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Il y a des adieux auxquels on ne s'habituera jamais. Et des hommages que l'on n'est jamais prêt à écrire. La dernière sortie officielle de Roger Federer sur un court de tennis
s'est déroulée le 7 juillet 2021. Son dernier titre, en 2019. Le dernier chapitre de sa formidable histoire était déjà écrit, mais le point final a été long à mettre. Le Suisse, 20
titres de grand chelem au compteur, a mis fin à sa carrière. À 41 ans, et c'est bien normal, le corps ne suivait plus. Son genou et son dos auront été, finalement, ses plus féroces et
ultimes adversaires.
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Les statistiques sont immenses (103 titres, 20 grands chelems, 6 Masters, une médaille d'or aux JO, 310 semaines comme numéro un mondial), mais une légende ne se construit pas
uniquement avec des chiffres. Roger Federer était le tennis. Son élégance sur le court – qui a assuré à ses équipementiers une belle manne financière –, sa gestuelle parfaite – que nombre de
« balles blanches » ont tenté de reproduire –, son sourire de gendre idéal, ses émotions – ses larmes à l'Open d'Australie en 2009 après une énième défaite contre Nadal – ont
amené ce sport, déjà populaire, dans une autre dimension.
Roger Federer était l'homme grâce à qui les fans de tennis pouvaient s'échapper des déjeuners de famille, veiller tard ou se lever tôt (fichu décalage horaire), refuser une balade
dominicale. Federer était l'homme des sensations fortes : des coups extraordinaires, des titres à la pelle, des retours au sommet ; mais aussi des absences coupables, des revers boisés
ou des défaites insupportables. On exultait, on tempêtait. Federer fut finalement une religion – presque une secte – qui vous envoûtait pour le meilleur et pour le pire.
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Soyons honnêtes, fin 2007, Federer (déjà 12 titres du grand chelem) n'avait rien d'un mythe : trop fort, trop haut, trop invincible. Qui aime Goliath ? L'arrivée d'une
furie espagnole (Nadal) et d'une tempête serbe (Djokovic) a rééquilibré les forces et posé un défi salvateur à celui que l'on nommait « PeRFect » : rester numéro un puis le
redevenir. Le monde se décomposa ainsi en pro-Nadal, pro-Djoko et pro-Federer. En 2008, le « monstre », comme on l'appelait, est redevenu humain. Giflé à Roland-Garros, délogé à
Wimbledon, humilié à l'Open d'Australie. Des larmes coulèrent sur ses joues. Et sur quelques autres. Comment se relever à 28 ans quand on a presque tout gagné ?
Le génie de Federer et sa leçon de vie sont celle-ci : se réinventer. Le Bâlois a repris sa raquette de maréchal, a travaillé et a changé son approche. Plus offensif, plus spectaculaire,
plus _old school._ Les titres sont revenus. La place de numéro un, aussi. Les sept grands chelems qui ont succédé au crash de l'Open d'Australie 2009 sont ses plus beaux et
symboliques. Il y a le Graal parisien (2009), la leçon londonienne (2012) ou la renaissance australienne (2017). À chaque fois, c'est un nouveau Federer qui a produit un nouveau tennis
pour atteindre les 20 tournois majeurs, un record battu, depuis, par ses deux meilleurs ennemis, Nadal et Djokovic.
À Découvrir LE KANGOUROU DU JOUR Répondre Le Suisse est grand pour ses titres, ses grandes victoires, mais aussi pour ses défaites. Le 14 juillet 2019, à Wimbledon – son terrain de jeu
favori –, il va dominer Novak Djokovic, surpuissant numéro un mondial. Pendant cinq heures, le Suisse ne fait pas son âge, volant sur l'herbe du Center Court. Deux balles de match
s'offrent à lui. Comme à l'US Open 2010 et 2011, Djoko les sauve presque les yeux fermés. Et Federer s'incline. Son ultime chance vient de passer. Mais dans l'esprit de
tous, à 38 ans, Federer reste le plus grand.
À l'annonce de la fin de sa carrière – le terme de retraite ne lui va pas au teint –, on a ressenti plusieurs sentiments. Une grande tristesse, d'abord. Qui nous fera autant vibrer
? Presque un deuil : le _big four_ (ajoutons-y Wawrinka et Tsonga en plus de Murray) tire petit à petit sa révérence et une page colossale du tennis se ferme. Un soulagement, ensuite. On
voyait mal le Suisse, qui repoussait sans cesse la terrible annonce, faire une tournée d'adieu où il serait sorti au premier, deuxième ou troisième tour sous des applaudissements gênés.
Les agonies sportives sont insupportables. Et c'est finalement la gratitude qui l'emporte. Une grande reconnaissance pour toutes ces heures à nous offrir, non pas du sport, mais
de l'art ; à ne pas supporter un joueur, mais un modèle ; à ne pas vivre des saisons de tennis, mais regarder l'histoire. Ce 15 septembre 2022, en annonçant son départ et en nous
obligeant à nous souvenir des belles choses, le Suisse a mis des accents à son nom pour « Fédérer » toute une communauté derrière lui. Son ultime victoire.