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Ce lundi 4 janvier 1971, à 3h06, à peine éteintes les guirlandes multicolores des fêtes de fin d'année, une formidable explosion réveille la cité gersoise et ravage tout un quartier, en
quelques secondes. La partie nord d'un bel immeuble neuf de sept niveaux et de vingt-quatre appartements, l'immeuble Gresse - au rez-de-chaussée duquel se trouvait un garage, le
Central garage, dont la dalle de béton a sauté - s'est effondrée, soufflée, entraînant dans sa chute les occupants surpris dans leur sommeil. Construit en 1967, l'immeuble
lui-même, situé avenue d'Alsace au bord du Gers, à l'entrée du pont de la Treille, est en feu. > Retrouvez toutes nos archives sur l'explosion de gaz à Auch en 1971 dans
notre moteur de recherche "UNE HALLUCINANTE COURSE CONTRE LA MORT" Aussitôt à pied d'oeuvre, les pompiers d'Auch, rejoints plus tard par ceux de Condom et Mirande,
maîtrisent l'incendie. Lancés "Dans une hallucinante course contre la mort" pour tenter de sauver les victimes de l'explosion, écrit "Sud Ouest", les secours
mettront trois longues heures à dégager des décombres une enfant de 9 ans, Françoise Schaeffer. Meurtrie mais vivante. Sur son lit d'hôpital, la fillette ignore encore qu'elle est
devenue orpheline. Avec une jeune femme âgée de 28 ans, Anne-Marie Pomiès, très grièvement blessée et qui a également perdu tous les siens, elle fait partie de ces huit rescapés qui ont
miraculeusement survécu à la catastrophe. 14 MORTS ET DES VIES MARQUÉES À JAMAIS > Trois jours à peine après le début de l'an neuf, la première > grande catastrophe nationale se
solde par quatorze morts, peut-on lire à la une de "Sud Ouest", le 5 janvier. Le journal précise en page intérieure que "trois familles sont anéanties". > 500
militaires se sont relayés Le macabre décompte de la liste des victimes s'allonge au fil de la journée. Parmi ces dernières, Antoine Pastre, le nouveau veilleur de nuit de la station
service située au rez-de-chaussée de l'immeuble, qui aurait dû normalement prendre son service le mercredi. Mais il avait accepté de "débuter" ce dimanche... A 18 heures, sous
les décombres fumants de l'immeuble de la rue d'Alsace, deux corps restent encore prisonniers. Pourtant, depuis les premières minutes qui ont succédé à l'explosion, quelque
500 militaires se sont relayés pour fouiller les ruines... Certains occupants de l'immeuble venaient tout juste de rentrer des vacances de Noël, en cette veille de la rentrée scolaire.
Au total, quatorze personnes sont mortes dans la catastrophe, dont huit enfants, âgés d'1 à 13 ans. Trois familles sont décimées. Parmi les survivants, des vies seront marquées à jamais
par le drame. Sur le même sujet UNE VISION D'APOCALYPSE Le 5 janvier 1971, au lever du soleil, par un froid sibérien, un spectacle apocalyptique s'offre aux yeux de la population
auscitaine. Un immense champignon de fumée noire flotte encore au-dessus des décombres. Sur un kilomètre à la ronde, les éclats de verre jonchent les trottoirs. Les portes et les fenêtres
des maisons ont disparu, leurs toitures ont perdu leurs tuiles. Une cinquantaine de voitures ont été détruites. Au beau milieu du Gers glacé, trois carcasses d'automobiles projetées
dans les airs obstruent le cours d'eau. Une première évaluation estime le montant des dégâts à 20 millions de francs. Le montant total des dédommagements de l'ensemble des
sinistrés aurait avoisiné finalement 15 millions de francs. "J'AI CRU QU'UN AVION S'ÉTAIT ÉCRASÉ" Dans la rue, alors qu'arrivent de nombreuses personnalités,
les survivants et les témoins, encore sous le coup de l'émotion, confient leur cauchemar aux journalistes de "Sud Ouest" dépêchés sur place. "J'ai cru qu'un
avion s'était écrasé", dit l'un d'eux. Un autre raconte : "Après l'explosion, je suis sorti.de chez moi et j'ai entendu appeler au secours, pourtant
j'habite à plus d'un kilomètre." Un autre erre à la recherche d'un parent. Certains ont cru à un tremblement de terre. D'autres à "la fin du monde".
