Pour la liberté de disposer de son corps – promouvoir et garantir l’accès aux droits et à la santé sexuels et reproductifs des femmes en afrique subsaharienne | terra nova

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La troisième composante, l’intervalle entre naissances successives, est souvent ignorée car elle a eu traditionnellement peu d’importance en Europe. En Afrique et dans une partie de l’Asie,


au contraire, les allaitements longs ont longtemps maintenu la fécondité en équilibre avec la mortalité. Dans les populations qui ont gardé des pratiques traditionnelles, par exemple les


Bochimanes du Kalahari, qui ne sèvrent leurs enfants qu’au bout de 30 à 36 mois, cela maintient la fécondité autour de 4,5 enfants par femme. En effet, durant l’allaitement, les femmes sont


moins fertiles, voire évitent les rapports sexuels. L’irruption des méthodes européennes d’alimentation des enfants a eu pour effet de raccourcir les intervalles entre les naissances. Il


s’est ensuivi une augmentation de la fécondité. On a pu dire que le principal obstacle au contrôle des naissances était le lait en poudre Nestlé . Effectivement, dans les cinq pays, la


fécondité a augmenté à partir des années 1970 pour atteindre un maximum au début des années 1980, puis a commencé à décroître. La référence à prendre pour mesurer la baisse actuelle de


fécondité est donc ce maximum puisque, depuis lors, les pratiques d’allaitement n’ont pas changé. Par exemple, au Burkina Faso, la fécondité, qui était de 6,1 enfants par femme dans les


années 1950, s’est progressivement élevée à 7,2 au début de 1980 pour redescendre maintenant à 5,2. La différence de 2 enfants n’est pas négligeable. Idem au Sénégal où, après un maximum à


7,3 enfants, l’indice vaut maintenant 4,7, soit la moitié du chemin pour arriver au taux de remplacement de 2,1. Pour d’autres pays, la redescente a été plus faible : de 6,8 à 6 en RDC, de


7,9 à 7 au Niger. Les conditions sociales, politiques et économiques, donc les déterminants profonds de la fécondité, varient en effet nettement selon le pays. LES FACTEURS SOCIAUX ET


POLITIQUES DE LA FÉCONDITÉ EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE Trois facteurs contribuent à une haute fécondité : le mariage précoce, dont on vient de voir l’effet sur la première naissance, le fait de


résider en ville et l’éducation. _ Fécondité urbaine, fécondité rurale_ Au Sénégal , en RDC et au Mali , la différence de fécondité en ville et à la campagne s’élève en moyenne à 2 enfants


par femme et au Burkina Faso à 3 enfants. L’écart est encore plus grand dans les capitales. Par exemple, à Kinshasa, la fécondité est de 4,2, dans les villes, de 5,4 et en zone rurale de


7,3. Plusieurs raisons concourent à cela : les femmes vont plus longtemps et en plus forte proportion à l’école, la pression du milieu est plus faible, l’adoption d’un mode de vie


occidental, avec donc une famille réduite, plus répandue. On reste cependant assez loin encore des niveaux de fécondité observés dans les pays hors de l’Afrique. Avec 4,9 enfants en moyenne,


par exemple, les Maliennes qui vivent en ville sont encore loin devant les pays des autres continents, urbains et ruraux confondus. Pour mémoire, la fécondité est maintenant de 2,2 en Inde,


de 1,7 au Brésil et en Chine. _ Éducation_ La relation entre la fécondité et le niveau d’éducation est quasiment universelle. Dès les années 1980, les enquêtes mondiales de fécondité ont


montré que celle-ci commençait à diminuer dès que les femmes avaient suivi quelques années d’études secondaires. Lorsqu’elles avaient obtenu un diplôme de fin d’études secondaires, leur


fécondité était deux fois plus faible que celle des femmes qui n’avaient pas fait d’études. En revanche, le fait d’avoir suivi des études primaires avait peu d’impact. Or, la proportion de


femmes qui suivent des études secondaires _ (secondary school enrollment ratios)_ reste modeste dans les pays étudiés. On dispose de données homogènes établies par l’Unesco pour cinq d’entre


eux _ (tableau 2)_ et d’une estimation fragile, tous sexes confondus, en RDC. Le Sénégal est le plus avancé avec 39 % des femmes en âge de suivre des études secondaires y étant inscrites.


Vient ensuite le Burkina avec 32 %, puis le Mali avec 27 %. Le plus en retard est le Niger (17 %). En RDC, on ne connaît, et encore peu précisément, que le taux pour les deux sexes (27 %).


La hiérarchie observée est assez proche de celle des indices de fécondité. La proportion de femmes suivant des études primaires est nettement plus élevée, mais encore assez loin des 100 %.


C’est aussi au Sénégal et au Burkina Faso que l’on s’en approche le plus (respectivement 81 et 78 %). Dans ces deux pays se profile également un phénomène qui s’est généralisé dans les pays


développés : les femmes font plus d’études que les hommes. À l’autre extrémité du spectre scolaire, une fraction non négligeable de la population reste illettrée. L’Unesco fournit le nombre


d’illettrés âgés de 15 à 24 ans en 2018 . En le rapportant à l’ensemble de la population indiqué par les Nations unies, on obtient les valeurs suivantes dans quatre pays : 30 % au Sénégal,


40 % au Burkina et au Mali, 55 % au Niger. À nouveau, les statistiques de la RDC sont erratiques sur ce point. Ces valeurs, qu’il est difficile de comparer exactement avec les _ gross_ _


enrollment ratios_ , confirment cependant la hiérarchie des niveaux de fécondité. Pour quelle raison l’éducation joue-t-elle un tel rôle dans la baisse de fécondité ? Un anthropologue de


l’Afrique de l’Ouest, John Caldwell, a donné une raison convaincante . Dans la société traditionnelle, les enfants sont rapidement rentables, parce qu’ils remplacent les adultes dans des


tâches peu contraignantes, telles que garder le petit bétail ou assister leur mère pour la vente de ses produits sur le marché. C’est pourquoi l’éducation est souvent mal vue en milieu


rural. S’ajoute un fait biologique. Lorsqu’elles poursuivent leurs études secondaires, les filles atteignent l’âge de fertilité et doivent se prémunir d’une conception si elles veulent les


terminer car les naissances hors union sont en général très mal vues, particulièrement dans les pays où l’islam domine. Elles acquièrent donc une certaine pratique du contrôle de la


reproduction, soit par abstinence, soit par des procédés contraceptifs traditionnels ou modernes. _ Les mariages précoces_ On a vu sur la figure des taux de fécondité par âge la précocité


des naissances dans chacun des cinq pays. Cela est dû à la jeunesse des femmes lors de leur première union. Les trois quarts des Nigériennes sont mariées avant 18 ans, et c’est le cas de 50 


% des Maliennes et Burkinabées, de 37 % des Congolaises et de 30 % des Sénégalaises. Ici encore, le rapport avec la fécondité totale est net. L’âge moyen des femmes lors de leur première


union est de 20,3 ans au Sénégal et de 19,5 ans au Burkina Faso. Au Mali, l’âge médian est de 17,8 ans, ce qui signifie bien qu’avant 18 ans, plus de la moitié sont déjà mariées, et confirme


les premiers chiffres de fréquence des unions avant cet âge. En ville, les unions sont un peu plus tardives, de deux ans en moyenne. Ainsi, au Sénégal, les femmes ont 22,5 ans en moyenne au


moment du mariage. Une enquête détaillée, effectuée au Niger sur les mariages d’adolescentes , donne leur répartition par âge ainsi que celle de leurs maris. 17 % ont quinze ans ou moins.


Leurs maris sont nettement plus âgés, 32 % ayant entre 25 et 29 ans et 21 % plus de 30 ans. L’écart médian d’âge entre les époux est de 7 ans. De tels déséquilibres laissent supposer que


l’homme a tous les pouvoirs dans le couple, ce qui est souvent qualifié de patriarcat. On verra plus loin que la situation est plus subtile, d’autant que l’enquête portait à 94 % sur des


ménages d’agriculteurs. LES FACTEURS EXPLIQUANT LE NIVEAU DE LA FÉCONDITÉ Certains facteurs sont surévalués, d’autres minimisés ou passés sous silence. Ils vont du domaine anthropologique au


domaine politique. _ L’information_ Les populations africaines sont souvent considérées comme peu informées. Il n’importe pas ici de juger la qualité de l’information, mais les moyens de


s’informer sont nombreux et se sont développés rapidement. On en a connaissance grâce aux enquêtes démographiques et de santé à indicateurs multiples menées dans les cinq pays en 2012, 2013 


ou 2018 selon le cas. Le tableau 3 montre le taux de possession d’une radio, d’une télévision ou d’un téléphone portable, ainsi que l’année de la collecte pour les cinq pays concernés par


les enquêtes. Dès 2018, 97 % des ménages possédaient au moins un portable au Sénégal, à la ville comme à la campagne. 72 % étaient également dans ce cas au Mali à la même date. En 2013, ils


n’étaient que 40 % en RDC et, en 2012, 59 % au Burkina Faso et 50 % au Niger . Par comparaison, on peut estimer qu’en 2020, le taux de possession atteint au moins 80 % dans tous les pays (et


presque 100 % au Sénégal). Les ménages possèdent aussi souvent un poste radio (66 % au Sénégal et 68 % au Burkina, 52 % au Niger et 50 % au Mali, 43 % en RDC). Seules les télévisions sont


plus rares, possédées par environ 15 % des ménages. _ La polygamie_ La polygamie est assez largement pratiquée dans les cinq pays. On a indiqué sur le tableau 5 la proportion de femmes et


d’hommes âgés de 15 à 49 ans vivant en union polygame. Le Burkina Faso vient en tête avec 42 % de femmes vivant avec des coépouses, et la RDC en dernier, avec 22 %. La proportion est aussi


assez élevée dans les trois autres pays (de 32 % à 37 %). Proportionnellement, les hommes vivent moins souvent en union polygame (de 10 % à 22 % selon le pays). La polygamie diminue, mais


lentement. Au Niger, entre 2006 et 2012, elle a baissé de deux points. Au Burkina Faso, où l’on possède des observations plus anciennes, elle concernait 45 % des femmes en 1987, 42 % en 2001


 et 42 % en 2012. La proportion de femmes vivant en polygamie augmente aussi rapidement avec l’âge, dépassant parfois la moitié (57 % au Burkina à 45–49 ans). Dans quelle mesure la polygamie


influe-t-elle sur l’évolution de la fécondité ? Il faut d’abord écarter l’idée selon laquelle les femmes vivant avec un mari polygame seraient nettement moins fécondes que les monogames. Au


Sénégal, où l’on a pu calculer la fécondité selon la nature du ménage à la fin des années 1990, les femmes monogames engendraient en moyenne 7,4 enfants, les premières épouses, 6,9, les


secondes épouses, 6,6 et les épouses ultérieures, 6 enfants, soit des différences minimes . Le maintien de la polygamie signifie plutôt celui de structures familiales traditionnelles,


lesquelles sont favorables à une fécondité élevée. De fait, quand on demande aux couples le nombre d’enfants qu’ils souhaitent avoir ou le nombre idéal d’enfants dans un ménage, les réponses


donnent des chiffres élevés. _ Nombre d’enfants idéal et désiré_ Deux idées fausses ont longtemps circulé à ce propos. L’une est que les Africains n’étaient pas capables de contrôler leur


fécondité, l’autre, que les hommes souhaitaient une famille nombreuse, mais non les femmes. Les enquêtes ont tordu le cou à ces lieux communs. Comme les cinq pays présentent des traits


similaires, on va donner seulement les deux cas d’un bout à l’autre de l’éventail, celui de la RDC en 2013 et celui du Sénégal en 2018. Pour une femme sénégalaise, en moyenne, la taille


idéale de la famille est de 5,4 enfants et de 5,9 si elle vit avec un conjoint. En RDC, les chiffres évoqués sont respectivement de 6,1 et 6,6 enfants. Le décalage avec la réalité est faible


 : 0,7 enfant de plus dans l’idéal au Sénégal, 0,5 en RDC . On pourrait penser que l’on rationalise le fait d’avoir eu de nombreux enfants en estimant que l’on est dans la norme. Ce n’est


pas ce que montre le détail par âge et par nombre d’enfants déjà nés. Les femmes âgées de 20 à 24 ans donnent un idéal de 5,1 enfants au Sénégal et de 5,7 en RDC. Dans ce même pays, 63 % de


celles qui ont déjà 5 enfants souhaitent aller au-delà de 6 (52 % au Sénégal). Pour les hommes, le nombre idéal d’enfants est plus élevé que celui cité par les femmes, mais la différence est


faible : 7 enfants en moyenne pour les Congolais (c’était 6,1 pour les Congolaises), 6,5 pour les Sénégalais (c’était 5,4 pour les Sénégalaises). On peut ergoter sur la différence en raison


de la polygamie. Logiquement, les polygames devraient déclarer un plus grand nombre d’enfants comme idéal. Il se peut d’ailleurs que le modèle de la polygamie incite les monogames à s’en


rapprocher avec un nombre idéal d’enfants élevé. Si l’on revient à l’explication de Caldwell, les hommes comme les femmes tirent parti d’une main-d’œuvre enfantine. L’anthropologue ajoute un


autre élément : chaque enfant représente une chance, même faible, de réussir, par exemple d’être appelé à seconder en ville un parent qui a réussi. Outre le nombre d’enfants idéal, qui


concerne l’image que l’on se fait de la société, les enquêteurs ont posé dans les cinq pays la question du nombre d’enfants désiré personnellement. Les résultats sont proches de ceux du


nombre idéal : 5,7 en RDC contre 6,6 réellement observés à l’époque, 4 contre 4,4 au Sénégal (et en 2012, 4,6 contre 5,3 observés). Les valeurs calculées au Burkina Faso, au Niger et au Mali


s’insèrent entre celles du Sénégal et de la RDC. En cohérence avec ces résultats, le nombre déclaré de naissances non désirées est très faible (4,8 % en RDC, 2,1 % au Sénégal). On constate


aussi une grande cohérence entre les nombres idéaux et les nombres observés quand on entre dans le détail. Par exemple, en RDC, les nombres idéaux sont de 5,2 en ville et de 6,7 en milieu


rural, de 7,2 pour les femmes sans instruction, de 6,7 si elles ont fréquenté le primaire, de 5,4 si elles sont allées dans le secondaire et de 4,3 si elles ont suivi des études


universitaires. _ Une autre famille_ La fécondité est élevée dans les pays considérés parce que les parents souhaitent avoir de nombreux enfants. Dans des pays pauvres, la famille prend une


place essentielle. Elle sert d’assurance sociale quand moins de 5 % de la population sont pris en charge par celle de l’État. Elle permet à la sociabilité de s’épanouir. Plus une famille est


large, mieux elle est adaptée à ces rôles. L’économiste Gary S. Becker a opposé ce mode de vie à celui des pays développés sous la forme du dilemme de la quantité (d’enfants) contre leur


qualité, c’est-à-dire leur niveau d’éducation . D’autres éléments viennent compléter la composition des familles africaines au sein des cinq pays : polygamie, écart d’âge entre les


conjoints, rôle étendu de la parentèle, mise en couple précoce des filles, par exemple. L’enquête _ Child Marriage, Fertility, and Family Planning in Niger_ menée par le groupe Promundo a


permis d’interroger 1 200 femmes mariées âgées de moins de vingt ans. À la question de savoir qui avait décidé du mariage, 29 % des jeunes femmes ont répondu qu’elles avaient pris la


décision, 53 % que c’était une décision commune avec le futur conjoint, 9 % que leur famille l’avait décidé et 7 % que c’était leur belle-famille. 13,5 % des enquêtées étaient des coépouses.


Le rapport de l’enquête indique : «  _ Polygamy is so accepted that women can be shamed for not having co-wives_ _ ._  » Concernant la question des relations entre conjoints, 94 % indiquent


qu’elles discutent souvent avec leur mari des problèmes rencontrés, 97 % que leur époux les aime et les apprécie. Ce tableau idyllique a toutefois un envers. 90 % des décisions sont prises


par le mari et il existe une stricte séparation des tâches : 66 % des interviewées estiment, par exemple, qu’elles s’attireraient la honte de leur village si leur mari cuisinait ou faisait


le ménage. On doit préciser que l’enquête a été menée en milieu rural et que 45 % des adolescentes n’avaient fait aucune étude. Aussi, comme des exemples l’ont montré plus haut, le


changement viendra de l’installation en ville et des études. _ Troubles politiques_ Un nouvel obstacle au changement est survenu récemment dans tous les pays concernés, à part le Sénégal.


