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SAVEZ-VOUS CE QU’EST UN «DÉISTE» ? LES MOTS DE LA PHILO - Ce courant de pensée est souvent mal défini. La rédaction revient sur son origine. Publicité Le refus, non de Dieu, mais de la
religion révélée. Voilà ce qui définit le _«déisme»_, ce terme savamment forgé à partir du latin _deus_, _«dieu»_. Pour Louis de Bonald, homme politique et philosophe, grand adversaire de la
Révolution française, un déiste est un homme qui n’a pas encore eu le temps de devenir athée. L’historien et académicien Paul Hazard rétorquera qu’il s’agit tout bonnement d’un homme qui
n’a pas voulu le devenir. En quoi consiste ce courant de pensée ? Le mot vient du XIIIe siècle. La doctrine le précède. Les déistes sont monnaie courante dans l’Antiquité grecque. Pour les
stoïciens, disciples de Zénon de Citium pour les plus anciens, ou encore Sénèque, Epictète, Marc-Aurèle, le divin se confond avec la nature. Tout est en mouvement, Dieu est la totalité de ce
mouvement, nous en sommes des parcelles. Dès lors, la mort n’est rien, car nous retournons au _«grand tout»_ pour nous y fondre. La vie n’a d’autre but que de consentir à l’ordre du monde,
la perfection de l’existence étant atteinte à chaque instant. Pascal ne critiquera-t-il pas, deux millénaires plus tard, leur _«superbe diabolique»_ qui consiste à prétendre s’élever par
leur propre sagesse à la hauteur de Dieu même ? DES PREUVES «CARTÉSIENNES» Chez les modernes, c’est Descartes qui affirme un Dieu créateur du monde et des vérités éternelles. Le plus
authentique des cartésiens va jusqu’à poser des preuves de son existence, dans ses _Méditations_. Comment procède-t-il ? Il faut partir de soi, et de la seule certitude que nous puissions
avoir : je suis, j’existe. Descartes examine alors le contenu de sa pensée, ses idées. Une seule chose ne peut venir de nous, êtres limités et imparfaits : l’idée de parfait. Comment prouver
que cette idée soit véritable ? Il nous arrive de douter. Or, pour savoir que je doute, je dois d’abord avoir l’idée que ma connaissance est imparfaite, donc que je suis imparfait. C’est
ainsi que Descartes en arrive à poser Dieu comme cause de nous-mêmes : si j’étais moi-même ma propre cause, je me serais doté de perfection. Or, je vois bien que je ne suis pas parfait. Donc
je ne suis pas ma propre cause. Un être infini peut seul m’avoir fait. La démonstration peut paraître un peu sommaire. Pascal estime par ailleurs ces arguments abstraits bien incapables de
convaincre un homme : _«Elles frappent peu»_, se moquera-t-il dans ses _Pensées_. Mais la démarche cartésienne illustre bien ce qu’est le déisme. Descartes s’arrête à ce que la raison peut
saisir. Il ne parle pas des choses de foi qui sont connues par la _«lumière surnaturelle»_. Son Dieu ne s’incarne pas, ne prend aucun visage personnel, ne peut être ni loué ni servi par
aucun culte. LE SIÈCLE DES LUMIÈRES Le _«siècle»_ du déisme est certainement celui des Lumières. Le monde ? Une machine. Son fabricant ? Un horloger, qui une fois sa création achevée se
garde bien d’y intervenir et le laisse tourner selon les forces de la mécanique des évènements. Pour Voltaire, le ciel n’est pas vide mais les religions révélées conduisent au fanatisme :
_«L’univers m’embarrasse, et je ne puis songer/ Que cette horloge existe et n’ait point d’horloger»_, explique-t-il dans un célèbre vers. Jean-Jacques Rousseau, dans un passage célèbre
d’_Emile ou de l’éducation_, intitulé «La Profession de foi du vicaire savoyard», se livre à une critique des dogmes tout en soulignant l’importance du sentiment religieux, notamment par
l’admiration spontanée de la nature, _«le doux sentiment de l’existence indépendamment de toute autre sensation»_. Un Dieu créateur mais distant de sa création, une religion naturelle et
rationnelle, le rejet des dogmes et des rites, jugés superstitieux ou bien inutiles... Voici l’esquisse rapide de ce que pense le _«déiste»_. Faut-il le distinguer du _«théiste»_ ? Kant, au
XVIIIe siècle, se penche sur leurs différences. Pour le penseur allemand, le déiste renonce à définir des attributs à l’être créateur et primitif qu’il reconnaît, et sa croyance reste
volontairement imprécise. Au contraire, le théiste estime que l’on peut le déterminer davantage, notamment par analogie avec la création.