Maltraitance, humiliation : les ehpads, business juteux de la fin de vie

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UNE MALTRAITANCE INSTITUTIONNELLE Les cas de maltraitances en Ehpad sont extrêmement fréquents. Dans des chiffres vraisemblablement largement sous-estimés, l’OMS pointe que 16% des personnes


de plus de 60 ans subissent de la maltraitance. Une maltraitance institutionnelle qui constitue une évidence pour tout soignant dès le premier pas posé dans un établissement. Pas de


possibilité de prendre une douche tous les jours, des repas express en faible quantité, des résidents laissés des heures seuls dans leurs chambres. Les exemples sont multiples. Le manque de


personnels d’accompagnement et de soins en est la première cause. Il manquerait d’après SOS EHPAD 200 000 soignants. Ces populations, particulièrement vulnérables, subissent une dégradation


de leur état de santé dans un établissement qui est censé maintenir leur autonomie. Par exemple, peu d’Ehpad bénéficient de kinésithérapeutes, le personnel n’a pas le temps de les aider à


faire de l’exercice, ce qui a pour conséquence d’atrophier les muscles et les condamne au fauteuil roulant. Les escarres sont un indicateur de cela. Il s’agit d’une plaie provoquée par le


manque de mobilité qui crée un appui trop important sur la peau. Elle est favorisée par le manque d’hygiène, la dénutrition et le manque de changement de position. On sait que ces 3 facteurs


sont souvent présents dans les Ehpad du fait du manque de personnel et de l’économie faite sur les repas. D’après les études de la Société Française de l’Escarre, plus de 7% des résidents


d’Ehpad ont des escarres. S’il n’est pas détecté en amont, il peut provoquer des séquelles graves voire le décès quand la plaie est trop profonde. Cette maltraitance touche également les


soignants. Dans certains témoignages, les soignants ont 7 minutes pour une toilette, la course aux soins est tellement importante que le seul loisir des résidents est souvent la télévision.


Par ailleurs 42 % des Ehpad sont en manque de personnels structurel. Cela est sans compter les Ehpad qui volontairement ont un effectif bas pour engranger du bénéfice sur le dos des


soignants épuisés, qui essayent de leur côté de compenser au maximum pour le bien des résidents. UN SOIN TOUJOURS PLUS DÉGRADÉ PAR L’OFFENSIVE NÉO-LIBÉRALE Les Ehpad privés ont la


particularité de faire des bénéfices sur la vie de nos aînés. Pour ce faire de nombreux stratagèmes sont mis en place notamment en profitant des fonds publics qu’ils perçoivent. En effet,


les résidents ayant tous une prise en charge médicale, la sécurité sociale prend en charge une partie de leurs besoins. Par exemple, Korian payait délibérément plus cher ses dispositifs


médicaux tels que les fauteuils roulants et restent ainsi fidèles à leurs fournisseurs afin de recevoir des RFA (remises de fin d’année) plus importantes puis se font rembourser par des


fonds publics. Ces pratiques sont dénoncées par Victor Castanet dans le livre « Les fossoyeurs ». De plus, le témoignage de Sabrina*, auxiliaire de vie, nous raconte que le groupe Orpea


rationne les protections jetables des résidents si bien que de fortes odeurs embaument les couloirs de la résidence. Elle raconte « _il m’est arrivé plusieurs fois de n’avoir qu’une


serviette pour 3 résidents. Si je disais quelque chose, j’avais l’impression d’être l’emmerdeuse de service_ ». Amandine*, aide-soignante à Orpea raconte avoir été licenciée pour plainte du


manque de matériel « _Le dernier week-end que j’ai passé là-bas [en 2018], on n’a pas eu de gants de toilette. Vous savez ce que j’ai dû faire ? Scotcher des petits sacs-poubelle autour de


mes mains pour pouvoir faire les toilettes. Je me suis plainte à l’infirmerie. Et le lundi, j’étais convoquée dans le bureau du directeur. Il m’a dit : “prenez ce courrier ! C’est une mise à


pied“_ ». Et pour être certain qu’elle parte il s’est mis devant la porte du vestiaire où Amandine* se changeait. Les commandes de matériel devaient être validées par une directrice


coordinatrice. Autrement dit la direction impose la terreur en licenciant. LES EHPADS, UN BUSINESS JUTEUX Les capitalistes ne cesseront jamais de nous surprendre. En effet, il est possible


d’acheter une chambre en Ehpad privé afin d’avoir des compléments de revenu. Tous les mois, l’investisseur reçoit le loyer si la chambre est occupée. Le crédit agricole par exemple vante ses


avantages : charges déductibles, la société de l’Ehpad gère tout et avec une population vieillissante la demande est là. Sauf que les groupes gestionnaires d’Ehpad n’hésitent pas à laisser


à l’abandon les résidences qui ne sont pas assez rentables, laissant les résidents dans des situations allant jusqu’à l’insalubrité. Ces situations illustrent le sort réservé aux personnes


âgées dans la société capitaliste. N’ayant plus leur force de travail à vendre les classes dominantes ont trouvé une façon de se faire de l’argent en marchandisant le logement et le


traitement médical de ces populations vulnérables, via les Ehpad. L’Etat et le patronat utilisent ainsi cette dépendance à des fins d’un nouveau marché et au prix d’une maltraitance


institutionnelle. L’enfermement, le manque de liberté de nos aînés dans ces institutions ont profondément choqué les travailleurs de la santé. En effet, des familles, elles-mêmes exploitées,


croulent sur le travail et ne peuvent plus s’occuper de leur propre famille. Or, en France, l’Ehpad coûte en moyenne 2 310 euros par mois c’est donc loin d’être accessible. Le travail dans


ces institutions renvoie à cette cruauté où chaque soir, les soignant souffrent d’avoir passé des journées sans pouvoir prendre réellement soin des résidents, par manque de temps pendant que


la bourgeoisie s’engraisse. La honte doit changer de camp. Les travailleurs des EHPAD doivent prendre conscience de leur capacité à imposer un rapport de force. Les EHPAD ne sont rien sans


nous. Nous devons nous battre pour un système accessible à tous nos aînés quel que soient leurs pensions de retraite. Les personnes âgées sont marginalisées par la société capitaliste car


elles ne produisent plus. Par conséquent, une autre réalité où les personnes âgées seraient inclues et non abandonnées implique de remettre en question ce système capitaliste. Une société où


l’on n’enferme pas les personnes âgées en institution, avec des moyens massifs dans le maintien de leur autonomie à domicile et une intégration dans la société prenant en considération


leurs problèmes spécifiques de santé. Dans une société débarrassée de la propriété privée où l’on travaille moins car celui-là est mieux réparti, où chacun pourrait s’occuper à son échelle


de nos aînés. * Prénom modifié