Des groupes terroristes ont pris de l’envergure ou bien des troubles civils ont éclaté. Au Mali et au Burkina Faso, la pression des groupes affiliés à Al-Qaida ou à l’État islamique sème le


désordre sur des périmètres de plus en plus vastes. Au sud du Niger, Boko Haram accentue sa pression en attaquant des villages. Des troubles graves et récurrents se poursuivent en RDC. Quel


rapport avec une fécondité élevée, pourrait-on se demander. Il ne s’agit pas d’une coïncidence. Dans la région, les autres pays où la fécondité est la plus forte sont la Somalie et le


Burundi, en proie aussi à des troubles graves. Sur un autre continent, mais à un jet de pierre de l’Afrique, le Yémen, où la guerre civile fait rage, a la plus forte fécondité de toute


l’Asie. Une particularité nouvelle de ces conflits est leur idéologie antiféministe, qui se manifeste par une régression des droits des femmes, notamment à travers la destruction des écoles


et le rapt de jeunes femmes, souvent pour procurer des épouses aux terroristes . Hors de l’Afrique, les talibans et l’État islamique à Mossoul ont montré la voie. De tels mouvements


rencontrent le soutien de certaines fractions de la population qui refusent le mode de vie occidental, dont les campagnes pour le contrôle de la fécondité sont perçues comme une de ses


manifestations les plus visibles. Le fondateur de la polémologie, Gaston Bouthoul, soutenait que la surpopulation entraînait la guerre. La causalité est en train de s’inverser : c’est la


guerre qui pourrait entraîner l’accroissement de population dans les prochaines années. CONCLUSION La fécondité a évolué au rythme des facteurs qui la conditionnent, donc assez lentement,


comme on le constate sur le tableau suivant. On a pu parler de pays à très lente transition . PAYS DATE DE FÉCONDITÉ MAXIMALE NIVEAU DE FÉCONDITÉ MAXIMALE FÉCONDITÉ EN 2020 BAISSE DE LA


FÉCONDITÉ RDC 1990 6,8 6 –0,8 Burkina Faso 1990 7 5,2 –1,8 Mali 1980 7,2 6,4 –0,8 Niger 1980 7,9 7 –0,9 Sénégal 1975 7,3 4,7 –2,6 On peut calculer qu’à eux seuls la hausse de la proportion


de population urbaine et les progrès de l’éducation secondaire rendent compte de la baisse de fécondité dans chacun des cinq pays et continueront à exercer leur influence à cet égard au


cours des prochaines années. Cela signifie aussi qu’il n’y a pas eu de modification du mode de vie familial en milieu rural. En ville, une nouvelle organisation familiale se met en place,


intermédiaire entre le modèle occidental et le modèle local traditionnel. L’effort devra donc porter sur l’éducation secondaire des filles et sur la modernisation de l’agriculture, qui


accentuera l’urbanisation en mobilisant une plus faible main-d’œuvre dans les champs. Dans le détail, les différences d’importance de la baisse reflètent bien les différences entre pays. Le


Sénégal, qui a la plus faible fécondité parmi les cinq pays examinés, connaît une croissance importante de l’éducation secondaire et de l’urbanisation. Le Burkina Faso est deuxième en raison


de ses campagnes de scolarisation. Les trois autres pays restent à des niveaux plus faibles. Leur pauvreté et leur désorganisation du fait des troubles qu’ils connaissent limitent leurs


possibilités d’accroître les capacités d’enseignement secondaire et de moderniser l’agriculture. Ces remarques permettent d’insister sur la grande diversité entre les cinq pays. D’abord,


entre les quatre du Sahel et celui d’Afrique équatoriale, dont l’environnement physique est radicalement différent. Au Sahel, l’agriculture est soumise à des aléas climatiques importants et


les sols sont assez pauvres. Ainsi, au Niger, la couverture de la consommation de céréales est passée de 112 % en 2014 à 88 % en 2017 et 108 % en 2018. La RDC, avec 40 habitants par


kilomètre carré, dispose au contraire d’abondantes ressources en eau et peut faire face à une augmentation importante de sa population. À l’intérieur de ces deux groupes de pays, les


différences ne portent pas seulement sur l’éducation, l’urbanisation et la fécondité, mais aussi sur les mœurs. Pour donner un exemple, 21 % des femmes ont été excisées au Sénégal, 58 % au


Burkina Faso et 86 % au Mali, mais presque aucune en RDC. L’acceptation de cette pratique suit les mêmes écarts. En outre, chacun des cinq pays est loin d’être homogène. Les différences


provinciales atteignent souvent l’ordre de grandeur des différences entre pays. Au Mali, par exemple, 59 % des hommes de la préfecture de Kidal sont alphabétisés, mais seulement 38 % pour


celle de Sikasso ; 3 % seulement des femmes de Kidal utilisent un moyen moderne de contraception, contre 19 % pour celles de Sikasso. 46 % des femmes de moins de vingt ans ont déjà eu un


enfant dans la province de Tombouctou, 28 % dans celle de Ségou. À cela s’ajoute la qualité des statistiques, qu’il faut souvent prendre avec des pincettes. Les politiques s’adressant aux


femmes et à la fécondité ne doivent donc pas seulement êtres calibrées par pays, mais à l’intérieur des pays, par région. Terminons par un dernier point qui a une grande importance pour les


cinq pays : le changement climatique. Tous risquent d’être violemment affectés, tant à cause de la hausse des températures déjà très élevées qu’à cause des variations de la pluviosité. Or,


ces pays n’ont pas de responsabilité dans l’élévation de la teneur en CO 2 de l’atmosphère, tant leurs émissions sont faibles. Un Congolais moyen émet 0,03 tonne de CO 2 , un Nigérien, 0,10,


un Malien ou un Burkinabé, 0,18, un Sénégalais, 0,73. Par comparaison, un Américain moyen émet 15,5 tonnes. Un doublement de la population des cinq pays à leur rythme actuel d’émission


produirait 24,8 millions de tonnes supplémentaires de CO 2 , soit l’équivalent de ce qu’émettent actuellement 1,6 million d’Américains. On comprend l’amertume, et c’est un euphémisme _ ,_


des cinq pays face aux responsabilités dans la crise climatique, car ils risquent de payer les conséquences de l’industrialisation des pays développés ou émergents. TABLEAUX TABLEAU 1 :


DONNÉES DÉMOGRAPHIQUES PAYS FÉCONDITÉ POPULATION EN 2020 POPULATION EN 2050 TAUX DE CROISSANCE POPULATION EN 1950 P2020/ P2050 P2050/ P1950 Monde 2,5 7 800 9 700 1,1 % 3 100 3,1 3,9 Sénégal


4,7 16,7 33,2 2,8 % 6,7 6,7 13,3 Mali 5,9 20,3 43,6 3 % 4,9 4,9 9,3 Burkina Faso 5,2 20,9 43,4 2,9 % 4,9 4,9 10,1 Niger 7 24,2 65,6 3,8 % 9,3 9,3 25,2 RDC 6 89,6 194,4 3,2 % 7,3 7,3 15,9


Fécondité : nombre moyen d’enfants par femme. Population : en millions. TABLEAU 2 : PROPORTIONS D’INSCRITS DANS L’ÉDUCATION (SCHOOL ENROLLMENT RATIOS) PRIMAIRE SECONDAIRE ILLETTRISME (15–24 


ANS) PAYS GARÇONS FILLES GARÇONS FILLES Burkina Faso 80 78 30 32 40 RDC ** ** 27 ** Mali 62 56 33 27 41 Niger 69 58 23 17 54 Sénégal 72 81 36 39 29 TABLEAU 3 : MÉDIAS DES MÉNAGES PAYS AVEC


RADIO REGARDE LA TÉLÉ AVEC PORTABLE RDC (2013) 43 15 40 Mali (2018) 50 40 72 Sénégal (2018) 66 61 97 Burkina Faso (2012) 68 16 59 Niger (2012) 52 12 50 TABLEAU 4 : FÉCONDITÉ PAYS TAUX DE


FÉCONDITÉ 15–19 ANS MARIÉES AVANT 18 ANS CONTRACEPTION 15–49 ANS Burkina Faso 0,132 52 29 RDC 0,138 37 22 Mali 0,164 54 17 Niger 0,154 76 16 Sénégal 0,068 29 22 TABLEAU 5 : FRÉQUENCE DE LA


POLYGAMIE (% 15–49 ANS) PAYS FEMMES HOMMES Sénégal 32 10 Burkina Faso 42 22 RDC 22 15 Niger 36 21 Mali 37 19 Situation régionale en Afrique subsaharienne, Irmine Ayihounton IRMINE AYIHOUNTON


est membre du Réseau des jeunes féministes d’Afrique de l’Ouest au Bénin. Le Réseau des jeunes féministes d’Afrique de l’Ouest regroupe des militant.e.s féministes d’Afrique de l’Ouest


francophone qui portent la voix des filles et des femmes dans les instances de décision au niveau local, régional, national et international. COMMENT PEUT-ON DÉCRIRE, DANS VOTRE PAYS, LA


SITUATION DE L’ACCÈS DES FEMMES AU DROIT À LA SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ? POUVEZ-VOUS NOUS PRÉSENTER LES ACTIONS QUE VOUS MENEZ EN CE SENS ? Le protocole de Maputo représente


aujourd’hui l’un des documents incontournables auquel on a recours pour parler des droits des femmes en Afrique. Ce protocole stipule que les droits à la santé des femmes, y compris la santé


sexuelle et reproductive (SSR), comprennent : le contrôle sur la fécondité ; le pouvoir de décision en matière de maternité ; le libre choix des méthodes de contraception ; l’information et


la protection contre les infections sexuellement transmissibles (IST) et l’éducation sur la planification familiale (PF). Cependant, en Afrique de l’Ouest, la situation des femmes reste


encore très insatisfaisante. En 2019, selon les données fournies par Guttmacher Institute , 33 millions de femmes en âge de procréer désirent éviter une grossesse et 19 millions d’entre


elles ont un besoin non satisfait de contraception moderne. Parmi ces femmes, ce besoin est plus grand chez les adolescentes âgées de quinze à dix-neuf ans que pour l’ensemble des femmes en


âge de procréer, de quinze à quarante-neuf ans (64 % contre 56 %). En outre, chaque année, 14 millions de femmes accouchent en Afrique de l’Ouest sans recevoir, majoritairement, les soins


requis et 2,4 millions optent pour des avortements clandestins, car l’avortement n’est légal que lorsqu’il s’agit d’inceste, de viol ou que la grossesse représente un danger pour la mère. Il


est donc évident que le manque ou l’insuffisance de soins de qualité et de lois relatives à la SSR met les femmes en danger. Dans certains contextes, les contraceptifs sont inaccessibles du


fait d’un manque de moyens financiers ou de l’indisponibilité de ces produits dans les centres de santé communautaire ou encore à la pharmacie. Par ailleurs, la sexualité dans certains


contextes ouest-africains reste encore un tabou limitant ainsi la possibilité des filles et des femmes d’exprimer aisément leurs besoins et de jouir d’une liberté individuelle dans les choix


qu’elles opèrent. Toutefois, ces dernières années, plusieurs associations et projets communautaires qui visent à améliorer les connaissances et renforcer les capacités des filles et femmes


à accéder à leurs droits y compris ceux relatifs à la SSR ont émergé. Grâce à ces initiatives, on constate beaucoup d’avancées, mais il reste encore des défis à relever, comme la réduction


des grossesses non désirées, l’utilisation massive des méthodes de contraception, l’accès à l’information de qualité et la reconnaissance des droits des femmes à disposer librement de leur


corps et à opérer des choix en phase avec leurs aspirations. C’est à cela que se consacre le Réseau des jeunes féministes de l’Afrique de l’Ouest depuis 2018 à travers plusieurs initiatives.


Notre mission principale est de faire entendre les voix des femmes et des filles, notamment celles ouest-africaines, dans les processus de décisions au niveau national, sous-régional et


international, et y porter nos valeurs féministes pour contribuer activement à l’amélioration des conditions de vie des femmes et des filles. Pour y arriver, nous veillons à ce que les


engagements pris soient respectés. Nous mettons également en place des actions de terrain pour impliquer les femmes et les filles d’Afrique de l’Ouest dans la définition de nos priorités et


nous avons créé un mouvement collectif féministe pour l’égalité, en collaborant avec les autres membres de la société civile et en diffusant nos valeurs. À titre illustratif, le Women 7, le


Women Deliver et le Nairobi Summit sont des espaces que nous avons utilisés pour défendre nos intérêts et proposer les solutions optimales. Par ailleurs, nous sommes présents sur les réseaux


sociaux, ainsi nous avons organisé des séries de Facebook Live, tweetup et aussi des happenings féministes dans trois pays de la sous-région autour de discours poignants sur le féminisme.


COMMENT EST-IL POSSIBLE SELON VOUS DE PROMOUVOIR L’ACCÈS DES FILLES ET DES FEMMES DANS VOTRE PAYS À UN MEILLEUR SUIVI MÉDICAL EN TERMES DE SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ? QUELS SONT LES


OBSTACLES RENCONTRÉS POUR SA MISE EN ŒUVRE ? Le système de santé en Afrique de l’Ouest, notamment celui relatif à la SSR, est caractérisé, entre autres, par un manque d’infrastructures


sanitaires pour une prise en charge adéquate, un faible investissement dans la formation et la prise en charge du personnel de santé et la stigmatisation des filles et femmes par le


personnel de santé . Dans ces conditions, le suivi médical des filles et des femmes durant la grossesse, après l’accouchement ou à la suite d’un avortement, lors du traitement d’une IST ou


encore après une complication obstétricale majeure devient complexe. Pour promouvoir l’accès des filles et des femmes de la région à un meilleur suivi médical en termes de SSR, il s’avère


important que tous les acteurs de la société intervenant dans le domaine sanitaire se mobilisent ensemble autour d’un seul objectif, celui d’améliorer la SSR des filles et des femmes de


façon à atteindre les objectifs de développement durable (ODD) à l’horizon 2030. Cette action commune impliquerait une coordination entre les acteurs publics (gouvernements) et privés


(société civile, notamment les associations de jeunes féministes, ONG, les filles et les femmes) et une combinaison de leurs efforts dans un seul programme de santé sous-régional qui soit


bien clair en termes d’objectifs, avec une mobilisation de ressources budgétaires plus importantes. Au-delà du secteur de la santé, ce mouvement collectif devrait impliquer d’autres


secteurs, tels que l’éducation, pour renforcer les connaissances grâce à des activités de sensibilisation et d’information, le développement pour une bonne gouvernance des politiques


publiques et les finances pour une valorisation des ressources humaines de santé et leur répartition équitable à l’intérieur de chaque pays. Par ailleurs, adopter une assurance maladie


universelle dans tous les pays de l’Afrique de l’Ouest pourrait également favoriser une meilleure accessibilité aux soins curatifs et préventifs, y compris ceux liés à la SSR. Bien que nous


considérions dans le cadre de cette réflexion l’Afrique de l’Ouest comme une seule entité, il demeure néanmoins une sous-région composée de plusieurs pays ayant chacun un contexte culturel.


Toutefois, ces contextes culturels se ressemblent beaucoup et jouent un rôle très important sur la santé. En effet, les programmes de SSR dans les pays ouest-africains sont souvent


confrontés aux barrières culturelles et sociétales, telles que le sexisme, les rumeurs sur la contraception, la religion, le tabou entourant la sexualité, le manque de choix reproductif ou


d’accès à l’éducation. Loin d’être un obstacle pour la mise en œuvre des propositions évoquées, le contexte culturel représente un défi ; le défi d’adapter les programmes au contexte


culturel et de surmonter les barrières. De plus, dans certains pays, la SSR ne figure pas au premier plan des priorités gouvernementales. Nos programmes pourraient donc ne pas bénéficier de


l’attention des décideurs politiques et des ressources nécessaires pour leur mise en œuvre. D’autres difficultés fréquentes dans notre mission de promotion de l’accès des filles et des


femmes aux soins de SSR sont la discrimination et les préjugés à l’égard des activistes. En outre, les normes sociales qui veulent que la femme à un âge donné construise sa vie de couple,


porte et s’occupe des enfants font que certaines femmes, surtout en milieu communautaire, accordent peu d’intérêt à nos interventions. QUELLES ACTIONS SERAIENT, SELON VOUS, PRIORITAIRES POUR


QUE DAVANTAGE DE FILLES ET DE FEMMES AIENT ACCÈS À DES STRUCTURES DE SOIN ET AUX INFORMATIONS LEUR PERMETTANT DE CONNAÎTRE LEURS DROITS ET LUTTER AINSI CONTRE LES MARIAGES ET GROSSESSES


