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Après avoir relaté dans un premier article comment Pascal Olivard se montre, par la répression des étudiants, le fidèle accompagnateur des pires lois néolibérales, nous analysons ici comment
il met concrètement l’enseignement supérieur au service du capital. Ce co-fondateur, en 1993, du syndicat étudiant de collaboration avec la direction Fédé B, qui à l’époque organisait des «
_élections de Miss Campus, avec ou sans tee-shirt mouillé_ », a pu durant deux mandats de 2007 à 2016 et depuis 2023 subordonner l’enseignement au profit des entreprises bancaires,
agroalimentaires et militaires. Le plus fort secteur économique à Brest est le militaire qui représente 21 180 emplois, dont 3140 chez Naval Group et 1700 chez Thales. Ces deux entreprises
bénéficient de partenariats avec l’UBO qui en fait une promotion obscène pour inciter les étudiants à y faire des stages et y postuler. « L’UNIVERSITÉ N’EST PAS UNE USINE À CHÔMEURS ! » Pour
assurer la promotion de l’UBO, Pascal Olivard a animé en 2010 une conférence intitulée : « _L’université, usine à chômeurs ?_ » lors de portes ouvertes. Il ressasse ainsi son inlassable
obsession pour l’insertion professionnelle, fer de lance de sa carrière universitaire dont le dessein essentiel est de fournir aux entreprises des étudiants aux cerveaux remplis pour leurs
besoins. Aucune visée émancipatrice ne se loge dans sa conception de l’université. Dès 2001, alors doyen de la Faculté de Sciences, il faisait preuve d’un paternalisme condescendant : «
_moi, je veux casser l’image des enfants perdus dans la nature quand ils arrivent à l’université. Nous aussi, on sait prendre soin de nos étudiants, nous aussi on sait être moderne_ ». Cette
manière infantilisante de s’adresser aux étudiants témoigne d’une forme managériale d’encadrement éducatif visant à mettre au pas, à rendre docile et obéissant : « _demain, vous serez là à
9 h, je n’exclus pas de faire un appel. Maintenant, vous êtes responsables, à vous de vous prendre en main. Vous n’êtes pas là pour jouer aux cartes_ ». Candidat pour la troisième fois au
poste de la présidence en 2023, il proclame sa vision du monde du travail, fait de soumission, de servilité et de précarité : « _Je dis aux jeunes qu’une carrière aujourd’hui, c’est cinq
entreprises et trois métiers différents. C’est à nous de leur donner les clés de cette adaptabilité_ ». Lors de la validation du passage en établissement public expérimental (EPE), contre
lequel les étudiants s’étaient mobilisés, sa verve se teinte d’un grotesque patriotisme économique : « _Ce sera un véritable outil de formation pluridisciplinaire pour former les ingénieurs
et managers de demain. La France en a besoin. Nous nous devons de jouer le rôle attendu par la nation_ ». Son engagement en faveur de l’emploi touche ses limites lorsqu’en application de sa
règle de suppression d’un contractuel pour toute nouvelle embauche d’un titulaire, il jette au chômage des enseignants, quand bien même ceux-ci travaillent dans la précarité depuis plus de
cinq et huit ans à l’UBO. Il modèle les enseignements pour les soumettre à une visée professionnalisante, allant jusqu’à créer un module consacré aux techniques d’expression destinées à la
rédaction de _curriculum vitae_ et de lettres de motivation. Sa volonté de formater les contenus pédagogiques pour les besoins du patronat est clairement assumée et régulièrement martelée.
