Procès d'anasse kazib : « une procédure politique de l'extrême-droite soutenue par l'état »

feature-image

Play all audios:

Loading...

Dans une tribune publiée ce mercredi 23 avril, plus de 1 000 personnalités appellent à la relaxe de Anasse Kazib et d’un autre militant de RP à l’approche de leur procès pour apologie du


terrorisme qui aura lieu le 18 juin prochain. A l’occasion de la parution de ce texte, une conférence de presse exceptionnelle s’est tenue ce jeudi à l’UL CGT du 18ème, réunissant Rima


Hassan, Frédéric Lordon, Elsa Marcel, Assa Traoré, Anasse Kazib et le syndicat Sud Rail Paris Nord. L’échéance a permis de revenir en profondeur sur la criminalisation du soutien à la


Palestine en cours et l’urgence de faire front. UN PROCÈS CONTRE LA CRIMINALISATION DU SOUTIEN DE LA PALESTINE Elsa Marcel, l’une des avocates qui défendra Anasse Kazib le 18 juin, est


d’abord revenue sur l’infraction d’apologie du terrorisme qui a servi de fondement aux poursuites contre les soutiens de la Palestine. Intégrée en 2014 dans le code pénal, elle permet de


rétablir un véritable délit d’opinion, au point que la France a été condamnée en juin 2022 par la Cour européenne des droits de l’homme en raison de l’utilisation de cette incrimination.


L’avocate est également revenue sur les choix de défense pour ce procès inédit contre deux militants, dont le porte-parole d’une organisation politique nationale : quatre témoins seront


cités, des dizaines d’attestations écrites produites. Les avocates saisiront par ailleurs prochainement le Défenseur des droits et la rapporteure spéciale des Nations unies sur la liberté


d’expression. « _On veut que ça serve de manière plus large pour dénoncer la criminalisation_ » conclut-elle. Rima Hassan, eurodéputée et militante palestinienne, a dénoncé pour sa part


l’ampleur du génocide en cours depuis le 7 octobre et l’absolue nécessité dans ce contexte de le dénoncer. Évoquant la lutte du peuple palestinien, elle a souligné « _on peut débattre,


questionner les moyens de lutte, les critiquer, mais ce qui est grave actuellement, c’est cette répression massive_ », notant par ailleurs l’opacité quant au nombre de procès passé ou en


cours pour « _apologie du terrorisme_ ». Brutalement visée par le régime ces derniers mois, elle a souligné combien ces procédures visent à faire taire toute critique de la politique de


l’État d’Israël. Prenant l’exemple de sa propre convocation récente qui a conduit à une audition de 11h30 au total, dans le cadre, notamment, d’une enquête pour apologie du terrorisme, elle


a souligné l’étendue de cette censure : « _lors de ma convocation, on m’a questionnée pendant deux heures sur ce que je voulais dire en utilisant le mot "soulèvement"_ ». Dans le


même sens, le philosophe Frédéric Lordon a dénoncé le mécanisme ayant permis de légitimer cette répression : celui qui consiste à considérer que l’histoire de la Palestine aurait commencé le


7 octobre 2023 et à refuser l’idée même d’expliquer les violences qui ont eu lieu ce jour-là. « _Dans un régime légal et judiciarisé de la pensée, le sens historique d’un événement est


bouclé, saturé, la vérité de l’événement immédiatement et officiellement dite, et tout objecteur s’expose à des poursuites_ » synthétise le philosophe. Ironisant sur la « _sidération_ » des


médias français face aux offensives autoritaires de Trump et leur désintérêt pour leurs équivalents en France, il a conclu en invitant « _à voir dans ce procès une très sérieuse occasion de


se dé-sidérer_ ». L’EXTRÊME-DROITE ET LA JUSTICE MAIN DANS LA MAIN, IL FAUT FAIRE FRONT ! De leur côté, les militants du syndicat SUD Rail Paris Nord, étaient présents pour réaffirmer leur


soutien plein et entier à leur collègue. Face à l’ampleur de la répression qui s’est abattue sur le monde du travail, à l’instar de la condamnation de Jean-Paul Delescaut ou du licenciement