CHEZ LES MINEURES, LES MUTILATIONS GÉNITALES FÉMININES, LES VIOLENCES BASÉES SUR LE GENRE, ETC. QU’ELLES SUBISSENT ? En Afrique de l’Ouest, certaines populations rencontrent encore des


difficultés pour discuter des questions relatives à la sexualité et les filles et femmes sont encore traitées comme des citoyens de seconde classe malgré les nombreuses initiatives. Elles


sont victimes de plusieurs types de violences sexistes et sexuelles, tels que le mariage des enfants, les mutilations génitales féminines (MGF) et les violences basées sur le genre (VBG),


qu’elles considèrent parfois comme étant la norme parce qu’elles ignorent leurs droits. Afin d’aider les filles et les femmes à prendre conscience de leurs droits, à les défendre et à les


revendiquer, il est urgent d’améliorer leur niveau de connaissances, d’augmenter leur autonomie décisionnelle et d’améliorer leur statut par des changements sociaux et politiques. Pour ce


faire, nous suggérons : – l’accompagnement technique et financier des organisations communautaires pour distribuer les informations et services par le biais des éducateurs en santé qualifiés


qui utilisent des moyens attractifs et adaptés aux réalités de la cible ; – la disponibilité et l’accessibilité des services de PF leur permettant de prendre des décisions concernant leur


propre vie, comme celles de se marier quand elles le désirent, de choisir le moment de leurs grossesses et le nombre d’enfants qu’elles souhaitent ; – des politiques d’amélioration des soins


de santé, de meilleures opportunités d’éducation et d’emploi qui les motivent à opter pour des familles moins nombreuses ; – le financement des associations de jeunes féministes pour


continuer à plaider pour l’égalité femmes-hommes dans toutes les sphères, développer et conduire des programmes de lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles, les stéréotypes


sexistes et les normes sociales discriminantes. Ces actions prioritaires devraient favoriser l’autonomie décisionnelle des filles et des femmes, la reconnaissance de leurs droits et la


réduction des agressions et des violences. Par ailleurs, les filles et les femmes doivent être impliquées dans la planification et la mise en œuvre des programmes et des politiques qui leur


sont destinées afin que leurs besoins et leurs préférences soient réellement pris en compte. Mais cela ne sera possible que si les États investissent dans le potentiel des acteurs de la


société civile, notamment les associations de jeunes féministes qui travaillent aux côtés des filles et des femmes et agissent pour déconstruire les rapports de pouvoir. Les États devraient


également rendre disponibles les infrastructures adéquates, améliorer le système de soins de santé et remédier au manque de personnel de santé qualifié dans les zones rurales. L’ENGAGEMENT


EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ FEMMES-HOMMES SE TRADUIT AUSSI PAR DES PROGRAMMES D’INFORMATION TOUCHANT AUSSI BIEN LES HOMMES QUE LES FEMMES ET DES PROJETS DE SENSIBILISATION SUR LES DROITS DES


FEMMES IMPLIQUANT LA PARTICIPATION DES HOMMES. QUELS TYPES DE PROGRAMMES FAUDRAIT-IL FINANCER ? Impliquer les hommes dans les actions pour l’égalité femmes-hommes est l’occasion pour prouver


à la gent masculine que la cause que nous défendons n’est pas contre eux, mais plutôt avec eux pour l’émancipation de l’ensemble de la société et en particulier celle des femmes. Les types


de programmes à financer à cet effet seraient à destination des mouvements féministes au sein desquels les hommes militent auprès des femmes. Faire connaître ces initiatives dans la


sous-région et donner les moyens pour que ces derniers communiquent leur passion pourrait contribuer à un changement de mentalité. Il convient également d’investir dans plusieurs autres


programmes. Il s’agit entre autres : – des programmes de déconstruction des stéréotypes masculins dès le bas âge pour mettre en avant un monde plus égalitaire pour les générations futures ;


– des programmes d’éducation et de sensibilisation pour les garçons et les hommes sur la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles ; – des actions de plaidoyer pour


prolonger et rendre obligatoires les congés de paternité ; – des programmes d’écoute et de conseils pour accompagner les garçons et les hommes dans leur processus de changement de


comportements et les aider à intégrer la notion d’égalité femmes-hommes ; – des initiatives d’encouragement des garçons et des hommes qui s’engagent pour un réel partage des responsabilités


domestiques. En dehors des types de programmes à financer, il serait intéressant de penser à l’élaboration de politiques intégrées d’égalité entre femmes-hommes mettant l’accent sur les


femmes et les hommes plutôt que des politiques séparées relatives aux femmes et aux hommes. Il s’agira alors de se référer explicitement aux hommes et aux garçons dans les politiques


d’égalité entre les sexes en précisant quelles peuvent être leurs responsabilités pour atteindre l’égalité entre les sexes. QUELS ONT ÉTÉ LES IMPACTS DE LA CRISE SANITAIRE DU COVID-19 SUR


L’ACCÈS À L’INFORMATION ET AUX SERVICES DE SANTÉ À DISPOSITION DES JEUNES ET DES FEMMES DANS LA RÉGION ? Selon les données fournies par les gouvernements et les autorités sanitaires,


l’Afrique de l’Ouest est peu touchée par la pandémie du Covid-19, ce n’est pas pour autant sans conséquence. En effet, concernant l’accès à l’information, les mesures sanitaires mises en


place par les gouvernements pour protéger les populations ont incité certains partenaires techniques et financiers lors de la première vague en 2020 à mettre en pause des projets de DSSR. De


ce fait, dans certaines régions, les activités de sensibilisation, d’éducation et d’amélioration des connaissances sur la thématique ont été suspendues. Cette situation a donc freiné la


dynamique d’information continue pour mettre les populations vulnérables à l’abri des grossesses non désirées, des IST, des avortements clandestins et des violences. À l’exception des


données relatives à la crise sanitaire, il n’existe pas, à ce jour, de données pour apprécier avec exactitude les effets du Covid-19 sur les indicateurs de SSR. On pourrait dire que le


coronavirus a volé la vedette à toutes les autres préoccupations urgentes de santé publique. En ce qui concerne l’accès aux services de santé, il a été noté dans la sous-région que, malgré


la pandémie, les centres hospitaliers offraient toujours des services. Mais les couvre-feux, l’isolement, la distanciation sociale, la peur d’être contaminé par le coronavirus, le coût élevé


des médicaments et du transport représentent quelques éléments qui limitent l’accessibilité des jeunes et des femmes aux services de santé. La réaffectation des ressources et des priorités


de tous les secteurs, y compris celui des services de SSR, pour développer un meilleur système de riposte contre le Covid-19 a également des répercussions sur l’accès aux services de santé.


Cela peut entraîner une hausse de la mortalité et de la morbidité maternelles, ainsi qu’une hausse des taux de grossesses chez les adolescentes, des besoins non satisfaits en matière de PF,


d’infections au VIH et aux maladies sexuellement transmissibles. De plus, les données disponibles dans la presse révèlent une hausse des violences conjugales et une potentielle hausse des


grossesses non désirées qui sont attribuables au confinement . QUELS PROGRAMMES SONT OU POURRAIENT ÊTRE DÉVELOPPÉS AU NIVEAU RÉGIONAL POUR Y REMÉDIER ? Il y a eu, dans plusieurs pays, la


création des lignes d’écoute pour permettre aux femmes et aux filles victimes de violences de pouvoir dénoncer leur agresseur ou signaler une situation de violences sans sortir de chez


elles. Nous proposons que des dispositions soient prises pour que les services de santé habituels soient maintenus même en temps de pandémie, en particulier les soins de SSR par le biais de 


programmes de soutien financier pour les filles et les femmes afin de mieux faire face à la crise économique engendrée par la pandémie. Nous proposons également des programmes de


renforcement des systèmes de prestations sanitaires pour éviter que les services de santé autres que ceux mobilisés contre la pandémie ne soient interrompus et des programmes de visite à


domicile pour les groupes particulièrement à risque, tels que les femmes enceintes, les personnes vivant avec le VIH et les personnes handicapées. QUELS ENGAGEMENTS CONCRETS ATTENDEZ-VOUS DU


FORUM GÉNÉRATION ÉGALITÉ, NOTAMMENT DE LA PARTIE CONSACRÉE À LA PROMOTION DES DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS ? L’objectif du Forum génération égalité (FGE) étant de dresser un bilan des


progrès accomplis et d’élaborer un programme de mesures concrètes pour atteindre l’égalité entre les femmes et les hommes avant 2030, nous attendons concrètement que : – les États s’engagent


à faire de l’éducation complète à la sexualité, une réalité ; – les États déploient au niveau international, un financement pour la mise en œuvre d’interventions adaptées aux besoins des


filles et des femmes sur un temps relativement long ; – les États augmentent significativement leur soutien financier aux organisations de la société civile, notamment aux associations de


jeunes féministes et s’appuient sur leurs compétences en matière de DSSR pour agir en conséquence ; – les États lèvent les barrières administratives actuelles qui rendent complexe l’accès


des associations féministes aux financements et que les modalités d’octroi de ces financements soient flexibles, accessibles, multi-annuels, définies de commun accord avec les associations


féministes et qu’ils s’adaptent aux réalités, aux priorités d’actions et aux besoins des féministes. Ce faisant, les États garantissent la mise en œuvre des plans d’actions des associations


féministes, le renforcement de leurs structures et une synergie d’action pour de plus grands impacts. – les États garantissent la protection des féministes et les associent à la table des


discussions. QUELS SONT LES MEILLEURS CANAUX DE FINANCEMENT DANS CE DOMAINE ? Pour les projets de DSSR, on pourrait penser à des accords de partenariats, des subventions, des conférences et


évènements à tous niveaux, des parrainages et des appels à projets. Il convient de préciser qu’actuellement les associations féministes bénéficient de peu d’accompagnement financier,


notamment sur la question des violences faites aux femmes et aux filles. Le FGE représente alors un canal idéal et un moment approprié pour que les États s’engagent auprès des associations


féministes. QUELLES ENCEINTES INTERNATIONALES VOUS APPARAISSENT COMME LES PLUS EFFICACES POUR PROMOUVOIR LES DSSR ? – la réunion annuelle du partenariat de Ouagadougou ; – l’UNAIDS,


spécifiquement sur la question du VIH/sida qui pousse pour une approche basée sur les droits humains ; – le FGE ; – la Commission sur la condition de la femme des Nations unies (CSW) ; – le


Women Deliver. Burkina Faso, Wendyam Micheline Kaboré WENDYAM MICHELINE KABORE , directrice exécutive de l’Initiative Pananetugri pour le bien-être de la femme (IPBF). IPBF vise à promouvoir


l’épanouissement de la femme et de la jeune fille au Burkina Faso et dans la sous-région ouest-africaine. COMMENT PEUT-ON DÉCRIRE, DANS VOTRE PAYS, LA SITUATION DE L’ACCÈS DES FEMMES AU


DROIT ET À LA SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ? POUVEZ-VOUS NOUS PRÉSENTER LES ACTIONS QUE VOUS MENEZ EN CE SENS ? Au Burkina Faso, la situation de l’accès des femmes aux droits et à la santé


sexuelle et reproductive (DSSR) s’est beaucoup améliorée ces dernières années, mais plusieurs défis restent à relever. Le droit des filles et des femmes à jouir de leur corps et à prendre


des décisions les concernant continue d’être ignoré dans ce pays à forte dominance patriarcale. De jeunes filles abandonnent l’école parce qu’elles sont tombées enceintes ou sont précocement


mariées. Des femmes décèdent à la suite d’accouchements rapprochés ou d’avortements clandestins. Face à cette situation, l’État burkinabè et des organisations de la société civile (OSC)


mettent un point d’honneur à promouvoir les droits des femmes et des jeunes en matière de santé sexuelle reproductive (SSR). Les différentes parties travaillent notamment à réduire le taux


des avortements, surtout ceux clandestins, à travers la mise en œuvre de politiques et d’actions préventives. En 2015, le pays a adopté une loi autorisant l’avortement, notamment en cas de


viol, d’inceste, ou si la santé de la mère ou du fœtus est en danger. Cependant, les actes tardent à suivre. En effet, cette loi reste encore méconnue du grand public et elle est aussi


ignorée par le corps médical et non appliquée en raison de jugements personnels. Les procédures d’accès à la justice sont également très complexes et les victimes mal outillées et


sous-informées sur les procédures légales en la matière, d’où la persistance des pratiques néfastes pour les femmes, dont les avortements clandestins aux conséquences terribles pour les


femmes, comme la stérilité, voire la mort. L’Initiative Pananetugri pour le bien-être de la femme (IPBF) ne saurait rester insensible à cette situation. Consciente que la lutte pour


l’amélioration de l’accès des femmes aux DSSR implique une synergie d’actions, notre organisation apporte sa pierre à l’édifice à travers plusieurs actions. Nous menons notamment des actions


de sensibilisation et de plaidoyer. Aussi mettons-nous en place un vivier de jeunes filles et jeunes femmes leaders sensibles aux DSSR. Celles-ci aguerries sur les questions liées aux DSSR


sont aptes à sensibiliser leurs pairs. La mise en place des clubs de leadership dans les lycées, collèges, centres de formation professionnelle et associations de jeunes filles constitue une


approche privilégiée par l’IPBF. Les jeunes filles leaders en charge de l’animation de ces clubs sont formées en leadership et outillées sur les questions de violences basées sur le genre


(VBG), santé sexuelle reproductive (SSR) et compétences de vie courante (CVC) afin d’assurer un bon fonctionnement des clubs, ainsi que la formation d’autres jeunes filles membres de ces


clubs. En termes de plaidoyer, un accent important est mis sur le droit à la santé sexuelle et reproductive des jeunes et principalement des jeunes filles. Les grossesses précoces et non


désirées, les avortements clandestins sont néfastes pour les jeunes filles et handicapent considérablement leur avenir. COMMENT EST-IL POSSIBLE SELON VOUS DE PROMOUVOIR L’ACCÈS DES FILLES ET


DES FEMMES DANS VOTRE PAYS À UN MEILLEUR SUIVI MÉDICAL EN TERMES DE SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ? QUELS SONT LES OBSTACLES RENCONTRÉS POUR SA MISE EN ŒUVRE ? Pour promouvoir l’accès des


filles et des femmes à un meilleur suivi médical en termes de santé sexuelle et reproductive au Burkina Faso, nous misons beaucoup sur trois principaux domaines : le plaidoyer, la


sensibilisation et le renforcement des capacités. En effet, les défis en lien avec le suivi médical se situent à plusieurs niveaux. Nous mettons en place des plaidoyers en direction de


l’État et de ses partenaires afin qu’ils prennent davantage en compte les besoins spécifiques des filles et des femmes en matière de santé sexuelle et reproductive (SSR), investissent


davantage dans la SSR, mettent en œuvre des politiques pour mieux satisfaire ces besoins et améliorer la qualité des soins offerts ainsi que l’accès des filles et des femmes aux services de


santé sexuelle et reproductive. Des rapports d’études, d’enquêtes et d’activités, il ressort des insuffisances du corps médical à assurer un service efficace et adapté aux besoins en santé


sexuelle et reproductive des filles et des femmes. Les jugements personnels, la réticence à offrir certains services aux jeunes filles et le manque de compétences dans certains domaines


spécifiques de la SSR constituent des freins à la fréquentation des services de SSR par les adolescents et les jeunes adultes. Ce qui entraîne par conséquent un faible taux de suivi médical


en SSR, car les jeunes viennent en consultation quand ils y sont contraints, mais dès qu’une solution est trouvée, ils ne reviennent plus pour le suivi. La sensibilisation permet notamment


d’apporter les informations justes sur les DSSR, de déconstruire, un tant soit peu, les normes sociales qui perpétuent les inégalités dans l’accès aux services de santé sexuelle et


reproductive et d’informer les populations sur les bonnes pratiques en matière de santé sexuelle et reproductive, pour le bien-être de la communauté, des femmes et des filles, en


particulier. Pour y parvenir, nous organisons plusieurs activités, utilisons divers canaux de sensibilisation et nous impliquons tous les acteurs. Enfin, nous travaillons au renforcement des


capacités des leaders de jeunesse afin d’appuyer les actions de plaidoyer et de sensibilisation. Une jeunesse consciente constitue une grande richesse, d’où l’importance de développer les


aptitudes, connaissances et capacités des jeunes – filles et garçons – à conduire leur vie par des choix judicieux et des comportements responsables à même de leur assurer un avenir


meilleur. Cependant, nous sommes confrontées à plusieurs difficultés dans le cadre de la mise en œuvre de ces différentes actions. Nous pouvons citer, entre autres, les normes sociales et


culturelles, et les réticences individuelles. Certaines pratiques néfastes à l’encontre des femmes ont la peau dure. Elles sont engendrées et entretenues par le système patriarcal et ses


corollaires qui sont des vecteurs de discriminations et de violations des droits des femmes au Burkina Faso. L’hostilité du contexte constitue un grand frein aux respects des droits des


filles et des femmes. Certains sujets demeurant tabous à ce jour, ils occasionnent de fait la perpétuation des violences basées sur le genre (VBG). QUELLES ACTIONS SERAIENT, SELON VOUS,


PRIORITAIRES POUR QUE DAVANTAGE DE FILLES ET DE FEMMES AIENT ACCÈS À DES STRUCTURES DE SOIN ET AUX INFORMATIONS LEUR PERMETTANT DE CONNAÎTRE LEURS DROITS, ET LUTTER AINSI CONTRE LES MARIAGES


ET GROSSESSES CHEZ LES MINEURES, LES MUTILATIONS GÉNITALES FÉMININES, LES VIOLENCES BASÉES SUR LE GENRE, ETC. QU’ELLES SUBISSENT ? Au Burkina Faso, la volonté politique a permis l’adoption


de politiques favorables aux DSSR. Le ministère de la Santé, en collaboration avec des départements sectoriels du ministère, a mis en place des mesures phares, maintenant ainsi le leadership


du pays en la matière. En effet, le Burkina Faso a fourni d’importants efforts sur le plan politique et programmatique : politique de la délégation des tâches en planification familiale