En 2005 : « _Entendons-nous bien, ce n’est pas l’entreprise qui nous dicte ce que nous devons faire mais ne pas s’adapter serait suicidaire_ ». En 2006 : « _notre vocation est de former des
cadres pour l’entreprise_ ». La professionnalisation des études devient donc en 2007, très logiquement, l’axe central de sa première campagne pour devenir Président de l’UBO, campagne qui
témoigne d’un mépris abject vis à vis des personnes privées d’emploi considérées comme repoussoir ultime : « _Nous ne fabriquons pas des chômeurs_ ». Suivant cette logique d’adaptabilité
totale au marché du travail, il refuse que les étudiants s’inscrivent dans un deuxième master, proclamant : « _Faire des études pour faire des études, nous n’avons jamais été pour_ ». Élu
président de l’UBO, il montre toute la profondeur de son idéologie entrepreneuriale, projetant son propre goût du lucre sur la mentalité hypothétique des étudiants : « _Si un jeune a appris
les us et coutumes des employeurs, il sera beaucoup plus fort pour affronter la vie. Il faut qu’on se pose les bonnes questions autour des attentes de la société. Aujourd’hui, quelqu’un qui
rentre à la fac veut un job épanouissant et gagner de l’argent_ ». Après le vote de la loi LRU en août 2007, il n’attend que quatre mois pour modifier les statuts de l’UBO afin de pouvoir la
mettre en application le plus rapidement possible et renforcer son objectif : « _l’employabilité_ » des étudiants. Des stages sont rendus obligatoires et un plan « _réussite en licence_ »
est mis en place « _pour que les littéraires franchissent, eux aussi, le pas de l’immersion dans l’entreprise_ ». En 2013, il pousse cet asservissement encore plus loin et impose un stage en
entreprise de 70 heures minimum. PARTENAIRE ATTENTIONNÉ DES ENTREPRISES Enthousiaste zélateur de la loi LRU, Pascal Olivard y a en effet vu l’opportunité de diriger l’université avec les
méthodes propres aux entreprises : introduire des inégalités au sein du personnel en versant des primes d’intéressement à ceux qu’il juge performants, recruter, restructurer, flexibiliser,
lever des capitaux privés, élargir son pouvoir. Il le revendique avec fierté dans un portrait que lui consacre Les échos en 2016 : « _Depuis la loi Pécresse de 2007 sur l’autonomie des
universités, les présidents sont devenus des stratèges et des managers_ ». Peu lui chaut que cette gestion autoritariste dégrade les conditions de travail et engendre détresse, souffrance,
voire suicide. D’ailleurs, il ne fait pas mystère de la politique austéritaire qu’il compte appliquer par la suppression de filières et de postes : « _il ne faudra pas compter sur moi pour
soutenir des équipes qui ne sont pas à la hauteur de ces exigences_ [l’excellence]. _Nous ne pourrons pas disposer de tous les masters_ ». Par contre, il n’hésite pas à créer une chaire
professionnelle pour renforcer l’attractivité des métiers de l’agroalimentaire en partenariat avec les entreprises Even, Triskalia et Savel (Société d’Abattage de Volailles Et de Lapins). Ce
qui le fait jubiler, ce sont les juteuses perspectives ouvertes par la loi néolibérale LRU : « _On peut tout à fait diversifier nos sources de revenus dans le cadre de partenariats avec les
entreprises. Il y a des choses à inventer sans pour autant perdre notre âme. Beaucoup d’entreprises n’attendent que ça_ ». Il s’attelle dans la foulée à la création d’une fondation afin de
recueillir des dons défiscalisés à hauteur de 60 %. La liste des membres qu’il choisit pour son conseil d’administration en 2008 donne d’emblée le ton de son engagement pro patronal
puisqu’on y trouve le PDG de l’entreprise Filet Bleu et président d’une CCI, le directeur de Thales Systèmes Aéroportés et administrateur de l’UIMM 29, le directeur adjoint de la CCI de
Brest ainsi que la directrice du Laboratoire Boiron de Brest. Il prend la tête, en 2011, du Pôle de l’entrepreneuriat étudiant en Bretagne qui « _a pour ambition de développer l’esprit
entrepreneurial des étudiants, de favoriser les rencontres avec le monde de l’entreprise_ ». En 2013, il officialise l’immixtion tangible du patronat dans les études en signant une
convention entre l’université et le Medef. En 2020, il est élu à la tête de la Fondation UBO aux côtés du directeur des ressources humaines du groupe agroalimentaire EVEN et d’une
responsable du Crédit Mutuel Arkéa. Le fort lien entre la faculté et cette banque est étroitement entretenu depuis une trentaine d’années et a même donné lieu à l’invention d’un diplôme de