de Timothée Esprit, le syndicat a dénoncé le « _saut que constitue le procès d’Anasse sur le niveau de répression constaté jusqu’ici et la gravité de cette atteinte à la liberté


d’expression_ ». Une autre camarade de lutte était venue soutenir un soutien historique de la lutte pour la vérité et la justice pour Adama Traoré : Assa Traoré. Elle revenue sur la


répression qu’elle a elle-même subi en raison de ses prises de position, mais aussi sur l’importance de se mobiliser pour la relaxe d’Anasse Kazib dans un contexte où l’arsenal répressif est


particulièrement utilisé pour réprimer les quartiers populaires, concluant avec un proverbe malien : « _si tu rentres dans le trou on rentrera dans le trou avec toi_ ». Des expressions de


solidarité fortes qu’Anasse Kazib a commencé par saluer, remerciant longuement ses soutiens. Le cheminot a ensuite donné plus d’éléments sur la portée politique de son procès, l’inscrivant


dans une répression internationale. Devant les journalistes présents, il a égrainé les détails d’un dossier d’enquête de 400 pages, d’une ampleur comparable à des enquêtes visant des


terroristes. Celui-ci fait suite à une plainte soutenue par près de 50 avocats, parmi lesquelles des figures proches de l’extrême droite, comme Olivier Pardo, avocat d’Eric Zemmour, et


visant des dizaines de personnalités de gauche dont Jean-Luc Mélenchon, Olivier Besancenot, Danièle Obono ou encore 12 militants de l’UJFP. Une véritable pétition en faveur de la


criminalisation des soutiens de Gaza derrière laquelle se sont rangés la police et la justice, qui a choisi de poursuivre les deux militants de Révolution Permanente. A la tribune, Anasse


Kazib souligne la gravité d’une enquête liberticide, qui va jusqu’à faire des réquisitions auprès de mutuelles, de la sécurité sociale, de la CAF, mentionner le nom de ses enfants ou relever


de nombreuses prises de positions politiques, notamment sur les violences policières. « _On n’est pas dans une enquête sur de l’apologie du terrorisme là, on est dans une enquête sur un


opposant politique_ » a souligné le cheminot. Insistant sur la responsabilité de la presse pour dénoncer cette offensive brutale contre les droits démocratiques, le porte-parole de RP a par


ailleurs précisé « _le second militant de RP visé est journaliste de la section internationale de notre journal. Il est convoqué pour un article sur la Palestine. Quand on parle de liberté


de la presse, en tant que journaliste, il faut s’indigner de ça._ » Des propos auxquels Rima Hassan a fait écho, en soulignant combien peu de journalistes lui avaient tendu un micro ces


derniers mois à l’occasion des multiples polémiques initiées par le gouvernement, la droite ou l’extrême-droite, et en invitant les médias à se pencher sur les associations opaques à


l’origine des procédures-bâillons contre les soutiens de Gaza. Anasse Kazib a finalement conclu en expliquant : « _quand on attaque l’un d’entre nous, c’est pour faire taire le plus grand


nombre._ » En réponse au message que tente d’envoyer le gouvernement, il a insisté sur la nécessité de construire un « _bloc de résistance_ » pour obtenir la relaxe et plus largement mettre


fin au mouvement de répression du soutien à la Palestine : « _on veut faire de ce procès celui de la criminalisation du soutien à la Palestine_ ». Une chose est sûre, face à cette offensive


d’ampleur, et alors que le jour-même se tenait e procès de l’universitaire François Burgat, cette conférence de presse en forme de discussion sur la répression d’État aura été une première


pierre en ce sens. Le 7 mai, un événement à la Flèche d’or viendra prolonger les débats, avant le procès du 18 juin, à l’occasion duquel un grand rassemblement de solidarité se tiendra à


Paris. Face à l’ampleur de l’offensive, l’ensemble du mouvement de soutien à la Palestine, les organisations du mouvement ouvrier et politiques de notre camp social doivent faire front en


soutien à Anasse Kazib et à toutes les personnes visées pour leur soutien à la Palestine.