(PF), prise en compte de la PF dans le Plan national de développement économique et social (PNDES) et élaboration du plan national d’accélération de la PF (PNAPF 2017–2020) en révision. Il


continue cette lancée à travers la récente adoption de la politique de la gratuité des soins et services de planification familiale, la révision du Code de santé publique et les politiques,


les normes et protocoles en santé sexuelle et reproductive et les différentes politiques et initiative de lutte contre le cancer du col de l’utérus – dont la gratuité du dépistage et du


traitement des lésions précancéreuses depuis 2016, la perspective d’introduction du vaccin contre les infections au papillomavirus dans la vaccination générale, etc. Par ailleurs, le pays


est partie prenante de plusieurs engagements en faveur des DSSR et a pris activement part à plusieurs instances de concertations sur les DSSR au niveau régional et international :


partenariat de Ouagadougou, Family Planning 2020, Conférence internationale sur la PF, etc. Ce tableau très reluisant peut laisser croire que les actions gouvernementales couvrent les


besoins réels de la population. Or, malheureusement, des insuffisances sont toujours observées à tous les niveaux de la chaîne d’intervention. Nous estimons certaines actions primordiales et


nécessaires pour le respect des droits des filles et des femmes au Burkina Faso, à savoir : – l’intégration de l’éducation complète à la vie sexuelle (ECS) dans le système de l’enseignement


formel et non formel, en favorisant une sensibilisation à grande échelle des élèves et du corps enseignant sur la SSR et sur les VBG ; – le renforcement de l’accès des adolescents et des


jeunes adultes aux services de SSR avec la formation des prestataires de santé en l’approche spécifique des jeunes populations, afin d’accroître leurs capacités à offrir des services ciblés


et adaptés aux besoins des jeunes ; – la création d’espaces dédiés aux jeunes et équipement de ces espaces afin de permettre aux jeunes de bénéficier d’espaces récréatifs pour leurs


activités ludiques et éducatives ; – la sensibilisation/communication pour le changement de comportement. En plus de développer les capacités et les aptitudes des jeunes à prendre leur


destin en main, il est primordial de renforcer les campagnes de communication grand public, afin de participer et de contribuer à la déconstruction des stéréotypes sexistes et de genre et


ainsi favoriser un contexte respectueux des droits des filles et des femmes ; – la réalisation d’actions de plaidoyer. L’application d’un système juridique qui dispose de tous les textes et


décrets d’application nécessaires pour protéger les victimes de VBG est primordiale ; – la mise en place de cliniques juridiques proposant l’assistance nécessaire aux victimes pour le


respect de leurs droits et la réparation des dommages. L’ENGAGEMENT EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ FEMMES-HOMMES SE TRADUIT AUSSI PAR DES PROGRAMMES D’INFORMATION TOUCHANT AUSSI BIEN LES HOMMES QUE


LES FEMMES ET DES PROJETS DE SENSIBILISATION SUR LES DROITS DES FEMMES IMPLIQUANT LA PARTICIPATION DES HOMMES. QUELS TYPES DE PROGRAMMES FAUDRAIT-IL FINANCER ? Dans l’analyse du contexte


réalisé par l’IPBF en 2019, il ressort comme principales au profit des jeunes filles et des femmes et réaliser des campagnes d’information à l’endroit des parents, leaders coutumiers et


religieux sur la connaissance et le respect des droits des jeunes filles. Ces campagnes sont essentielles pour changer les attitudes néfastes et les normes sociales sous-jacentes qui


handicapent le plein épanouissement des filles et des femmes. Il faut mener des actions de plaidoyer auprès des structures gouvernementales pour le vote et/ou l’application de textes


favorables à la promotion des droits de la jeune fille et de la jeune femme. En traduisant ces deux recommandations en actions, nous pouvons articuler des programmes spécifiques, aussi bien


à destination des adolescents et des jeunes adultes, filles et garçons, qu’à destination de toute la population générale, hommes et femmes, pour atteindre les objectifs de l’égalité


femmes-hommes. À ce titre, les financements doivent davantage cibler des programmes spécifiques pour les jeunes, pensés par les jeunes et mis en œuvre par eux- mêmes. L’implication des


jeunes est primordiale, principalement les jeunes filles, qui sont les mieux indiquées pour parler de leurs difficultés et exprimer au mieux leurs besoins spécifiques. La question de la


mobilisation des ressources est un point central de notre travail, d’où la mise en place par l’IPBF du fonds Pananetugri, première recommandation de l’étude diagnostique de 2019. En réponse


aux défis de mobilisation des ressources accrus au sein des organisations dirigées et composées de jeunes filles et de jeunes femmes, nous confirmons que le financement d’initiatives


développées et mises en œuvre par des jeunes femmes est essentiel. Il va falloir promouvoir et soutenir des programmes sensibles au genre, des programmes inclusifs, car, aujourd’hui, il est


très important de miser sur l’approche intégrée de la dimension de genre ( _ gender mainstreaming_ ). Le financement de programmes intégrant des approches impliquant les hommes et les


femmes, tout en tenant compte de leurs spécificités, est à encourager. Il faut développer des hommes et des femmes, en mettant l’accent sur les programmes de sensibilisation à destination de


toute la population, des plaidoyers spécifiques qui ciblent toutes les catégories sociales. Les programmes qui luttent contre les pesanteurs sociales et culturelles, qui contribuent à la


déconstruction des stéréotypes sexistes et de genre et apportent un changement considérable du contexte sont complémentaires et nécessaires. Enfin, il faut financer des programmes


d’amélioration de l’environnement juridique burkinabè en soutenant l’adoption de textes juridiques favorables aux droits des filles et des femmes et en formant les acteurs de la justice pour


optimiser leur travail. L’ÉCOLE A AUSSI UN RÔLE À JOUER DANS LA LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS EN RAISON DU GENRE, DE L’ORIENTATION SEXUELLE, ETC. ET EN FAVEUR DE L’ÉDUCATION COMPLÈTE À


LA SEXUALITÉ. QUELS PROGRAMMES SONT OU POURRAIENT ÊTRE DÉVELOPPÉS DANS CE SENS DANS VOTRE PAYS, ET SI CELA EXISTE, Y’A-T-IL DES COLLABORATIONS AVEC VOTRE PAYS AU NIVEAU RÉGIONAL ?


L’éducation au Burkina Faso est à la croisée des chemins, après plusieurs expériences et réformes touchant aussi bien la forme que le fond. L’éducation burkinabè poursuit sa restructuration,


avec à la clé des réformes récentes, qui sont sources de polémiques. Elle est également éprouvée par les catastrophes naturelles, comme les inondations, et la crise sécuritaire que connaît


le pays ces dernières années. Les données recueillies auprès du secrétariat technique de l’éducation en situation d’urgence indiquent, à la date du 5 février 2021, que 2 212 établissements


sont fermés. Ces fermetures d’écoles affectent directement 316 040 élèves, soit 168 463 garçons et 147 577 filles, ainsi que 12 366 enseignants, soit 7 889 hommes et 4 481 femmes. Cette


situation alarmante a conduit à mettre en place plusieurs initiatives pour réintégrer les élèves dans le système scolaire. Plusieurs acteurs sont impliqués, le ministère en premier plan, les


partenaires au développement, ainsi que les organisations intervenant sur les questions de l’éducation. Les organisations de défense des droits des filles et des femmes, dont l’IPBF,


s’intéressent aussi à la question en créant des projets spécifiques. Par exemple, la stratégie de scolarisation accélérée (SSA/P), adoptée depuis 2006 par le ministère de l’Éducation et, au


titre des organisations de la société civile, l’IPBF, met en œuvre un projet de plaidoyer guidé par les données en faveur de l’éducation des filles dans les situations de crise en Afrique.


On peut compter beaucoup d’autres initiatives, mais peu d’entre elles intègrent la question des droits, principalement la lutte contre les discriminations en raison du genre, ou la


problématique de l’éducation complète à la sexualité. Ce dernier point soulève des oppositions au Burkina Faso. En effet, en avril dernier, une déclaration du ministre de l’Éducation a


laissé sans voix les acteurs qui militent en faveur de l’introduction de l’éducation complète à la sexualité. Ainsi, lors d’une interview, le ministre a déclaré : « Il y a la question de la


sexualité en milieu scolaire qui est un phénomène aussi grave, surtout, de plus en plus, avec les tentatives de certains partenaires techniques et financiers qui veulent nous amener à


accepter l’éducation complète à la sexualité. Dans le mot “complète”, c’est de nous faire admettre l’homosexualité . » Au vu des interventions sur le sujet, nous estimons qu’il est urgent


qu’une communication spécifique voie le jour à travers un programme afin d’apporter les éclaircissements nécessaires sur l’introduction de l’éducation complète à la sexualité dans notre


système scolaire. Nous, organisations de la société civile, adhérons aux recommandations des bénéficiaires et autres acteurs de projets, de contextualiser les différentes thématiques,


concepts et stratégies en lien avec le sujet. Il est nécessaire que les réponses soient en adéquation avec le contexte, et surtout que le langage utilisé par les acteurs soit compréhensible


pour le plus grand nombre. Des programmes de sensibilisation, de plaidoyer en faveur de « l’introduction de l’éducation à la vie familiale » (formulation adoptée par le Burkina Faso à la


place de « l’éducation complète à la sexualité ») sont à encourager et à appliquer dans les plus brefs délais, afin de protéger la santé et d’améliorer l’avenir des jeunes filles et des


jeunes garçons. Il faut donc élaborer des politiques éducatives sensibles au genre, revoir les curricula de formation des enseignant-e-s en y intégrant l’éducation à la vie familiale, ainsi


que des matières pouvant permettre d’enseigner les valeurs d’égalité et d’équité en milieu scolaire. Aussi faut-il retirer des programmes d’enseignement les manuels scolaires qui perpétuent


les stéréotypes sexistes, les discriminations et les inégalités de genre. Pour ce faire, la réforme des formations des enseignants s’impose. QUELS ENGAGEMENTS CONCRETS ATTENDEZ-VOUS DU FORUM


GÉNÉRATION ÉGALITÉ, NOTAMMENT SUR LA PARTIE CONSACRÉE À LA PROMOTION DES DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS ? QUELS SONT LES MEILLEURS CANAUX DE FINANCEMENT DANS CE DOMAINE ? QUELLES ENCEINTES


INTERNATIONALES VOUS APPARAISSENT COMME LES PLUS EFFICACES POUR PROMOUVOIR LES DSSR ? Depuis la Conférence mondiale sur les femmes (Beijing en 1995), aucune action mondiale d’envergure en


faveur de la SSR n’avait été posée par les États et la société civile. Craignant un recul sur ces droits, la France, le Mexique et ONU Femmes ont décidé de célébrer les vingt-cinq ans de ce


temps clé à travers le Forum génération égalité (FGE) initialement prévu en juillet 2020, mais reporté en raison de la crise liée à la Covid-19. Cet évènement international se tiendra à


Paris du 30 juin au 2 juillet 2021 et réunira, majoritairement en visioconférence, des acteurs de la société civile, des mouvements féministes, mais également des États, des chercheurs, des


fondations et des entreprises. De ce fait, le forum à venir constitue un temps fort de l’engagement des défenseurs de l’égalité entre les femmes et les hommes de tous les horizons. Ce cadre


de concertation mondial des défenseurs des droits des filles et des femmes est une occasion de mener des actions concrètes et de réaliser immédiatement et durablement des changements au


profit des filles et des femmes. À travers la mise en place des six coalitions d’actions, la problématique des droits des filles et des femmes dans sa globalité sera traitée. Nous attendons


du Forum génération égalité des recommandations à l’endroit des différentes parties (États, organisations non étatiques, partenaires techniques et financiers, société civile…) pour une


meilleure protection des droits à la santé sexuelle et reproductive. Cela inciterait les États à adopter des mesures fortes et concrètes, qui permettraient de réduire les inégalités de genre


dans l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive et de mieux lutter contre les pratiques néfastes pour les filles et femmes, comme les avortements clandestins, les mutilations


génitales féminines. Ces engagements, qui seront pris principalement par les acteurs étatiques, les partenaires au développement et les autres parties prenantes, devront être traduits en


actes ; matérialisés par des programmes clairement définis et formulés en vue de venir à bout des difficultés que rencontrent les filles et les femmes dans leur quête quotidienne d’accès aux


droits sexuels et reproductifs. En Afrique, et principalement dans la partie Ouest, région exposée à plusieurs maux – catastrophes naturelles, crise sanitaire et crise sécuritaire –, les


défis sont énormes. Malheureusement, l’importance des besoins non satisfaits en lien avec la précarité des populations pose la question de la priorisation des enjeux nationaux. Les


partenaires au développement, le système des Nations unies, les représentations diplomatiques constituent, à ce jour, les principaux pourvoyeurs de ressources du Burkina Faso. Plusieurs


projets sont développés par les grandes puissances mondiales, mais ils sont axés sur les questions sécuritaires, laissant malheureusement la question du développement à la responsabilité de


l’État burkinabè, qui peine considérablement à soutenir cet enjeu. Pour les acteurs de la société civile, les ONG internationales sont les plus ciblées dans la mobilisation des ressources.


La Banque mondiale, l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP), les ONG internationales travaillant sur la thématique, les institutions


régionales africaines, l’Union africaine (UA) sont des structures, organisations ou instances à même de porter haut le combat pour l’accès de toutes et tous aux services des DSSR, au Burkina


Faso et dans la sous-région. Mali, Oumou Salif Touré OUMOU SALIF TOURÉ est membre du Réseau des jeunes féministes d’Afrique de l’Ouest au Mali qui regroupe des militantes et militants


féministes d’Afrique de l’Ouest francophone qui portent la voix des filles et des femmes dans les instances de décision au niveau local, régional, national et international. COMMENT PEUT-ON


DÉCRIRE, DANS VOTRE PAYS, LA SITUATION DE L’ACCÈS DES FEMMES AU DROIT ET À LA SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ? POUVEZ-VOUS NOUS PRÉSENTER LES ACTIONS QUE VOUS MENEZ EN CE SENS ? Le Mali


présente des indicateurs assez faibles en matière de santé sexuelle et reproductive (SSR), notamment en termes de réalisation des droits sexuels et reproductifs (DSSR) pour les jeunes et


adolescentes et encore plus pour les femmes. Les taux d’accès à la planification familiale et aux méthodes contraceptives y sont globalement bas, les taux de grossesses et mariages précoces


et de violences liées au genre sont élevés, avec de fortes disparités régionales. D’après le dernier recensement du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) publié en 2019,


le Mali est classé au 184 e rang (sur 189) dans l’indice de développement humain (IDH). À cela s’ajoute une grande insécurité depuis 2012 liée aux attaques djihadistes et aux conflits


intracommunautaires. Ce constat est le reflet de profondes inégalités économiques, sanitaires et sociales qui minent la croissance du pays et le bien-être de la population. Bien que le


contexte soit hostile, des actions ciblées sont menées sur ces sujets, avec un cadre légal relativement étoffé, bien que largement non appliqué, une société civile active et rassemblant un


large panel d’acteurs et d’actrices. Les sensibilités culturelles et les tabous entourant la sexualité empêchent souvent les citoyens de s’informer sur la santé et les soins en matière de


santé sexuelle et reproductive, rendant difficile le traitement de ces questions par les gouvernements. COMMENT EST-IL POSSIBLE SELON VOUS DE PROMOUVOIR L’ACCÈS DES FILLES ET DES FEMMES


