHEUT ET NORI ONISHI AVEC GABRIEL MATZNEFF À BORDIGHERA.


ILLUSTRATION : JOHANNE LICARD. Le surlendemain, Matzneff a rendez-vous à 9 heures avec la photographe freelance Andrea Mantovani, qui travaille souvent pour le_ New York Times_. Ils font


connaissance en marchant sur le _lungomare_. Il multiplie les interruptions : il veut repasser à l’hôtel, il a des soins programmés, puis des courses à faire… _« Je lui ai dit que j’avais


tout mon temps,_ raconte Andrea Mantovani_. Au _New York Times_, la photo a autant d’importance que l’histoire écrite. Ils savent que c’est souvent l’image qui le pouvoir d’accrocher les


lecteurs. »_ Matzneff choisit de poser en trench et baskets. _« Des baskets, oui, parce que dans sa tête il est toujours jeune, _décode la photographe. _Mais un imperméable… Dans la


symbolique inconsciente, c’est quand même quelque chose… »_ L'INCENDIE DE NOTRE-DAME L’article est publié dix jours plus tard. _« Tout a été vérifié dix fois, puis il a fallu attendre


qu’il y ait suffisamment de place dans l’édition papier du journal »_, se souvient Constant Méheut, un peu stressé à l’idée qu’une autre grande interview sorte chez un concurrent. Elian


Peltier, aujourd’hui rattaché au bureau de Londres, a lui aussi dû ronger son frein lorsqu’il enquêtait sur l’incendie de Notre-Dame-de-Paris au cours de l’été 2019. _«_ Le Canard Enchaîné,


Le Monde_ et_ Les Échos_ publiaient des révélations que nous avions les unes après les autres. Mais nos rédacteurs en chef préféraient les garder pour un article plus ambitieux. » _C’est la


combinaison d’informations exclusives, d’un souci poussé de la narration et d’un traitement visuel frappant qui transforme la publication d’un article en événement. Celui de Nori Onishi sur


Matzneff en constitue un. En plus de la version originale, le _New York Times_ met en ligne deux traductions, pour les lecteurs francophones (_« Un écrivain pédophile — et l’élite française


— sur le banc des accusés »_) et hispanophones. _« Il y a une vraie volonté de toucher des audiences plus larges que les lecteurs américains, _souligne Daphné Anglès. _Le _New York Times_


traduit en espagnol et en chinois depuis longtemps. Un petit groupe dont je fais partie identifie des contenus susceptibles d’intéresser des lecteurs francophones en Europe et en Afrique. »_


« JE N’AURAIS PAS PARLÉ À UN MÉDIA FRANÇAIS » Deux personnes en particulier sont troublées à la lecture de cette enquête, au point de contacter le _New York Times_. La première s’appelle


Francesca Gee. L’année de ses quinze ans, en 1973, elle avait noué avec Gabriel Matzneff une relation qui allait durer trois ans. Elle en était sortie _« honteuse, amère, confuse »_ ;


l’écrivain, lui, parle d’elle comme d’un des trois grands amours de sa vie. En 2004, Francesca Gee avait voulu publier son histoire. Mais aucun éditeur n’avait accepté son manuscrit et elle


en avait conçu une méfiance durable à l’encontre du _« milieu littéraire et médiatique »_ parisien. Nori Onishi lui ouvre ses colonnes. De son côté, Aniss Hmaïd surmonte _« la peur et la


honte »_ qui l’habitent et explique au journal qu’il s’est retrouvé dans les destins de ces jeunes filles tombées sous l’emprise d’un homme plus âgé, membre de l’intelligentsia


germanopratine. Lui accuse Christophe Girard de l’avoir violé une vingtaine de fois. En échange, dit-il, Christophe Girard lui fournissait des emplois. Aniss Hmaïd a trouvé l’article sur


Matzneff _« à la fois bien écrit, explicite, factuel et sans jugement »_, c’est ce qui lui a _« donné confiance »_, confie-t-il._ « Je n’aurais pas parlé à un média français. D’abord parce


que Girard a ses entrées partout. Ensuite parce que la presse française cherche trop souvent à faire du sensationnel ou manque de moyens pour travailler sérieusement. »_ Entre mars et août