finance. Nous retrouvons, tout naturellement, Pascal Olivard aux côtés de Jean-Pierre Denis, PDG du CMB de 2008 à 2021, comme intervenant lors d’une conférence du Centre des jeunes
dirigeants d’entreprises brestois en 2009. C’est d’ailleurs la directrice générale déléguée du Crédit Mutuel Arkéa qui est actuellement à la tête de la Fondation UBO. Banque qui est
partenaire de la fondation, tout comme le groupe Even et la compagnie d’assurance MAIF. Qui de mieux en effet que ces représentants du patronat pour diriger ce « _formidable outil de
partenariat avec les milieux socio-économiques_ » qu’est cette fondation selon les termes d’Olivard. Il est par ailleurs membre du comité stratégique de Pépite (Pôles Étudiants Pour
l’Innovation, le Transfert et l’Entrepreneuriat) dont il fut président et dont le but est de développer chez les étudiants la culture entrepreneuriale. LA LIAISON TRÈS ÉTROITE ENTRE THALÈS,
LES INDUSTRIES DE L’ARMEMENT ET L’UBO Face aux contestations engendrées par le rapprochement entre l’UBO et les entreprises en 2007, Olivard se montrait rassurant : « _On ne montera jamais
un mastère Thalès_ » [sic] mais près de dix-huit ans plus tard, les tabous sont définitivement tombés et Thales participe activement aux enseignements. Le Master Électronique Radiofréquence
et Télécommunications est ainsi vanté par l’UBO : il donne lieu à « _un partenariat fort avec les industriels au niveau local mais aussi national. Durant la formation, les partenaires
industriels (Thales LAS,GTID, Thales DMS…) interviennent dans la formation au travers de projets et en accueillant les étudiants lors de stages_ ». D’autres spécialités universitaires
entretiennent aussi ce lien étroit avec l’industrie de l’armement et font explicitement référence à Thales, ainsi qu’à Dassault, Naval Group et Airbus pour les stages ou l’alternance : le
Génie mécanique, l’informatique, la chimie, le management. Thales et Naval Group sont d’ailleurs représentées au Forum Entreprises organisé par la Faculté des Sciences et Techniques. L’IUT,
composante de l’UBO, met quant à elle en exergue les « _formations sur mesures mises en place avec et pour des entreprises_ » et l’on y retrouve encore Thales. Enfin, c’est au salon
aéronautique du Bourget qu’en 2011, Pascal Olivard signe un accord avec Dassault Systèmes pour le compte de l’IUT de Brest afin de développer une innovation technologique destinée aux
avions. Assurant la promotion de ses formations par la valorisation des débouchés professionnels, l’université propose ainsi une fiche intitulée « _Quel parcours !_ » présentant Maxence qui
grâce à ses études est devenu prestataire chez Thales. Pour expédier des doctorants chez les marchands d’armes, l’UBO utilise le dispositif CIFRE (Convention Industrielle de Formation par la
Recherche) qui, par le biais de crédits d’impôts, sert à subventionner les entreprises qui recrutent un doctorant. Cela lui permet de citer comme exemple Kévin qui a mené son doctorat tout
en travaillant comme ingénieur chez Thales. Un enseignant chercheur de l’UBO postait carrément, il y a un an, une candidature sur Linkedin pour inciter les étudiants à postuler pour une
thèse CIFRE à réaliser sur le site de Thales. Les étudiants peuvent par ailleurs accéder sur le site internet de l’UBO à un _Career Center_ contenant des offres de recrutement de multiples
entreprises, dont Naval Group et Thales, qui ont carte blanche pour assurer leur publicité afin d’accroître leur « _vivier de compétence_ ». L’université brestoise est même allée, le 18 mars
dernier, jusqu’à organiser une visite d’entreprise sur le site brestois de l’industriel de l’armement Thales pour la promotion Master 1 en génie mécanique. Ne se contentant pas de former et
de lui fournir des travailleurs, l’UBO participe également à redorer le blason du marchand de mort. Dès 2011, l’université signait un accord concernant les étudiants en situation de
handicap avec Thales, ce qui permettait à l’entreprise d’acheter une image d’inclusivité avec un chèque de 120 000 euros et de promouvoir ses « _conditions de travail adaptées, de stages et
de l’apprentissage_ ». Que Thales fabrique des armes destinées à tuer et mutiler n’émeut pas Olivard puisque ses représentants sont régulièrement conviés à la faculté, comme ce fut le cas en