DANS VOTRE PAYS À UN MEILLEUR SUIVI MÉDICAL EN TERMES DE SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ? QUELS SONT LES OBSTACLES RENCONTRÉS POUR SA MISE EN ŒUVRE ? Malgré ce climat hostile, caractérisé


par l’incapacité du gouvernement à faire passer le projet de loi pour l’éducation sexuelle complète, la démarche machiavélique de certains leaders religieux qui hypothèquent l’avenir de


toute une génération et l’inaction d’une grande partie de cette jeunesse, certains jeunes sont sur le terrain dans la journée aux camps de déplacés internes, dans les établissements


scolaires, dans les gares, à la radio et à la télé, la nuit dans les familles, au grin autour d’un thé, toutes les occasions sont bonnes pour informer, sensibiliser et orienter sur les


questions de santé sexuelle et reproductive. Certains des obstacles résultent des restrictions d’âge qui exigent le consentement des parents ou personnes décisionnaires pour les mineures


tandis que d’autres sont issus des normes sociales qui freinent surtout la capacité des jeunes femmes à se renseigner sur leur sexualité et leur santé sexuelle et reproductive. Ces


barrières dissuadent les adolescents à chercher une assistance médicale ou des informations au moment où ils commencent à avoir une vie sexuelle active et ont besoin d’avoir de telles


informations pour leur propre sécurité. Le mariage d’enfant et la grossesse précoce ont de sérieuses répercussions négatives sur la capacité des filles à jouir de leur droit à l’éducation


et à la santé. L’exigence du consentement d’un tiers est un autre problème non négligeable. Les adolescents sont souvent confrontés à la difficulté de ne pouvoir accéder aux informations


et aux services de santé reproductive et sexuelle qu’avec le consentement du parent, tuteur, époux ou docteur. L’accès des femmes aux services de santé ou aux cliniques qui fournissent ces


services est entravé sous prétexte que la femme n’a pas l’autorisation du mari, du partenaire, des parents ou des autorités sanitaires, parce qu’elle est célibataire ou, simplement, parce


que c’est une femme, ce qui est contraire à la loi n° 02–044 relative à la santé sexuelle et reproductive au Mali. Pour s’assurer que les femmes et les filles sont bien accueillies et que


leurs besoins sont pris en compte, il est nécessaire de développer un plaidoyer pour la création d’une ligne budgétaire spécifique à l’achat des produits contraceptifs afin que le coût soit


amoindri, car le prix exorbitant proposé par les services de santé publique est dissuasif. Il faut aussi communiquer sans relâche sur l’existence de la loi SR au Mali, la majorité des


acteurs travaillant dans ce domaine semblent l’ignorer. Cette méconnaissance a pour conséquence la violation des droits des bénéficiaires au vu et au su de tous. Les nombreux défenseurs des


droits de l’homme, organisations de la société civile et professionnels de santé qui œuvrent en faveur de la santé et des droits sexuels et reproductifs des femmes au Mali sont aussi


touchés par ce problème. Dans certains contextes, des violences, des menaces, des propos haineux et des campagnes de dénigrement, notamment de la part de certains religieux, continuent de


viser à la fois les défenseurs des droits de l’homme qui plaident pour l’égalité de genre et pour la santé et les droits sexuels et reproductifs des femmes et les professionnels de santé


qui prodiguent des soins dans ce domaine. Trop souvent, l’accueil hostile des prestataires dans les centres de santé, la discrimination par rapport à l’âge, le jugement des choix de la


bénéficiaire du service ou carrément le refus d’octroyer une méthode contraceptive poussent les femmes et les filles dans le besoin à fuir les hôpitaux publics. En y allant, elles prennent


aussi le risque de croiser des connaissances. Ainsi, la discrétion dont elles font preuve pour adopter une méthode contraceptive se volatilise complètement. C’est pourquoi il est important


de souligner la nécessité de créer et d’animer des centres spécialisés en santé sexuelle et reproductive, avec des prestataires qualifiés au service des femmes dans le besoin. Bien que


chaque individu travaillant dans une structure sanitaire ait le droit d’avoir ses propres valeurs en ce qui concerne le comportement sexuel des jeunes et des adolescents, il est impératif


que les prestataires reconnaissent que les adolescents et les jeunes, tout comme les adultes, ont des droits sexuels et reproductifs fondamentaux, dont le droit d’être traité avec dignité


et respect, le droit d’avoir accès à une gamme de services, dont la contraception, accessibles et abordables et le droit à des services privés et confidentiels. Ces droits impliquent que


les prestataires fassent la part des choses entre leurs valeurs personnelles et leur devoir professionnel afin d’offrir aux jeunes et aux adolescents des services de santé sexuelle et


reproductive de qualité. QUELLES ACTIONS SERAIENT, SELON VOUS, PRIORITAIRES POUR QUE DAVANTAGE DE FILLES ET DE FEMMES AIENT ACCÈS À DES STRUCTURES DE SOIN ET AUX INFORMATIONS LEUR PERMETTANT


DE CONNAÎTRE LEURS DROITS, ET LUTTER AINSI CONTRE LES MARIAGES ET GROSSESSES CHEZ LES MINEURES, LES MUTILATIONS GÉNITALES FÉMININES, LES VIOLENCES BASÉES SUR LE GENRE, ETC. QU’ELLES


SUBISSENT ? En termes de priorité, il faut miser sur la communication pour le changement de comportement générationnel. Il ne s’agit pas du schéma classique qui consiste à communiquer,


sensibiliser pour le changement de comportement, mais plutôt du processus de protection de la nouvelle génération. Un terrain d’entente ne sera pas trouvé dans une société patriarcale et


conservatrice comme le Mali. Il est important que les programmes soient mis en œuvre dans toute la communauté, et pas uniquement pour les jeunes femmes ou les jeunes hommes. La constitution


de systèmes de soutien solides et cohérents autour des jeunes peut prendre de nombreuses formes. Les adolescents et les jeunes ne sont pas un groupe hétérogène, les besoins peuvent varier en


fonction de l’âge, du statut matrimonial ou encore des moyens de subsistance… Il est important d’orienter la sensibilisation vers des cibles plus jeunes mais futures citoyens, les parents


ont déjà été victimes de ce système obscurantiste qui consiste à les maintenir liés à des pratiques traditionnelles néfastes sous le couvert de la religion ou en accusant les rares


défenseurs de droits humains de « prendre l’argent du Blanc ». Une nouvelle génération émerge, qui a besoin d’aide et a envie de se démarquer. C’est elle qui doit être au cœur des projets de


sensibilisation, c’est à elle qu’il faut adresser les messages pour le changement de comportement, il faut lui faire comprendre l’importance d’étudier, de devenir responsable, indépendant,


de s’acquitter de ses devoirs, de connaître et de réclamer son droit. Voilà comment la future génération sera protégée et fera front contre les maux qui minent notre société (violence basée


sur le genre, mariage d’enfants, grossesse précoce…). L’utilisation des réseaux sociaux comme canaux de sensibilisation ouvre de nouvelles possibilités d’accès aux informations. Les filles


et les femmes peuvent découvrir leur corps de façon ludique ou non et prendre connaissance des différentes méthodes modernes de contraception ; elles peuvent également apprendre des mesures


simples qui peuvent sauver la vie des enfants, des jeunes filles et des femmes. De nombreux exemples existants montrent, par exemple, comment la diffusion de témoignages de femmes victimes


de violences basées sur le genre (VBG) et ayant pu reconstruire leur vie a été un moyen d’éducation puissant pour d’autres femmes, en les poussant à oser dénoncer les violences. Le fait


aussi de montrer des femmes peu ou non éduquées devenues des modèles ou des leaders influentes qui participent aux décisions prouve que les femmes et les filles sont capables de gagner en


confiance et ainsi discuter avec le conjoint et la famille des décisions qui concernent, entre autres, la santé, l’éducation des filles, lutter contre le mariage des enfants et militer pour


le travail des femmes. L’ENGAGEMENT EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ FEMMES-HOMMES SE TRADUIT AUSSI PAR DES PROGRAMMES D’INFORMATION TOUCHANT AUSSI BIEN LES HOMMES QUE LES FEMMES ET DES PROJETS DE


SENSIBILISATION SUR LES DROITS DES FEMMES IMPLIQUANT LA PARTICIPATION DES HOMMES. QUELS TYPES DE PROGRAMMES FAUDRAIT-IL FINANCER ? Nous sommes tous responsables d’une vision plus féministe.


L’égalité entre les femmes et les hommes est une exigence de la démocratie, la lutte pour l’égalité est une lutte universelle. Tout le monde doit s’impliquer : l’État, les collectivités


territoriales, les élues et les élus, les enseignantes et les enseignants, les parents, les services jeunesse, les associations… Il ne s’agit aucunement d’annuler la différence biologique


entre l’homme et la femme, mais bien de travailler à plus d’égalité et de lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Et ce n’est pas qu’« une affaire de femmes » justement, c’est une


affaire de justice sociale, d’où la nécessité d’impliquer les hommes dans les projets et les programmes exécutés. L’engagement des hommes peut être une approche utile dans cette lutte. La


masculinité positive doit se trouver au cœur des actions, les hommes et les garçons sont vus comme des partenaires et des agents de changement afin de promouvoir activement l’égalité́ entre


les sexes et de transformer les normes de genre inéquitables ou préjudiciables, y compris les formes nocives de masculinité. En fin de compte, cette approche vise à améliorer nos résultats


afin que les hommes et les femmes puissent vivre en harmonie tout en respectant le libre arbitre des femmes. Il faut insister sur le libre arbitre, parce qu’on a parfois tendance à croire


que, sans les hommes, les projets pour l’égalité, les droits sexuels et reproductifs sont voués à l’échec. Cela reviendrait à perpétuer la logique patriarcale. Nos vies n’en dépendent pas.


Les femmes et les filles sont plus qu’une minorité puissante qui peut s’imposer en élevant des «  _ he for she_  » en forgeant le caractère des futurs hommes. Les stéréotypes seront


déconstruits et une société égalitaire s’imposera, avec ou sans l’aide des hommes. QUELS ONT ÉTÉ LES IMPACTS DE LA CRISE SANITAIRE LIÉE À LA COVID-19 SUR L’ACCÈS À L’INFORMATION ET AUX


SERVICES DE SANTÉ À DISPOSITION DES JEUNES ET DES FEMMES DANS LA RÉGION ?  QUELS PROGRAMMES SONT OU POURRAIENT ÊTRE DÉVELOPPÉS AU NIVEAU RÉGIONAL POUR Y REMÉDIER ? L’éducation sexuelle


complète à la malienne est un vrai casse-tête ! Malgré les efforts consentis par la société civile, le projet d’insertion de l’éducation sexuelle complète a été balayé d’un revers de main


par les leaders religieux et leurs fidèles sous prétexte que nous voulons apprendre aux enfants à être des « homosexuels » ! À la suite d’un vaste mouvement de protestation médiatique sur


les réseaux sociaux accompagné de meeting et marches sur les places publiques de la capitale, le projet est resté à l’état embryonnaires. Les adolescents doivent bénéficier d’une information


sur la santé sexuelle et reproductive et d’une éducation à cet égard qui soient médicalement exactes, complètes et adaptées à leur niveau. Il est démontré que l’éducation complète à la


sexualité peut accroître les comportements propices à la protection de la santé sexuelle. L’accès à l’information est crucial pour sensibiliser les adolescentes et les adolescents sur la


santé et les droits sexuels et reproductifs. Au Mali, les cours de reproduction en biologie ne suffisent pas, ni les cours d’éducation à la vie familiale. Peu d’informations portent sur les


violences basées sur le genre, le viol, la planification familiale. Les connaissances des jeunes restent souvent superficielles et incomplètes et empreintes de croyances ou d’idées reçues


erronées de la personne qui enseigne. La véracité des faits dépend de son humeur, de sa croyance ou même parfois de son orientation politique. L’éducation sexuelle en milieu scolaire est une


nécessité à partir du moment où les parents ont démissionné. C’est à l’école de prendre le relais et briser le tabou lié à la sexualité, en s’adaptant à l’âge de l’enfant ou de


l’adolescent. Pour accompagner une nouvelle génération de jeunes capables de faire des choix éclairés, il faut au préalable leur fournir des informations objectives sur leur sexualité. Il


faut écouter les adolescents dans le cadre de cette éducation complète à la sexualité. Ils ne sont pas de simples récipiendaires de programmes ; ce sont les premiers acteurs. Ils doivent


être en possession d’informations actualisées et pertinentes pour devenir des alliés plus tard. Le gouvernement doit comprendre que l’investissement dans l’éducation complète à la sexualité


garantit une éducation de qualité à ces jeunes, en particulier aux jeunes femmes et aux jeunes filles. Si plus de filles restent à l’école et sont dotées des connaissances nécessaires pour


prendre des décisions cruciales, les répercussions seront inestimables. Au-delà des aspects techniques et biologiques de la conception et de la maternité, il est primordial d’aborder les


questions de droits en matière sexuelle et de la procréation des jeunes, les relations entre garçons et filles, les inégalités de genre et les stéréotypes qui dictent le modèle de société et


de rôle en fonction du sexe. Toutefois, il faudrait s’assurer de la compétence et de la maîtrise des sujets par les animateurs, enseignants ou agents de santé qui en sont chargés et il faut


surtout remettre sur la table l’insertion de l’éducation sexuelle complète dans les programmes scolaires. QUELS ENGAGEMENTS CONCRETS ATTENDEZ-VOUS DU FORUM GÉNÉRATION ÉGALITÉ, NOTAMMENT SUR


LA PARTIE CONSACRÉE À LA PROMOTION DES DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS ? QUELS SONT LES MEILLEURS CANAUX DE FINANCEMENT DANS CE DOMAINE ? QUELLES ENCEINTES INTERNATIONALES VOUS APPARAISSENT


COMME LES PLUS EFFICACES POUR PROMOUVOIR LES DSSR ? La politisation des questions des droits sexuels et reproductifs contribue à en faire un secteur négligé par les donateurs, alors que la


santé des filles et des femmes est considérée comme une condition pour l’atteinte des objectifs de développement durable (ODD) et l’accélération de la croissance économique qui peut résulter


d’une baisse rapide de la fécondité du pays et l’évolution ultérieure de la structure par âge de la population. Dans les pays en développement, les besoins non couverts sont considérables


et les financements insuffisants. La pandémie de la Covid-19 a contribué à accentuer les difficultés. La réadoption de la politique de Mexico (Global Gag Rule) par les États-Unis en 2017, a


eu un impact désastreux sur le niveau du financement international disponible pour les DSSR. De nombreux jeunes ont été privés d’informations, de méthodes de contraception, beaucoup de


centres d’information dédiés à la santé sexuelle et reproductive ont été fermés. Le leadership français sur la Coalition d’action DSSR représente une opportunité majeure pour renforcer les


engagements politiques en faveur de la réalisation des DSSR et pour assurer la concrétisation de ces engagements à travers des financements suffisamment ambitieux pour contribuer à combler


le manque de financement au niveau international. Niger, Nafissa Hassan Alfari NAFISSA HASSAN ALFARI est présidente de la Cellule nigérienne des jeunes filles leaders (CNJFL). La CNJFL agit


en faveur de la promotion de l’éducation de ses jeunes filles et femmes, le leadership et l’entrepreneuriat féminin. COMMENT PEUT-ON DÉCRIRE, DANS VOTRE PAYS, LA SITUATION DE L’ACCÈS DES


FEMMES AU DROIT ET À LA SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ? POUVEZ-VOUS NOUS PRÉSENTER LES ACTIONS QUE VOUS MENEZ EN CE SENS ? Au Niger, la question de l’accès des femmes aux droits à la santé


sexuelle et reproductive est en pleine évolution. Des progrès sont engagés parce qu’aujourd’hui les femmes et les jeunes filles affirment leurs droits à la santé sexuelle et reproductive


(DSSR). Le tabou sur des questions, comme la gestion des menstruations, est en train d’être levé. Nous avons un taux de prévalence contraceptive au-delà de 20 % et notre ambition est de le


voir doubler. Les femmes utilisent de plus en plus les méthodes contraceptives et ont accès aux services de santé et aux méthodes contraceptives en milieu urbain. Les communautés commencent


à prendre conscience de l’importance de parler de la santé sexuelle et reproductive (SSR), mais également du fait que l’accès à la santé sexuelle et reproductive est un droit fondamental


pour les femmes. Nous avons également une loi sur la santé de la reproduction, datée du 24 mai 2006 . Mais, malgré toutes ces avancées, les femmes et les filles n’ont pas un accès complet à


tous leurs droits en matière de santé sexuelle et reproductive. Par exemple, en ce qui concerne la planification familiale, le mari doit donner son approbation pour que la femme puisse


accéder à la planification familiale. Il arrive même souvent que le mari se présente au centre de santé avec sa femme pour choisir la méthode contraceptive et impose son avis. Du fait d’une


mauvaise interprétation, aujourd’hui, les femmes qui utilisent la contraception sont susceptibles d’être jugées par la société, qui imagine qu’elles veulent cesser les naissances ou qu’elles


ne veulent pas être mère alors que la planification familiale est tout simplement un espacement des naissances. Le droit au plaisir des femmes n’est pas reconnu totalement parce qu’il


existe encore des pratiques de mutilation génitale, même si elles sont de moins en moins fréquentes. L’enjeu est fort, parce qu’au Niger une femme sans enfant est stigmatisée par la société,


la norme étant que les femmes enfantent beaucoup. Dans le cadre de l’accès des femmes au droit à la santé sexuelle et reproductive, nous menons des activités de sensibilisation sur la


gestion de l’hygiène menstruelle et sur le développement et le fonctionnement reproductif de la femme, nous avons aussi mis en place des cercles d’influences où les femmes et les jeunes


filles se réunissent pour discuter de ces questions avec un ou une spécialiste de la santé qui leur donne les informations nécessaires en matière de santé sexuelle et reproductive. Nous


siégeons également à la coalition nationale des jeunes ambassadeurs sur la santé sexuelle et reproductive et travaillons avec d’autres structures, comme Lafia Matassa, sur les


sensibilisations des jeunes et des femmes en matière de santé sexuelle et reproductive. COMMENT EST-IL POSSIBLE SELON VOUS DE PROMOUVOIR L’ACCÈS DES FILLES ET DES FEMMES DANS VOTRE PAYS À UN


MEILLEUR SUIVI MÉDICAL EN TERMES DE SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ? QUELS SONT LES OBSTACLES RENCONTRÉS POUR SA MISE EN ŒUVRE ? Pour promouvoir l’accès des filles et des femmes du Niger à


un meilleur suivi médical en termes de santé sexuelle et reproductive, il faut faire comprendre aux femmes qu’elles ont des droits en matière de SSR, qu’elles ont la possibilité de jouir de


ces droits et, pour cela, il faut les sensibiliser à la santé sexuelle et reproductive. Il faudrait mettre en place les conditions nécessaires pour qu’elles puissent avoir accès à de


meilleurs services médicaux en la matière. Et cela passe forcément par la création des centres de santé qui prennent en charge les questions de santé sexuelle et reproductive et répondent


spécifiquement aux besoins des femmes, dans les villages les plus reculés. Il faut que toutes les femmes, où qu’elles soient, puissent avoir accès à ces services, afin de pouvoir les suivre.