2020, Nori Onishi et Constant Méheut sont venus à trois reprises l’interroger dans son pavillon de banlieue. _« Ils ont fait une enquête de fond. Et ils m’ont convaincu de __témoigner à


visage découvert__. On ne peut pas être anonyme dans le _New York Times_. »_ « C’EST PIRE QU’_EMILY IN PARIS !_ » À la terrasse de son café favori, face au Jardin du Luxembourg, Alan Riding


a posé son béret sur la table. Chef du bureau de Paris de 1989 à 1995, il n’est plus tout à fait certain de reconnaître _« son »_ journal. Il a conscience d’avoir connu un _« âge d’or »_. Il


parle de liberté, d’autonomie, de moyens illimités. Il en rit : _« Quand on était en reportage, les rédacteurs en chef n’avaient aucun moyen de nous joindre, c’était formidable ! »_ Pas de


portable, pas d’e-mails, pas de Slack. À l’époque, les propriétaires du _New York Times_ attendent de lui qu’il reçoive le Tout-Paris dans son immense appartement de fonction de la rue de


Lota, dans le XVIe arrondissement. _« Ils voyaient le correspondant à Paris comme une sorte d’ambassadeur. »_ Le personnel de maison sri-lankais est aux petits soins, et un chauffeur conduit


Alan Riding à tous ses rendez-vous. Les articles du _New York Times_ devaient permettre aux lecteurs de l’Upper West Side de se tenir au courant des principaux événements culturels et


gastronomiques parisiens — et de savoir que le Marché de la truffe à Ménerbes est incontournable pour quiconque séjourne dans le Luberon. _« Quand l’affaire Matzneff est sortie, _relate Alan


Riding, _je me suis dit : _“So what ?”_ Pour moi, c’était trop franco-français. Je ne sais pas si ça a beaucoup d'intérêt pour les lecteurs internationaux. En même temps, je comprends


le succès : l’histoire d’un écrivain pervers sexuel protégé par des intellos de gauche hypocrites, ça ratifie absolument tous nos clichés sur la France, c’est pire qu’_Emily in Paris_ ! »_


PULITZER Surtout, personne n’attendait d’un correspondant qu’il se lance dans de grandes investigations. À l’époque, les enquêtes publiées par le _New York Times_ étaient presque toutes


produites au siège du journal. _« À la fin des années 1990, _se souvient Nori Onishi,_ je pouvais décrire la vie quotidienne d’un village perdu au Mali, et ça intéressait beaucoup nos


lecteurs à l’époque. Aujourd’hui, ils peuvent trouver ce genre d’infos sur des blogs, sur Youtube, ou visiter ce village sur Google Maps. Nous devons leur offrir autre chose. »_ Au cours de


la dernière décennie, les bureaux étrangers ont été invités à produire à la fois plus de _« daily »_, de courts articles d’actualité très réactifs, et surtout plus d’enquêtes au long cours


susceptibles d’avoir un certain impact. Nori Onishi a commencé à examiner les _« angles morts »_, les obsessions, les paradoxes, les zones d’ombre et les tabous des sociétés qu’il était


chargé de chroniquer. Au Japon, il a notamment enquêté sur les causes réelles de la catastrophe de Fukushima et sur la mort dans la solitude la plus complète de nombreuses personnes âgées.


En Afrique du Sud, il a raconté _« comment le parti de Mandela avait trahi la population noire et sombré dans la corruption »_. Et il faisait partie de l’équipe de reporters récompensée par


un Pulitzer en 2015 pour sa couverture de l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest. « PRISE DE CONSCIENCE RACIALE » Arrivé au pays où les grandes vacances sont sacrées, Nori Onishi s’est


intéressé aux « gilets jaunes » qui, faute de moyens, passent tout l’été chez eux. Il est allé rencontrer Renaud Camus, le théoricien du _« grand remplacement »_, dans son château occitan.


Il a raconté comment la gestion de la pandémie de Covid-19 a mis à mal la confiance dans l’État central et ébréché l’image de grande nation sanitaire que la France avait d’elle-même. Il


s’est demandé pourquoi les responsables politiques parlent sans cesse d’insécurité alors que les statistiques montrent que la criminalité ne progresse pas. Il a chroniqué l’aisance avec


laquelle des élus _« mainstream»_ ont repris à leur compte une partie du vocabulaire de l’extrême droite. Il a dépeint une _« prise de conscience raciale »_ dans la foulée de la mort de


George Floyd. Il a disséqué la fracture générationnelle et culturelle qui divise les féministes… Chez des lecteurs français, même les articles les plus neutres peuvent créer de la


dissonance. Obligés d’expliquer les choses à un public international, les journalistes ne sont jamais dans l’allusion ou l’implicite. _« Parfois, _relève Antonella Francini, jeune diplômée


en journalisme qui achève un stage au _New York Times, ils ne se rendent pas compte qu’ils mettent un coup de pied dans la fourmilière rien qu’en nommant les choses. En français, on manque


de concepts pour décrire certaines évolutions de la société. Ils ont fait beaucoup de sujets sur l’identité raciale en France alors que nous ne savons pas quels mots utiliser pour en parler.


