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Après l’expulsion de 200 mineurs isolés à Toulouse en octobre 2024, ce fut au tour de 400 autres jeunes isolés de se faire expulser de la Gaîté Lyrique, à Paris, au mois de mars 2025. En ce
début de mois de mai, tandis qu’une quarantaine de membres du collectif des Jeunes mineurs de Rouen (CDJMR) s’est lancée dans une occupation courageuse de l’espace public pour dénoncer leurs
conditions de vie dramatiques, c’est vers la frontière franco-britannique que nos yeux doivent également se tourner. L’association Utopia 56, actuellement victime d’un acharnement
judiciaire, comme le documentait Le Monde en novembre dernier, vient en effet d’annoncer, via une publication sur ses réseaux sociaux, être venue en aide à plus 260 mineurs isolés, dont 21
jeunes filles, depuis janvier 2025. > MINEURS ISOLÉS EN DANGER : L’ÉTAT EST RESPONSABLE ! Comme le rappelle l’association, un mineur non-accompagné (MNA) est un enfant privé de la
protection de ses parents ou d’un représentant légal sur le territoire. Théoriquement, les conseils départementaux, ainsi que l’État, ont pour responsabilité de prendre en charge et
d’assurer la protection de ces mineurs, comme cela est indiqué dans la Convention internationale des droits de l’enfant, ainsi que dans la loi française. Cependant, l’association souligne
que cette obligation légale et morale des pouvoirs publics est le plus souvent ignorée, voire rendue caduc là où elle opère :« _De nombreux.ses mineur.es non accompagné.es sont laissé.es à
la rue, sans hébergement, sans accompagnement social ou éducatif, exposé.es aux violences, à la traite humaine et à une insécurité constante_ ». À Dunkerque, mais aussi à Calais et
Boulogne-sur-Mer, cette situation est entretenue par l’acharnement policier que subissent les mineurs isolés au quotidien, comme tous les exilés. En effet, pour demander une mise à l’abri
via une procédure d’APU (Accueil Provisoire d’Urgence), un mineur isolé doit se rendre dans un commissariat, c’est-à-dire au cœur d’une institution à l’origine des contrôles, des fouilles,
de la destruction des campements des exilés, de la confiscation de leurs effets personnels, dont les tentes, ainsi que des violences verbales et physiques quotidiennes. À cela s’ajoute le
fait que les services de secours ou hospitaliers, souvent sollicités en situation d’urgence, ne sont tout simplement pas formés à orienter les mineurs isolés vers la protection à laquelle
ils sont censés avoir droit. Les secours et les hôpitaux les renvoient donc, faute de mieux, vers les associations, qui se retrouvent à jouer le rôle d’intermédiaire entre les mineurs et les
institutions de la protection de l’enfance. Sous-financées, ces associations se retrouvent à assurer de multiples missions allant de l’information aux droits à l’aide alimentaire, en
passant par la distribution de vêtements, de couchages, etc. Des actions de solidarité qui sont par ailleurs criminalisées par l’État, à coup de harcèlement policier et d’arrêtés
préfectoraux (ou municipaux, comme à Calais) visant à entraver lesdites distributions. Depuis le début de l’année 2025, précise ainsi _Utopia 56_, seuls 41 jeunes isolés sur les 260 présents
dans le Dunkerquois ont pu être mis à l’abri, et cela après un véritable parcours du combattant administratif, ponctué de plusieurs refus. Le parcours des autres, c’est-à-dire de la
majorité restée à la rue, mêle : grande précarité, insécurité physique et psychologique, et éloignement progressif vis-à-vis des associations, les empêchant de faire valoir leurs droits.
Cette situation d’extrême précarité entretenue par l’État, avec une volonté claire de rendre la vie impossible aux exilés, multiplie les dangers pour les mineurs. Comme le note encore
_Utopia 56_, « _l’emprise exercée par certains adultes, combinée au manque d’accès aux besoins fondamentaux les met directement en danger_. » Parmi les situations d’oppression et
d’exploitation, l’association liste ainsi : les violences psychologiques, les violences physiques, le travail forcé et la surveillance des déplacements. Utilisés par certains réseaux de
passage comme main-d’œuvre pour la conduite des « _small boats_ », ces mineurs isolés du Dunkerquois, et plus largement du littoral nord de la France métropolitaine, n’ont presque jamais
l’occasion d’être mis en contact avec les associations pouvant les informer et les assister dans leurs démarches. Avant la traversée, les jeunes qui sont conducteurs restent en effet sous
l’étroite surveillance des passeurs. Après la traversée, ils sont criminalisés par l’État britannique s’ils ont plus de 13 ans. LA LUTTE DE LA GAÎTÉ LYRIQUE COMME BOUSSOLE La récente
occupation de la Gaîté Lyrique, longue de trois mois et ayant mobilisé près de 450 mineurs isolés, a été un exemple de lutte offensive. En plus de mettre en lumière la situation des mineurs
isolés en France et la responsabilité de l’État dans leur précarisation, elle a en effet démontré la capacité d’auto-organisation de ces derniers, inspirant d’autres jeunes aux quatre coins
du pays. À Lille, Lyon, Marseille, Orléans, ou encore à Rouen, des collectifs de mineurs isolés se sont ainsi formés, et ces derniers se sont regroupés au sein d’une coordination visant à
développer leur lutte à une plus grande échelle. Dans une situation qui se durcit, il est plus que jamais nécessaire de soutenir ces luttes, en portant des revendications claires : la
réquisition des logements vides pour offrir un toit aux mineurs non accompagnés et à l’ensemble des personnes à la rue, leur scolarisation sans condition de statut administratif, et la
régularisation de tous les sans-papiers. Un combat dans lequel le mouvement ouvrier a un rôle central à jouer. Plus généralement, face aux dispositifs empêchant la liberté de circulation et
d’installation, face à la mécanique raciste qu’ils servent et que reprend aux quatre coins du monde l’internationale réactionnaire, et enfin face aux formes d’oppression et d’exploitation
spécifiques que cette mécanique produit, le mouvement ouvrier doit défendre une perspective internationaliste claire, en défendant notamment l’ouverture des frontières. Ces mots d’ordre,
nous les porterons ce samedi 24 mai à Paris, à 18h, à l’espace Charenton (XII), lors du meeting révolutionnaire et internationaliste que RP et la FT-QI organisent en présence notamment de
militants d’Allemagne, d’Argentine et des États-Unis.