En, effet, les longues distances qu’elles doivent parcourir pour être prises en charge dans les centres les dissuadent de revenir régulièrement, souvent, elles ne reviennent pas avant un an


ou deux après leur premier rendez-vous. Le personnel médical doit être formé pour pouvoir prendre en charge les femmes en toute confidentialité, sans jugement, et, surtout, il doit savoir


reconnaître leurs problèmes, les mettre à l’aise quand elles se présentent dans les services afin de répondre à leurs besoins en matière de santé sexuelle et reproductive. Dans la mise en


œuvre des projets et programmes pour promouvoir l’accès des femmes à la santé sexuelle et reproductive, il faut impliquer les maris, les hommes, les garçons, les leaders religieux et


coutumiers pour qu’ils puissent, eux aussi, porter ce message de droit en santé sexuelle et reproductive des femmes, afin d’amener toute la communauté à adopter un comportement favorable aux


droits à la santé sexuelle et reproductive des femmes et des jeunes filles. Cette implication permettra aux femmes d’aller librement dans les services de santé sans peur du jugement et de


jouir librement de ce droit fondamental. Le premier et plus grand obstacle que rencontrent les projets et programmes qui traitent de l’accès des femmes et jeunes filles à la santé sexuelle


et reproductive dans leur mise en œuvre est la mauvaise interprétation de la formule « santé sexuelle et reproductive ». Car, quand on parle de santé sexuelle et reproductive, les


communautés imaginent qu’il s’agit d’empêcher la femme d’accoucher ou d’arrêter les naissances, autant de préjugés alimentés par un système patriarcal. Parallèlement, il y a aussi le fait


que les femmes et les filles manquent d’informations sur la santé sexuelle et reproductive parce qu’elles habitent trop loin des centres de santé. Pour finir, il y a aussi le fait que les


jeunes filles sont généralement stigmatisées dans les centres de santé à cause de leur situation matrimoniale. QUELLES ACTIONS SERAIENT, SELON VOUS, PRIORITAIRES POUR QUE DAVANTAGE DE FILLES


ET DE FEMMES AIENT ACCÈS À DES STRUCTURES DE SOIN ET AUX INFORMATIONS LEUR PERMETTANT DE CONNAÎTRE LEURS DROITS, ET LUTTER AINSI CONTRE LES MARIAGES ET GROSSESSES CHEZ LES MINEURES, LES


MUTILATIONS GÉNITALES FÉMININES, LES VIOLENCES BASÉES SUR LE GENRE, ETC. QU’ELLES SUBISSENT ? Pour que davantage de filles et de femmes aient accès à des structures de soin et aux


informations leur permettant de connaître leurs droits et pour lutter contre les mariages et grossesses précoces, les mutilations génitales féminines et les violences basées sur le genre,


les actions concernent en premier lieu le cadre juridique. Il est urgent de mettre en place d’une loi spécifique pour lutter contre les violences basées sur le genre et veiller à sa


vulgarisation et à son application effective. Au-delà du cadre législatif, il faut aussi mettre en œuvre des politiques et programmes pour que les communautés prennent en compte le droit des


femmes à la santé sexuelle et reproductive. Ce qui permettrait un éveil de la conscience collective, car la femme doit être considérée comme un être humain à part entière avec des droits,


condition nécessaire à leur émancipation et à leur épanouissement au sein de la société. Il faut également mettre l’accent sur le leadership féminin en initiant les filles dès leur plus


jeune âge à prendre conscience de leur potentiel, à reconnaître leurs droits et exiger le respect. Au Niger, un décret porte sur la protection, le soutien et l’accompagnement de la jeune


fille dans sa scolarité, l’État s’engage ainsi à promouvoir l’éducation des jeunes filles. Malheureusement, la mise en application de ce décret n’est pas effective. C’est pourquoi il est


important de mobiliser et d’impliquer toutes les parties prenantes qui œuvrent dans le domaine de l’éducation afin de soutenir le gouvernement du Niger dans sa lutte pour la promotion de


l’éducation des filles. Il est aussi crucial d’amplifier le plaidoyer pour la lutte contre le mariage des enfants et les grossesses précoces auprès des acteurs intervenant dans le domaine,


des leaders communautaires et religieux, parce qu’ils sont la porte d’entrée pour toucher les communautés. Les actions de plaidoyer doivent concerner aussi les autorités nigériennes, les


élus nationaux parce que ce sont eux qui proposent et votent les lois. Il serait aussi préférable, pour avoir un impact plus important, que ces actions de plaidoyer soient portées par les


filles elles-mêmes, parce qu’elles sont plus légitimes à mener leurs revendications. Il faut responsabiliser les femmes en les impliquant dans les instances de décision pour qu’elles portent


les préoccupations qui concernent les femmes en matière de santé sexuelle et reproductive. Il faut aussi mettre en place des numéros verts qu’elles peuvent appeler gratuitement pour avoir


des informations sur la santé sexuelle et reproductive et aussi sur les violences basées sur le genre. Enfin, il faut privilégier les dialogues communautaires qui traitent des droits des


femmes et des violences basées sur le genre. L’ENGAGEMENT EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ FEMMES-HOMMES SE TRADUIT AUSSI PAR DES PROGRAMMES D’INFORMATION TOUCHANT AUSSI BIEN LES HOMMES QUE LES FEMMES


ET DES PROJETS DE SENSIBILISATION SUR LES DROITS DES FEMMES IMPLIQUANT LA PARTICIPATION DES HOMMES. QUELS TYPES DE PROGRAMMES FAUDRAIT-IL FINANCER ? L’engagement en faveur de l’égalité


femmes-hommes se traduit par des programmes d’information touchant aussi bien les hommes que les femmes et des projets de sensibilisation sur les droits des femmes impliquant la


participation des hommes. Pour cela, les types de programmes qu’il faut financer sont, entre autres, les projets qui prennent en compte l’aspect du genre et qui impliquent les leaders


communautaires, les leaders religieux, qui sont écoutés dans les communautés, car il est plus facile d’aborder une communauté, de la faire évoluer, quand on lie ces leaders à notre cause. Il


faut prendre en compte les programmes de sensibilisation qui mettent un accent particulier sur les jeunes garçons pour que les changements de comportements puissent voir le jour, parce que


tout commence par les plus jeunes et l’éducation. L’ÉCOLE A AUSSI UN RÔLE À JOUER DANS LA LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS EN RAISON DU GENRE, DE L’ORIENTATION SEXUELLE, ETC. ET EN FAVEUR DE


L’ÉDUCATION COMPLÈTE À LA SEXUALITÉ. QUELS PROGRAMMES SONT OU POURRAIENT ÊTRE DÉVELOPPÉS DANS CE SENS DANS VOTRE PAYS, ET SI CELA EXISTE Y A-T-IL DES COLLABORATIONS AVEC VOTRE PAYS AU


NIVEAU RÉGIONAL ? Actuellement, au Niger, l’éducation à la santé de la reproduction des adolescents et des jeunes est enseignée à l’école, elle est présente dans le curriculum de formation


des enseignements de SVT (science de la vie et de la terre) et d’économie familiale. Au début, on avait milité pour un cours d’éducation complète à la santé sexuelle, mais les communautés se


sont opposées à l’initiative. De ce fait, les autorités ont impliqué les leaders religieux dans les démarches du projet, ils ont réussi à contextualiser le sujet pour ne pas heurter la


sensibilité des uns et des autres. C’est pourquoi il devrait être possible de porter ces initiatives au niveau régional pour que chaque pays les intègre dans les programmes d’enseignement.


Il est également important de cibler les élèves et les écoles dans les programmes et les projets de sensibilisation de lutte contre les discriminations en milieu scolaire, en mettant


l’accent sur le vivre-ensemble et l’importance d’accepter les différences pour inclure tout le monde. QUELS ENGAGEMENTS CONCRETS ATTENDEZ-VOUS DU FORUM GÉNÉRATION ÉGALITÉ, NOTAMMENT SUR LA


PARTIE CONSACRÉE À LA PROMOTION DES DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS ? QUELS SONT LES MEILLEURS CANAUX DE FINANCEMENT DANS CE DOMAINE ? QUELLES ENCEINTES INTERNATIONALES VOUS APPARAISSENT


COMME LES PLUS EFFICACES POUR PROMOUVOIR LES DSSR ? Nous attendons du Forum génération égalité qu’il soit l’occasion de renforcer les engagements de la part de tous les acteurs qui


interviennent dans le domaine, qu’il soit également l’opportunité de mobiliser des financements pour mettre en œuvre des projets et des initiatives de façon décentralisée, c’est-à-dire des


actions au plus près des communautés. Nous souhaitons également que ce forum puisse permettre à l’État du Niger de mobiliser assez de bailleurs pour la mise à l’échelle des bonnes pratiques


que nous avons développées au Niger. Les meilleurs canaux de financement dans le domaine de la santé sexuelle et reproductive passent par le financement au niveau local, c’est-à-dire les


organisations de la société civile au niveau local, surtout les organisations dirigées par les jeunes et les femmes. Parmi les enceintes internationales qui sont les plus efficaces pour


promouvoir les droits à la santé sexuelle et reproductive, il y a le partenariat de Ouagadougou sur la DSSR, la société civile en faveur de la planification familiale, la Conférence


internationale sur la planification, le comité de haut niveau en faveur de l’éducation complète à la sexualité de l’Unesco en Afrique de l’Ouest et du Centre. République démocratique du


Congo, Jean-Claude Mulunda JEAN CLAUDE MULUNDA , directeur d’IPAS pour la République démocratique du Congo. IPAS est une organisation non gouvernementale internationale qui travaille à


l’échelle mondiale pour élargir l’accès à l’avortement et à la contraception. COMMENT PEUT-ON DÉCRIRE, DANS VOTRE PAYS, LA SITUATION DE L’ACCÈS DES FEMMES AU DROIT À LA SANTÉ SEXUELLE ET


REPRODUCTIVE ? POUVEZ-VOUS NOUS PRÉSENTER LES ACTIONS QUE VOUS MENEZ EN CE SENS ? La situation concernant l’accès aux droits à la santé sexuelle et reproductive (DSSR) en République


démocratique du Congo reste complexe et confuse. En effet, les lois sur les DSSR, dont celles relatives à la contraception, à l’avortement sécurisé, à la prévention et à la prise en charge


des violences sexuelles et basées sur le genre se contredisent au lieu de se compléter. Dans le même temps, le pays fait face à une guerre dans sa partie Est (Nord et Sud Kivu) qui n’en


finit pas et qui s’est même étendue au centre du pays (phénomène Kamuina Nsapu au Kasai). De plus, une des stratégies utilisées par le groupe armé est la violence sexuelle, basée sur le


genre. Il y a quelques années, la République démocratique du Congo a même été qualifiée de « capitale mondiale du viol ». Le système sanitaire est très fragile, avec très peu d’affectation


budgétaire au niveau national, dépendant ainsi, en majeure partie, des apports extérieurs, eux aussi sujets à des restrictions diplomatiques, sécuritaires ou sanitaires (comme en témoignent


la crise liée à la Covid-19 et les épidémies à répétition, dont celles d’Ebola). LE CONTEXTE DE LA SANTÉ PUBLIQUE _ _ La situation de la santé de la mère demeure préoccupante au regard des


ratios de mortalité maternelle (693 femmes pour 100 000 naissances vivantes ). Cette situation est en partie le résultat de la prévalence élevée des grossesses à risque due à la faible


utilisation des services de planification familiale (7,8 % de femmes en union utilisent les méthodes contraceptives modernes ). Les violences sexuelles et basées sur le genre, l’inceste, le


mariage précoce et forcé, le faible accès à l’information de qualité, particulièrement pour les jeunes, la faible considération des droits dans les services de santé de la reproduction, qui


ne garantit pas le choix aux femmes et aux jeunes filles, les us et coutumes, la religion, le faible pouvoir de décision pour les femmes, y compris sur leur corps et leur santé sont autant


de freins au plein accès aux DSSR. Malgré la tendance vers une amélioration, avec 18 % de la prévalence contraceptive , les besoins non satisfaits en planification familiale et en


contraception restent élevés. Ceci explique le besoin pour le plus grand nombre de femmes à recourir à l’avortement. L’inexistence des soins sécurisés conduit malheureusement toutes ces


femmes à recourir à des soins non sécurisés, à l’avortement à risque, avec toutes les conséquences immédiates et tardives que l’on peut imaginer sur le bien-être de la femme, sa vie et ses


droits. L’avortement clandestin non sécurisé représente la deuxième cause de mortalité maternelle dans le pays. Une étude de 2016 réalisée par l’École de santé publique de Kinshasa en


collaboration avec l’institut Guttmacher sur l’incidence des avortements provoqués à Kinshasa a montré que deux grossesses sur cinq se sont terminées par un avortement dans la capitale


congolaise avec une moyenne de 146 700 avortements par an, soit 400 avortements par jour et 17 par heure. La même source indique que le pourcentage de grossesses non désirées qui se


terminent par un avortement est estimé à 43 % et que près de deux tiers de ces femmes ayant subi un avortement dans les conditions non sécurisées ont souffert des complications allant de


modérées à graves. LE CONTEXTE LÉGAL Le Code pénal congolais criminalise la contraception (articles 165 et 166) et l’avortement en même temps (article 178) : toute promotion de la


contraception, publicité, vente des produits contraceptifs ou offre des services dans les hôpitaux ou dans la communauté y est prohibée. L’accès à l’avortement sécurisé n’est pas autorisé


non plus, même pas pour les cas de risques vitaux mettant en danger la santé ou la vie de la mère et/ou du fœtus. Le viol est considéré comme un acte d’attentat aux mœurs et non un crime


indescriptible. Aucun droit n’est reconnu à la femme, pas même celui d’avoir accès à l’information de qualité afin d’opérer des choix éclairés. Le Code de déontologie médicale ne reconnaît


pas non plus le droit pour les femmes et les jeunes filles à recourir à l’avortement sécurisé. À la différence du Code pénal, le Code de déontologie médicale reconnaît aux femmes le droit


d’accès à l’avortement sécurisé pour des cas de risques d’atteinte à la santé physique de la mère ou en cas de malformation fœtale incompatible avec la vie. Mais, même dans ces cas, il faut


une évaluation préalable de trois médecins différents et une autorisation d’un officier de l’état civil. Ce qui rend le processus long et ne permet pas souvent aux femmes de bénéficier de


cette exception. Certaines femmes obtiennent les différents documents exigés alors que la période d’interruption de grossesse est déjà passée. Elles ont alors souvent recours à la


clandestinité et aux soins non sécurisés. La nouvelle loi sur la santé publique publiée en 2018, quelques mois après la publication du Protocole de Maputo au _ Journal officiel_ , faisant de


ce dernier une loi immédiatement applicable, n’a pas intégré les indications de ce protocole, énoncées en son article 14. La loi sur la santé publique a repris les restrictions


controversées du Code pénal sur l’accès à l’avortement et ne laisse aucun choix à la femme à part celui de recourir à la contraception. Le Protocole de Maputo, c’est-à-dire le « Protocole à


la charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes », a été, dès sa ratification par le pays, une chance unique pour les femmes et les jeunes filles


congolaises d’avoir accès à leurs droits de santé sexuelle et reproductive, y compris la possibilité d’avoir accès à l’avortement sécurisé. Malheureusement, il a fallu attendre près de dix


ans avant que le protocole ne soit mis en œuvre. _ _ En effet, conformément à la loi congolaise, le Protocole de Maputo devait d’abord être publié au _ Journal officiel._ D’où le plaidoyer


engagé par les organisations internationales et nationales entre 2008 (année de ratification) et 2018 (année de publication au _ Journal officiel_ ) pour obtenir sa publication, qui a marqué


la suprématie de cette loi sur les lois internes de la République démocratique du Congo conformément à la Constitution de la République démocratique du Congo (article 215). Le Protocole de