 »_ MACHISME ET LAÏCITÉ Certains jours, Gérard Araud regrette l’époque où _« la motivation première des correspondants à Paris était de vivre en France »_. _« Ils étaient obsédés par la


bonne bouffe et le château de Versailles, ils n’en ont plus que pour le 9-3 »_, caricature-t-il gentiment. Cet ancien ambassadeur de France aux États-Unis juge les journalistes du _New York


Times _d’aujourd’hui _« plus Américains, moins ouverts à d’autres façons de voir le monde »_. L’ex-diplomate développe : _« C’est pas mal qu’ils nous disent d’arrêter avec notre machisme à


la Lino Ventura. Mais expliquer notre laïcité à des Américains est impossible. Chez nous, la laïcité a été pensée pour protéger l’Etat contre les religions. Chez eux, c’est l’inverse. Chaque


société a ses propres axiomes. »_ De fait, la manière dont le _New York Times_ a rendu compte des jours qui ont suivi l’assassinat de Samuel Paty a heurté de nombreux lecteurs français. Des


éditorialistes s’en sont ému. Des intellectuels se sont indignés. Le président de la République a manifesté son agacement. Des citoyens mécontents ont écrit ou téléphoné à la rédaction.


CARICATURES ET AUTO-CENSURE Une partie de l’émoi tient au titre du tout premier article, mis en ligne le soir de l’attentat : _« La police française tire et tue un homme après une attaque


meurtrière au couteau »_. _« Nous étions encore en attente de vérifications, _précise Constant Méheut._ Contrairement à d’autres médias, nous n’avons pas le droit de nous baser sur l’AFP,


nous devons tout vérifier par nous-mêmes. »_ Une fois que le mode opératoire du tueur et la fonction de la victime ont été confirmés, l’article a été retitré, à 21 h 48. Mais la capture


d’écran de la première version a continué à circuler pendant des jours, laissant penser que le journal avait sous-estimé la nature de l’attaque. Un reporter lors des commémorations en


hommage à Samuel Paty UN HOMMAGE À SAMUEL PATY À PARIS. ILLUSTRATION : JOHANNE LICARD. Sûrs de leur rigueur, les reporters du _New York Times_ ont aligné des faits. Ils ont décrit la


rapidité avec laquelle l’enseignant assassiné a été érigé en symbole, en _« visage de la République »_. Ils ont dépeint l’atmosphère d’union sacrée teintée de _« nationalisme »_ qui a gagné


le pays. Ils ont mentionné l’auto-censure de _« plusieurs personnalités qui ont par le passé critiqué l'action du gouvernement contre les musulmans »_. Alors que le ministre de


l’Intérieur déclenchait _« une large répression contre les musulmans accusés d'extrémisme »_, ils ont relevé que certains de ces _« raids »_ visaient _« des associations musulmanes qui


avaient auparavant reçu des subventions du gouvernement »_. Tout juste se sont-ils permis de s’étonner que la France ait l’ambition de faire advenir un _« islam des Lumières » _plutôt que de


réformer son modèle d’intégration. « FAIRE VIVRE LA DIVERSITÉ DES POINTS DE VUE » S’agit-il d’éclairer nos angles morts ou de plaquer une grille de lecture américaine ? _« Le gouvernement


français défend un certain point de vue sur les caricatures_, répond Nori Onishi, _mais il en existe d’autres, ailleurs dans le monde bien sûr, et en France aussi. Ce sont des faits. Le


président Chirac avait un jugement beaucoup plus réservé que le président Macron sur les caricatures. Et tout le monde ne considère pas que le fait de montrer à des élèves de 13 ans une


image de Mahomet à poil et à quatre pattes soit la meilleure façon d’enseigner la liberté d’expression. » _Lui toujours si pondéré vient d’élever la voix. Il s’interrompt un instant. Face à


l’unanimisme officiel, reprend-il, _« C’est notre rôle de journalistes de faire vivre la diversité des points de vue. Sinon, il n’y a plus de conversation possible. »_