octobre dernier : « _l’UBO accueillait ses entreprises partenaires pour une matinée de sensibilisation au dispositif Atypie-Friendly_ » destiné aux étudiants atteints de troubles du
neurodéveloppement. Pour mettre en valeur la firme mortifère, l’UBO utilise aussi le greenwashing. En effet, durant la semaine de la transition écologique à l’IUT de Brest/Morlaix
(composante de l’UBO) en janvier dernier, Thales et d’autres boîtes étaient invitées à présenter « _leurs problématiques en matière de développement durable_ ». Ce qui relève d’un cynisme
insensé quand on sait que le secteur militaire est particulièrement écocidaire. Grâce à cette dangereuse collaboration avec l’UBO, Thales peut ainsi proférer des mensonges et se présenter
dans le _Career Center_ comme travaillant à « _imaginer des solutions innovantes qui contribuent à construire un avenir plus sûr, plus vert et plus inclusif_ ». L’AMBITIEUX MONSIEUR OLIVARD
Son parcours de petit Rastignac de l’ascension sociale s’est heurté à plusieurs échecs. En 2016 il prend la tête de l’université Bretagne-Loire (UBL) qui vient d’être créée pour regrouper
sept universités, quinze écoles et cinq organismes de recherche. Dans sa profession de foi, il met en avant sa soif de pouvoir en exposant la multiplicité des présidences qu’il a exercées
(Pôle de Recherche et d’Enseignement Supérieur, Université Européenne de Bretagne, UBO) et persévère dans son insatiable obsession, proclamant sa volonté de faire de l’UBL un « _levier de
transfert de la recherche vers le tissu socio-économique_ ». Fin 2018, il acte son échec à mener à bien sa mission en annonçant sa démission, moins d’un an plus tard ce sera la dissolution
de l’UBL. Dès mai 2018, voulant assurer ses arrières, il postule pour prendre la tête de l’Ifremer dont le siège allait être transféré à Brest. Sa tentative de conquête tourne court
puisqu’il ne sera même pas auditionné. Début 2016, peu avant la fin de son deuxième mandat à la tête de l’UBO, Pascal Olivard avait voulu quitter la sphère de direction administrative
universitaire pour rejoindre l’arène politique, il s’était dit intéressé pour figurer sur la liste des régionales de Le Drian. Mais cela était resté lettre morte. Il s’attaque aux
municipales en 2020, se présentant pour la mairie de Brest. Son positionnement politique est sans ambiguïté à droite : « _On peut dire que je suis centre gauche car je suis sensible à
l’autre, à la justice sociale. Et centre droit car je soutiens l’entrepreneuriat, ceux qui prennent des risques pour créer de l’activité économique_ ». C’est sans surprise qu’à la cinquième
place de sa liste _Brest, imaginons demain_, figure Frédéric Laurent, le directeur général adjoint du groupe de bancassurance Crédit Mutuel Arkéa si étroitement lié à l’UBO ainsi que
Michelle Calvès, chargée de mission du même groupe, à la dixième place. 2 782 Brestois voteront pour lui, ces 9 % des voix lui permettront d’obtenir le remboursement des frais de campagne
mais pas de se maintenir pour le second tour. Redevenu Président de l’UBO, il manifeste son engagement politique en nommant, comme directeur de cabinet, Yann Rabuteau qui fut collaborateur
parlementaire du député macroniste Didier Le Gac pendant sept ans. L’ardent défenseur du patronat et des militaires, Pascal Olivard, dispose encore de trois années de mandat à la tête de
l’UBO pour poursuivre ses attaques contre les étudiants. Il faudra nous organiser stratégiquement contre celui qui n’hésita pas à expédier des CRS contre le mouvement étudiant luttant contre
l’austérité en mars 2024, ainsi que lors du combat contre la réforme des retraites en 2023. Dans le contexte de militarisation mondiale généralisée que nous traversons, les budgets
militaires connaissent une ascension spectaculaire qui va s’intensifier et se fera toujours davantage au détriment, notamment, de l’enseignement supérieur. La recherche quant à elle sera de
plus en plus subordonnée au service des technologies militaires, dont Pascal Olivard est dors et déjà un fidèle adjuvant. Le mouvement étudiant brestois doit absolument se mobiliser pour
contrer la marche à la guerre et dénoncer les collusions universitaires qui pavent la voie aux massacres impérialistes. Plus que jamais nous devons affirmer la nécessité d’une université
émancipatrice, internationaliste, écologiste au service des besoins de la jeunesse, des travailleurs et des classes populaires. Pas des militaires ! Pas un euro et pas une vie pour leurs
guerres !