Maputo a le mérite d’élargir les choix de la femme en autorisant l’avortement sécurisé en cas de viol, en cas d’inceste, ou de problèmes de santé mentale ou de santé physique de la mère et


ou de malformation fœtale incompatible avec la vie. Comme dit précédemment, le Protocole de Maputo appliqué immédiatement après sa publication au _ Journal officiel_ fait de lui une loi


au-dessus des lois locales. _ En pratique : Applications des lois_ Au niveau judiciaire, l’application des lois, dont le Code pénal, le Code de déontologie médicale, la loi sur la santé


publique et le Protocole de Maputo dépend : – du niveau de connaissances dont dispose le juge et, bien entendu, du Code pénal et du Code de déontologie médicale, qui, par leur ancienneté,


sont les plus connus et les plus appliqués, condamnant ainsi par défaut les femmes, les jeunes filles et les prestataires cliniques, ainsi que les agents de santé communautaires impliqués


dans la recherche des soins (clients), l’orientation (agents communautaires) et l’offre des soins d’avortement sécurisé dans le cadre de l’application du Protocole de Maputo dans le pays ; –


de la réticence face à l’avortement. En effet, des juges, connaissant l’existence du Protocole de Maputo, préfèrent l’ignorer et prononcent leur jugement en se référant uniquement aux lois


restrictives, dont le Code pénal, le Code de déontologie médicale et la loi sur la santé publique. Ceci à cause des pesanteurs sociales et de la stigmatisation contre les droits de santé


sexuelle et reproductive, notamment l’avortement sécurisé ; – de la faible connaissance des nouveaux textes légaux par les avocats censés défendre les clientes. Au niveau du système de


santé, grâce au plaidoyer conduit par les organisations nationales et internationales en faveur de la mise en application du Protocole de Maputo, le ministère de la Santé a élaboré et validé


les normes et directives des soins complets d’avortement qui constituent une étape importante vers l’accès à l’avortement sécurisé suivant les indications du Protocole de Maputo. Les normes


et directives qui sont, dans leur contenu, les plus progressistes possible, offrant à la femme plus de choix et de pouvoir, indiquent qui, quand, où et comment les soins d’avortement


sécurisé peuvent être offerts en République démocratique du Congo. Si ces normes sont prêtes pour être utilisées afin de répondre aux besoins des femmes et des jeunes filles en matière


d’avortement, quelques préalables sont à considérer et constituent des points d’actions sur lesquels nous travaillons avec les différentes parties prenantes, à savoir : – la dissémination de


ces normes et directives au sein du système de santé, touchant à la fois les gestionnaires et les prestataires cliniques des soins dans le secteur public et dans le privé. Cette étape est


importante, car elle permet aux prestataires cliniques disponibles de proposer des soins d’avortement sécurisés suivant les méthodes et les technologies reconnues par l’Organisation mondiale


de la santé (OMS). Ceci réduit aussi le recours à des méthodes déclarées obsolètes, comme le curetage ; – la formation des prestataires cliniques aux nouvelles normes qui nécessitent le


développement préalable des outils de formation. Les prestataires ont été jusqu’ici formés pour apporter les soins après l’avortement, donc la prise en charge des complications après


avortement non sécurisé, et ce en usant de méthodes obsolètes. D’où la nécessité de les former sur l’utilisation des nouvelles méthodes incluant l’avortement médicamenteux ; – la


disponibilité des commodités d’avortement qui est aussi un gros défi pour l’accès aux soins dans le pays, non seulement d’avortement, mais de tous les autres soins de santé de base ; – la


lutte contre la stigmatisation au sein des formations sanitaires, particulièrement pour les jeunes et les personnes vivant avec un handicap, personnes qui sont considérées comme ne devant


pas avoir de rapports sexuels suivant les normes sociales. Au niveau communautaire, le plus important est l’acceptation de l’acte d’avortement, la reconnaissance des droits de la femme à


recourir à l’avortement quand elle le souhaite, ainsi que le référencement communautaire pour les soins de qualité et l’appui psychosocial aux clients et aux prestataires cliniques .


Plusieurs actions en cours doivent être renforcées : – la vulgarisation du Protocole de Maputo ; – la clarification des valeurs et transformation des attitudes face à l’avortement,


particulièrement pour les leaders communautaires ; – la communication pour la transformation des normes sociales ; – la promotion des droits de la femme et des droits de santé sexuelle et


reproductive ; – le dialogue sur les droits sexuels et reproductifs incluant les religieux ; – le dialogue intergénérationnel impliquant les jeunes pour la prise en compte de leurs besoins.


COMMENT EST-IL POSSIBLE SELON VOUS DE PROMOUVOIR L’ACCÈS DES FILLES ET DES FEMMES DANS VOTRE PAYS À UN MEILLEUR SUIVI MÉDICAL EN TERMES DE SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ? QUELS SONT LES


OBSTACLES RENCONTRÉS POUR SA MISE EN ŒUVRE ? Au-delà de la loi qui restreint l’accès des femmes et des jeunes filles à leur DSSR dans le pays, on relève d’autres obstacles. Premièrement, la


faible connaissance des femmes et des filles de leurs droits, particulièrement ceux relatifs à la santé et aux DSSR. Ceci est dû au fait que tout ce qui concerne le sexe et la reproduction


est un tabou. Les jeunes filles n’ont pas accès aux informations sur les différentes transformations que subit leur corps et ce à quoi ceci les expose, entre autres, à la prédation des


adultes véreux, elles ne sont pas non plus informées sur leurs menstruations et la manière de les gérer. Deuxièmement, les us et coutumes ne promeuvent pas les droits de la femme en général,


et les DSSR en particulier. Ceci explique l’accroissement des cas de violences sexuelles et basées sur le genre, les mariages forcés et précoces, ainsi que l’inceste. Il faut noter aussi


l’influence de la religion et des religieux sur la vie sociale et politique. Le système religieux conservateur maintient et accroît son influence sur les politiques et les autres leaders


communautaires, ce qui retarde la mise en place des politiques qui favorisent la promotion des DSSR. Enfin, le faible engagement communautaire en faveur des droits de la femme en général,


des DSSR en particulier, prive la femme et la jeune fille victimes des abus (mariage forcé, viol, avortement clandestin…) du soutien social, gage de sa réinsertion au niveau de sa communauté


et de son autonomisation. QUELLES ACTIONS SERAIENT, SELON VOUS, PRIORITAIRES POUR QUE DAVANTAGE DE FILLES ET DE FEMMES AIENT ACCÈS À DES STRUCTURES DE SOIN ET AUX INFORMATIONS LEUR


PERMETTANT DE CONNAÎTRE LEURS DROITS ET LUTTER AINSI CONTRE LES MARIAGES ET GROSSESSES CHEZ LES MINEURES, LES MUTILATIONS GÉNITALES FÉMININES, LES VIOLENCES BASÉES SUR LE GENRE, ETC.


QU’ELLES SUBISSENT ? Les actions prioritaires en République démocratique du Congo devraient être, à mon sens : – la mise en place des stratégies de plaidoyer pour l’amélioration du cadre


légal, entre autres, l’application des pactes et protocoles internationaux, comme le Protocole de Maputo, le Comité pour l’élimination des discriminations à l’égard des femmes (CEDEF), ainsi


que leur harmonisation avec les lois locales à travers la mise à jour de ces dernières ; – le renforcement de l’appropriation nationale du processus de promotion et de protection des droits


de la femme et des DSSR à travers l’implication des leaders communautaires et religieux, dont les capacités doivent être au préalable renforcées et les valeurs clarifiées ; – le


renforcement de la cohésion communautaire autour des DSSR à travers la mise en place de dialogues entre leaders et communautés et la mise en place de dialogues intergénérationnels. Ceci


permet de mettre l’accent sur les récentes évolutions (de valeurs, de technologies…) et d’adapter les lois et les considérations sociales ; – le développement des stratégies de communication


et de sensibilisation visant les femmes et les jeunes filles afin qu’elles puissent connaître leurs droits, les revendiquer et en jouir ; – le renforcement du pouvoir et de l’autonomie de


la femme à travers la promotion des soins auto-gérés d’avortement et de contraception, la redevabilité du système de santé et de la communauté ; – l’intégration des DSSR dans tous les


programmes de promotion du genre. L’ENGAGEMENT EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ FEMMES-HOMMES SE TRADUIT AUSSI PAR DES PROGRAMMES D’INFORMATION TOUCHANT AUSSI BIEN LES HOMMES QUE LES FEMMES ET DES


PROJETS DE SENSIBILISATION SUR LES DROITS DES FEMMES IMPLIQUANT LA PARTICIPATION DES HOMMES. QUELS TYPES DE PROGRAMMES FAUDRAIT-IL FINANCER ? Il faudrait financer des programmes qui


favorisent la participation des hommes, dont ceux relatifs à la masculinité positive et à la promotion du genre. La violence, le manque d’empathie dont font montre les hommes sont les fruits


de la masculinité toxique. Ces stéréotypes sont l’héritage transmis de génération en génération ignorant les conséquences néfastes sur le bien-être de la femme, son autonomie et la


contribution au développement du pays. Il faut favoriser les programmes intégrés, ceux qui traitent des DSSR dans leur ensemble comme faisant partie des droits humains, sans en exclure


aucun. L’ÉCOLE A AUSSI UN RÔLE À JOUER DANS LA LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS EN RAISON DU GENRE, DE L’ORIENTATION SEXUELLE, ETC. ET EN FAVEUR DE L’ÉDUCATION COMPLÈTE À LA SEXUALITÉ. QUELS


PROGRAMMES SONT OU POURRAIENT ÊTRE DÉVELOPPÉS DANS CE SENS DANS VOTRE PAYS, ET SI CELA EXISTE Y A-T-IL DES COLLABORATIONS AU NIVEAU RÉGIONAL ? L’école joue un rôle important dans


l’éducation des jeunes. En République démocratique du Congo, il y a lieu de plaider en faveur de la mise à jour du cours d’éducation à la vie afin d’intégrer les notions du genre,


d’éducation sexuelle complète, des DSSR en général. L’actuel cours d’éducation à la vie renforce la masculinité toxique et ne donne pas des informations complètes aux jeunes. Il n’offre en


l’état ni choix ni autonomie, au contraire, il crée un décalage entre ce que les jeunes apprennent à l’école et la réalité que ces derniers vivent au quotidien. QUELS ENGAGEMENTS CONCRETS


ATTENDEZ-VOUS DU FORUM GÉNÉRATION ÉGALITÉ, NOTAMMENT SUR LA PARTIE CONSACRÉE À LA PROMOTION DES DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS ? QUELS SONT LES MEILLEURS CANAUX DE FINANCEMENT DANS CE


DOMAINE ? QUELLES ENCEINTES INTERNATIONALES VOUS APPARAISSENT COMME LES PLUS EFFICACES POUR PROMOUVOIR LES DSSR ? Le contexte de l’Afrique subsaharienne en général, celui de la République


démocratique du Congo en particulier, montre qu’il faut passer par les instruments juridiques internationaux pour favoriser la promotion des DSSR dans les pays du Sud. Dans ce cas, il faut


harmoniser les lois nationales afin de les adapter aux engagements internationaux du pays. Ceci nécessite un plaidoyer au plus haut niveau à travers les missions diplomatiques, l’aide au


développement, la coopération bilatérale et multilatérale. Pour ce qui est des canaux de financement, il est préférable d’accroître les financements aux organisations locales pour lesquelles


les organisations internationales apportent appui technique et renforcement des capacités. Il faut donc alléger les conditions de financement des organisations locales particulièrement, les


organisations féministes et les coalitions qui militent pour les DSSR, encourager les projets qui renforcent l’appropriation nationale à travers la participation communautaire et, enfin,


favoriser les programmes qui intègrent les DSSR. Sénégal, Fatou Ndiaye Turpin FATOU NDIAYE TURPIN est championne de la Planification familiale et directrice exécutive du Réseau Siggil Jigéen


(RSJ). Le Réseau Siggil Jigéen est une ONG engagée pour l’amélioration du statut de la femme, ainsi que pour la promotion et la protection des droits des femmes au Sénégal. COMMENT PEUT-ON


DÉCRIRE, DANS VOTRE PAYS, LA SITUATION DE L’ACCÈS DES FEMMES AU DROIT À LA SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ? POUVEZ-VOUS NOUS PRÉSENTER LES ACTIONS QUE VOUS MENEZ EN CE SENS ? En dépit des


efforts concertés du gouvernement, des ONG et de la communauté internationale, le taux de mortalité maternelle demeure trop élevé au Sénégal, avec plus de 236 femmes pour 100 000 naissances


vivantes selon les estimations du Système des Nations unies (SNU) en 2017 . Le taux élevé de mortalité maternelle peut être imputé non seulement à l’insuffisance des infrastructures de soins


sanitaires, mais aussi aux forces sociales et culturelles qui privent la femme du droit à la santé tout au long de son cycle de vie. Le mariage et les grossesses précoces, les mutilations


génitales féminines/l’excision (MGF/E) et le fait que la maternité soit considérée comme un devoir pour la femme sont des facteurs contribuant à un taux élevé de la mortalité maternelle. Le


gouvernement du Sénégal doit prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir aux femmes leur droit à une maternité sans risque. L’avortement provoqué est illicite et puni d’une peine


d’emprisonnement et d’une amende. L’avortement thérapeutique est autorisé par le Code de déontologie médicale, mais n’est pas explicitement reconnu par le Code pénal. Le Sénégal a conservé


ces lois répressives en dépit de l’augmentation des avortements provoqués pratiqués de manière clandestine, alors que ces derniers contribuent au taux élevé de la mortalité maternelle,


particulièrement chez les adolescentes. Il est important que le gouvernement du Sénégal adopte une loi moins restrictive concernant l’avortement. Pour la fécondité des adolescentes, les


grossesses précoces sont généralement associées à des risques élevés de décès, que ce soit chez les mères ou chez les nouveau-nés. Les conséquences sociales de la grossesse chez les


adolescentes peuvent aussi être graves, car elles peuvent compromettre leur scolarité et, par conséquent, leur développement personnel et leur indépendance. Pour ces raisons, l’indice de


leur fécondité occupe une place importante dans l’élaboration des politiques et la mise en œuvre des stratégies et des programmes de la santé de la reproduction. On constate que 14 % des


adolescentes – de dix à dix-sept ans au Sénégal – ont déjà commencé leur vie procréative  : 10 % d’entre elles ont eu au moins un enfant et 4 % sont enceintes du premier enfant. La


proportion d’adolescentes ayant déjà commencé leur vie féconde augmente rapidement avec l’âge, passant de 1 % à quinze ans à 33 % à dix-neuf ans, âge auquel 26 % des jeunes filles ont déjà


eu au moins un enfant. Cette proportion de jeunes filles ayant déjà commencé leur vie procréative est nettement plus élevée en milieu rural (18 %) qu’en milieu urbain (9 %) et nettement plus


faible dans la région Ouest que dans les autres (8 % contre un maximum de 20 % dans la région Sud). La précocité de la fécondité varie fortement avec le niveau d’instruction, en effet, 25 %


des jeunes filles sans niveau d’instruction ont déjà commencé leur vie procréative tandis que 17 % parmi elles ont atteint le niveau primaire et elles sont 7 % parmi les plus instruites.


Par ailleurs, les jeunes filles sénégalaises vivent des inégalités et des discriminations, à la fois parce qu’elles sont femmes, mais aussi parce qu’elles sont jeunes. Cela les rend


particulièrement vulnérables face aux réalités sociales, qui laissent peu d’espace d’expression à leurs besoins. Des attentes spécifiques pèsent sur la sexualité de ces dernières, la


tradition est soucieuse de la préservation de la virginité, et donc de la non- procréation, jusqu’au mariage. Le taux de prévalence contraceptive au Sénégal se situe à 26 %, contre 10 % en


2010–2011 . Le Réseau Siggil Jigéen a développé plusieurs programmes pour mobiliser de ressources domestiques auprès des collectivités territoriales pour le financement de la planification


familiale. Nous avons ainsi obtenu 107 millions de francs CFA de contribution des maires comme engagement sur le financement direct de la planification familiale. Le Réseau Siggil Jigéen a


également obtenu le recrutement de plus de 1 000 femmes en âge de reproduction (FAR) pour jouer un rôle dans la planification familiale au niveau des communes engagées et la signature des


protocoles avec les mutuelles de santé pour appuyer la planification familiale post-partum jusqu’à 2019 dans leur localité. Le Réseau Siggil Jigéen a également mis en place le plaidoyer pour


l’augmentation du budget destiné à l’achat des contraceptifs, afin que le budget soit arrêté à la somme de 300 millions francs CFA contre 200 millions en 2016. L’association a aussi


développé de nombreuses autres activités. Dans le cadre de la campagne Deliver for GOOD, elle a mis en place un comité directeur et un comité du Conseil qui a regroupé sept ministères, en


plus du secrétaire d’État auprès du Garde des Sceaux : le ministère de la Santé et de l’Action sociale, le ministère de l’Éducation nationale, le ministère du Pétrole et des Énergies, le


ministère de la Femme, de la Famille, du Genre et de la Protection de l’enfant, le ministère de la Culture et de la Communication et le ministère de la Justice. Ainsi, la ministre de la


Famille, de la Femme, du Genre et de la Protection de l’Enfant s’était engagée à appuyer la campagne Deliver for Good Sénégal, cette campagne mondiale de plaidoyer qui milite pour mettre les


femmes et les filles au centre de la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD). Aussi, le Réseau Siggil Jigéen a aidé au renforcement des capacités des membres et alliés de


la coalition Deliver For Good à travers son programme « Enjeux des ressources énergétiques propres et fossiles : impacts et opportunités pour les femmes et les filles au Sénégal », qui


permet de mobiliser les ressources issues du pétrole pour financer les gaps en matière de santé et d’éducation. L’association a, en outre, produit un rapport final de la revue documentaire


portant sur l’accès à l’information des jeunes sur la santé de la reproduction des adolescents et des jeunes (SRAJ) dans les lycées et les collèges des communes de Mbao, Keur Massar et