Qu'est-ce qui a pu provoquer une pareille tragédie ? A Auch et dans la région, mais aussi partout en France, on s'interroge, l'enquête n'ayant pas encore pu déterminer
précisément les causes de cette explosion meurtrière. > Peut-être faudra-t-il désormais renoncer à construire des > buildings au-dessus des garages ou stations-service où sont >
entreposées d'importantes quantités de liquides inflammables ? spécule le journal. TOUTE UNE VILLE EN DEUIL En signe de deuil, les écoles restent fermées le lundi 4 janvier. Le mercredi
6, les premières funérailles ont lieu à Boulogne-sur-Gesse. Le jeudi suivant, les obsèques sont célébrées devant 5.000 personnes en larmes, pour toutes les victimes, au cours d'une
cérémonie commune, à 10h30, en la cathédrale d'Auch, avec un service mixte catholique et protestant. Pour rendre hommage aux militaires et à leurs familles, une prise d'armes est
organisée sur la place de la Libération. Très vite, un grand élan de solidarité s'empare des Auscitains qui récoltent pour les survivants sinistrés argent, vêtements et mobilier.
Riverains et commerçants sinistrés se constituent rapidement en comité de défense. Au bout d'une semaine, la vie finit par reprendre son cours dans le quartier. LE LONG PROCÈS DE GAZ DE
FRANCE Mais l'enquête, minutieuse, elle, ne fait que commencer. On pense à plusieurs pistes, une explosion d'essence du garage, le gaz, un règlement de compte… Les deux cuves de
la station-service, situées côté façade de l'immeuble, sont intactes et contiennent encore leur plein, d'essence. L'enquête montrera qu'il s'agissait bien d'une
explosion de gaz. Le 14 janvier 1971, une conduite de gaz perforée est saisie par les enquêteurs sous l'immeuble détruit. La justice mettra des années à condamner Gaz de France (GDF).
Le 6 février 1973, deux ans après le drame, le procès s'ouvre enfin devant le tribunal de grande instance d'Auch, avec deux jours de débat, livrant une bataille d'experts
acharnée. Le réquisitoire du procureur général Jorda demande le retrait de l'accusation pour quatre des inculpés sur cinq. Quatre inculpations visaient des responsables de GDF et la
cinquième, l'installateur chauffagiste ayant procédé à la mise en place de la conduite montante estimée défectueuse. > GDF condamné en cassation Dans un jugement rendu le 27 mars
1973, le tribunal condamne pénalement un inculpé sur les cinq. Le chef de la subdivision d'Auch de GDF écope de six mois d'emprisonnement avec sursis et 20 francs d'amende.
GDF est reconnu civilement responsable en tant que personne morale et condamné à verser 1.825.000 francs de préjudice moral, 25.000 francs pour les préjudices corporels et 1 300 000 francs
de préjudice matériel aux 35 sinistrés parties civiles. Les deux condamnés interjettent immédiatement appel. Le 2 février 1974, la Cour d'appel d'Agen confirme le verdict du
tribunal auscitain. L'amende du chef de subdivision est augmentée et des dommages et intérêts sont légèrement réduits. GDF se pourvoit alors en cassation. En 1976, la Cour de cassation
confirme la responsabilité civile de Gaz de France. LE MESSAGE DU PAPE Un message a été adressé par Paul VI et lu lors des obsèques. C’était la première fois qu’un pape s’adressait
directement aux Gersois. “Le Saint Père, ému par les circonstances tragiques de l’explosion d’Auch, prie de grand cœur pour toutes les malheureuses victimes et présente aux familles
éprouvées ses vives condoléances. Il charge l’archevêque de leur transmettre, en guise de réconfort, sa fraternelle bénédiction apostolique, en les assurant de sa profonde sympathie et de
ses prières personnelles.”