Rufisque. L’association a également validé le prérapport de la revue documentaire pour la réactualisation de l’étude menée en 2017 sur la relecture du cadre stratégique national PF (Plan


additionnel PF des jeunes). À cet effet, il a recruté deux consultants experts certifiés pour mener une étude sur le pétrole et le gaz. Enfin, l’association a veillé à ce que les candidats à


présidentielle intègrent les objectifs de développement durable ODD3 , ODD4 et ODD7 dans leur programme. COMMENT EST-IL POSSIBLE SELON VOUS DE PROMOUVOIR L’ACCÈS DES FILLES ET DES FEMMES


DANS VOTRE PAYS À UN MEILLEUR SUIVI MÉDICAL EN TERMES DE SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ? QUELS SONT LES OBSTACLES RENCONTRÉS POUR SA MISE EN ŒUVRE ? L’accès aux services de santé sexuelle


et reproductive pour les filles et les femmes nécessite beaucoup d’innovations et de synergies de la part de toutes les parties prenantes pour une gestion multisectorielle efficace de la


santé sexuelle et reproductive. Le but est de mettre en place une dynamique socio-sanitaire permettant une réflexion des acteurs quant à leurs raisons d’agir, de fonder des dialogues et


ainsi travailler sur les rapports de genre et accompagner de façon cohérente les difficultés des adolescentes et des adolescents et des jeunes et des femmes et des hommes. Il faut également


renforcer le maillage entre les acteurs qui travaillent dans le domaine de la santé de la reproduction des adolescentes et des adolescents et des jeunes et ainsi créer de meilleures


synergies entre le ministère de l’Éducation, de la Jeunesse, des Femmes et de la Santé, tant au niveau politique qu’au niveau opérationnel. Le Réseau Siggil Jigéen et d’autres organisations


de la société civile y travaillent. Il y a toutefois des obstacles qui rendent difficile l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive aux filles et aux femmes. L’un des premiers


obstacles demeure l’environnement des politiques de santé, notamment la loi sur la santé de la reproduction (loi n°2005–18 du 5 août 2005) qui ne dispose d’aucun décret d’application. Il


n’existe aucune restriction légale à l’accès des jeunes à la contraception et à d’autres services de santé élémentaires, tels que les tests de grossesse et des IST, sauf la nécessité d’avoir


au moins quinze ans pour consentir au test du VIH. Le Code pénal du Sénégal indique que l’avortement provoqué n’est pas légal, même pour sauver la vie d’une femme, et impose de lourdes


peines de prison et des amendes. Beaucoup de jeunes femmes recourent cependant à l’avortement clandestin qui peut, souvent, compromettre leur santé. La question de l’inégalité de genre et


des normes sociales, ainsi que le manque d’informations constituent les obstacles majeurs entravant l’accès des femmes aux services de santé sexuelle et reproductive. QUELLES ACTIONS


SERAIENT, SELON VOUS, PRIORITAIRES POUR QUE DAVANTAGE DE FILLES ET DE FEMMES AIENT ACCÈS À DES STRUCTURES DE SOIN ET AUX INFORMATIONS LEUR PERMETTANT DE CONNAÎTRE LEURS DROITS ET LUTTER


AINSI CONTRE LES MARIAGES ET GROSSESSES CHEZ LES MINEURES, LES MUTILATIONS GÉNITALES FÉMININES, LES VIOLENCES BASÉES SUR LE GENRE, ETC. QU’ELLES SUBISSENT ? Il faut développer les actions de


sensibilisation au niveau de la population en les aidant à déconstruire certaines croyances et idées reçues. Il faut aussi continuer de renforcer le plaidoyer au niveau du gouvernement pour


obtenir la signature du décret d’application de la loi SR et la mise en application des textes contre les mariages forcés et les MGF. Il faut également que l’État facilite l’accès aux


mutuelles en réduisant les coûts et en y intégrant les services de planification familiale. Il faut aussi continuer le plaidoyer pour la mobilisation des ressources auprès des collectivités


territoriales, étant donné que ces dernières peuvent contribuer au relèvement du taux de prévalence contraceptive du pays en acceptant de financer la santé sexuelle et reproductive et la


planification familiale. Dans les actions de sensibilisation, il faut s’allier avec les religieux et les chefs traditionnels et coutumiers, mais également impliquer les hommes. De manière


générale, les priorités peuvent être listées ainsi : AU NIVEAU DES JEUNES, IL FAUDRAIT : – les impliquer à toutes les étapes d’élaboration, de mise en œuvre et de suivi des plans et


stratégies les concernant ; – prendre en compte les jeunes et les adolescentes et adolescents déscolarisés et non scolarisés dans les activités de proximité sur les droits et santé sexuel et


reproductifs (DSSR) ; – mobiliser les jeunes filles, y compris les jeunes filles mariées (cible prioritaire) ; AN NIVEAU DES COMMUNAUTÉS ET DES LEADERS D’OPINION, IL FAUDRAIT : – poursuivre


et renforcer les expériences de mobilisation sociale à travers notamment les campagnes multicanaux innovantes ; – mobiliser les leaders religieux et coutumiers en faveur de la planification


familiale pour impulser le changement des normes sociales ; – renforcer les espaces de dialogue sur les questions de population et développement en y intégrant les groupes religieux


influents ; – renforcer les mécanismes d’identification et référencement des cas de mariages d’enfants au niveau communautaire. AU NIVEAU POLITIQUE, IL FAUDRAIT : – réviser les instruments


législatifs qui limitent la réalisation des DSSR des adolescentes et des adolescents et des jeunes ; – rendre opérationnels les engagements pris en faveur des adolescentes et des adolescents


et des jeunes dans le plan planification et lors du sommet Family Planning 2020 de Londres ; – institutionnaliser le renforcement et le passage à l’échelle des approches à base


communautaire pour l’offre de services DSSR/PF ; – soutenir les programmes relatifs à l’éducation complète à la sexualité adaptés et respectueux de nos valeurs ; – soutenir la


décentralisation des politiques et programmes de DSSR/PF au niveau des collectivités locales. AU NIVEAU DES STRUCTURES DE SANTÉ, IL FAUDRAIT  : – mettre en œuvre au niveau de tout type de


structure sanitaire une offre complète et intégrée de services DDSR/PF/VIH adaptée aux adolescentes et des adolescents et aux jeunes ; – rendre les centres de santé publics et privés


conviviaux et adaptés aux adolescentes et aux adolescents et aux jeunes ; – former une masse critique de personnels de santé en DSSR, en approche genre et en approche jeune, les soutenir et


assurer leur supervision formative ; – poursuivre et renforcer les expériences d’offre de DSSR/PF à base communautaire pour mieux atteindre les jeunes. AU NIVEAU SCOLAIRE, IL FAUDRAIT : –


poursuivre l’intégration des modules d’éducation complète respectueux de nos valeurs à la SR dans le système éducatif comme prévu dans le plan stratégique de santé sexuelle et de la


reproduction des adolescentes et des adolescents et des jeunes ; – renforcer les capacités des enseignants en matière de DSSR. AU NIVEAU MÉDIATIQUE, IL FAUDRAIT : – développer des campagnes


de mobilisation sociale et politique multicanal, avec un accent particulier sur les réseaux sociaux ; – utiliser la série _ C’est la vie !_ comme outil support de campagnes de communication


multicanal (radio, spots radio et TV, talk-shows, caravanes de sensibilisation, projections débats…). L’ENGAGEMENT EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ FEMMES-HOMMES SE TRADUIT AUSSI PAR DES PROGRAMMES


D’INFORMATION TOUCHANT AUSSI BIEN LES HOMMES QUE LES FEMMES ET DES PROJETS DE SENSIBILISATION SUR LES DROITS DES FEMMES IMPLIQUANT LA PARTICIPATION DES HOMMES. QUELS TYPES DE PROGRAMMES


FAUDRAIT-IL FINANCER ? Les programmes des organisations de la société civile devraient sensiblement être orientés sur les points suivants : – élargissement de l’offre de santé sexuelle et


reproductive grâce à des stratégies innovantes et adaptées au contexte et au public et améliorer la qualité à travers le renforcement de compétences et la mobilisation communautaire ; –


amélioration des connaissances et aptitudes des adolescentes et des adolescents et des jeunes en matière de droits et santé sexuels et reproductifs dans une optique de diminution des


inégalités de genre, des discriminations et des violences et dans une perspective d’autonomisation ; – renforcement d’un environnement social et légal favorable à travers des actions de


sensibilisation, de plaidoyer auprès des acteurs clés (chefs religieux et coutumiers, famille) et la production de connaissances nécessaires au dialogue politique. En d’autres termes, il


faut renforcer les programmes qui visent l’égalité femmes-hommes qui appellent à travailler en consortium. Les domaines de la santé, de l’entreprenariat, de l’éducation et de l’agriculture


sont des domaines pertinents. Il faut aussi financer les programmes d’envergure visant le changement social de comportement pour amener les populations à davantage comprendre la notion


d’égalité, de genre, d’équité. Le plaidoyer mené au niveau des décideurs politiques pour l’adoption d’une réglementation favorable à l’épanouissement des femmes et des jeunes filles mérite


d’être davantage renforcé en termes de financement. L’ÉCOLE A AUSSI UN RÔLE À JOUER DANS LA LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS EN RAISON DU GENRE, DE L’ORIENTATION SEXUELLE, ETC. ET EN FAVEUR


DE L’ÉDUCATION COMPLÈTE À LA SEXUALITÉ. QUELS PROGRAMMES SONT OU POURRAIENT ÊTRE DÉVELOPPÉS DANS CE SENS DANS VOTRE PAYS, ET SI CELA EXISTE Y A-T-IL DES COLLABORATIONS AU NIVEAU RÉGIONAL ?


Nous nous sommes engagés dans le plaidoyer au niveau régional, au niveau de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) avec la proposition d’un acte juridique


actionnel pour que l’égalité femme-homme soit effectif dans cet espace. Aujourd’hui, l’effectivité de la mise en œuvre de cet instrument juridique pourrait grandement contribuer à renforcer


le plaidoyer pour l’intégration de ce curriculum dans les programmes scolaires. En effet, en Afrique de l’Ouest, on remarque une évolution, notamment la participation des femmes à la vie


publique et la volonté politique affichée par les États. Cependant, beaucoup de lenteurs, de difficultés d’harmonisation et d’insuffisance d’application des instruments juridiques sont


perceptibles. Cette situation est due essentiellement à l’absence de textes spécifiques à la sous-région, rendant difficile une synergie d’action entre les États et un suivi efficace. Ce qui


a conduit les réseaux de femmes, les organisations de lutte pour les droits humains et leurs partenaires techniques et financiers à engager un mouvement dont l’objectif était l’adoption par


les États membres de la CEDEAO d’un protocole pour promouvoir les droits des femmes dans cet espace, à l’image de celui de la SACD (Communauté de développement de l’Afrique australe).


Ainsi, au terme d’un processus de plaidoyer soutenu en direction des États de l’Afrique de l’Ouest pour l’adoption d’un protocole proposé par des organisations de femmes et de droits humains


de treize pays, dont le Burkina Faso, la Guinée Conakry, le Mali, le Niger et le Sénégal, les États membres de la CEDEAO ont adopté un instrument juridique très important pour les peuples.


En effet, le 47 e sommet des chefs d’États et de gouvernements de la CEDEAO, tenu le 19 mai 2015 à Accra au Ghana, a adopté l’acte additionnel sur l’égalité des droits entre les femmes et


les hommes qui n’a pas été assez vulgarisé. QUELS ENGAGEMENTS CONCRETS ATTENDEZ-VOUS DU FORUM GÉNÉRATION ÉGALITÉ, NOTAMMENT SUR LA PARTIE CONSACRÉE À LA PROMOTION DES DROITS SEXUELS ET


REPRODUCTIFS ? QUELS SONT LES MEILLEURS CANAUX DE FINANCEMENT DANS CE DOMAINE ? QUELLES ENCEINTES INTERNATIONALES VOUS APPARAISSENT COMME LES PLUS EFFICACES POUR PROMOUVOIR LES DSSR ? Il


faut renforcer les financements destinés à la santé sexuelle et reproductive. Cet engagement pourrait aider les pays en raison des nombreux défis auxquels les pays sont confrontés, dont


notamment l’accès à des services et soins de santé de qualité. Il faut appuyer les organisations locales qui ont de solides expériences et qui peuvent générer des résultats concrets. Le


système des Nations unies, l’AFD, la coopération canadienne constituent des enceintes internationales qui apparaissent comme efficaces pour la promotion des DSSR. 2. LISTE DES PERSONNES


AUDITIONNÉES Équipe de Delphine O, ambassadrice et secrétaire générale du Forum Génération Égalité : Benjamin Bechaz, secrétaire général adjoint au Forum Génération Égalité, Julie Vignon,


rédactrice droits et santé sexuels et reproductifs (DSSR), représentante point focal DSSR pour la France, ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, auditionné·es le 22 janvier 2021.


Mar Merita Blat, chargée de mission genre, Lucie Broechler, division Santé, Anne Isambert, référente genre, département transition démographique à l’AFD auditionnées le 15 février 2021.


Collectif Générations féministes : Nicolas Rainaud, responsable plaidoyer à Equipop, Sharlene Sezestre, responsable plaidoyer international au Planning familial, Christine Mauget, chargée


des questions internationales au Planning familial, Marie Lussier, chargée de programmes SSR à Médecins du monde, auditionné·es le 10 mars 2021. Hubert Chauvet, délégué général du bureau


France d’Amref Health Africa, auditionné le 15 mars 2021. Laurianne Desquesses, chargée de plaidoyer, Yann Illiaquer, coordinateur analyse et plaidoyer, pour Action santé mondiale,


auditionné·es le 23 mars 2021. Bruno Rivalan, responsable du plaidoyer pour le Global Financing Facility hébergé à la Banque Mondiale, auditionné le 26 mars 2021. Maty Dia, responsable des


partenariats pour le groupe de la société civile du Global Financing Facility, auditionné le 1 er avril 2021. Fatou Ndiaye Turpin, directrice exécutive du Réseau Siggil Jiggéen du Sénégal,


auditionnée le 2 avril 2021. Wendyam Micheline Kaboré, directrice exécutive de l’Initiative Pananetugri pour le bien-être de la Femme au Burkina Faso, auditionnée le 2 avril 2021. Ousmane


Kadri Nouhou, directeur exécutif de la Fondation Guri-Vie meilleure du Niger, auditionné le 8 avril 2021. Clémence Schantz, sage-femme et docteure en sociologie à l’Institut de Recherche


pour le Développement (IRD), auditionnée le 9 avril 2021. Mélanie Vion, responsable de Projets-Mobilisation Communautaire/Partenariats société civile pour Solthis, auditionnée le 13 avril


2021. Lesia Radelicki, membre du cabinet d’Helena Dalli, Commissaire européenne en charge de l’Égalité, auditionnée le 14 avril 2021. Oumou Salif Touré, membre du Réseau des jeunes


féministes d’Afrique de l’Ouest, auditionnée le 15 avril 2021. Nafissa Hassan Alfari, présidente de la Cellule nigérienne des jeunes filles leaders, auditionnée le 19 avril 2021. Anaïs


Kintgen, chargée de mission, mobilisation société civile – Forum Génération Égalité au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères et au ministère de l’Égalité femmes-hommes,


auditionnée le 22 avril 2021. Julie Vignon, rédactrice droits et santé sexuels et reproductifs, population et démographie, ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, auditionnée le 22


 avril 2021. Jean-Claude Mulunda, directeur d’Ipas pour la République démocratique du Congo (RDC), auditionné le 23 avril 2021. Sam Ntelamo, chef du bureau d’Adis-Abeba, Paulin Tra,


responsable données, stratégie et gouvernance à Nairobi, IPPF Afrique, auditionnés le 26 avril 2021. Pierre Crozier, conseiller régional en santé mondiale à l’amabssade de France en Angola,


au Congo-Brazzaville, au Gabon et en République démocratique du Congo (RDC), auditionné le 29 avril 2021. Jane Medor, chargée de programme et mobilisation des ressources pour JED (Sénégal),


membre du Réseau Alliance Droits et Santé, auditionnée le 30 avril 2021. Norbert Coulibaly, responsable technique senior du Partenariat de Ouagadougou, auditionné le 30 avril 2021. Abou


Bakary Traoré, gynécologue obstétricien à Bamako au Mali, auditionné le 6 mai 2021. Irmine Ayihounton, membre du Réseau des jeunes féministes d’Afrique de l’Ouest, auditionnée le 7 mai 2021.


Pierre-Alain Rubbo, conseiller régional en santé mondiale à l’ambassade de France au Burkina Faso en charge du Burkina Faso, Mali et Niger, auditionné le 10 mai 2021. Fleur Vernat,


secrétariat du Fonds français Muskoka, auditionnée le 11 mai 2021. Mar Merita Blat, chargée de mission genre à l’AFD, auditionnée le 17 mai 2021. Laurence Rossignol, sénatrice, ancienne


ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, auditionnée le 20 mai 2021. Perri Sutton, programme Officer dans l’équipe de Planification familiale à Bill & Melinda Gates


Foundation, auditionnée le 3 juin 2021.