Afrique du Sud : non, la vidéo diffusée par Trump ne montre pas les tombes de « 1 000 fermiers blancs »

feature-image

Play all audios:

Loading...

NON, LA VIDÉO DIFFUSÉE PAR TRUMP NE MONTRE PAS LES TOMBES DE « 1 000 FERMIERS BLANCS » SUD-AFRICAINS


« Baissez la lumière ! » Il a suffi d'une phrase pour que le tête-à-tête cordial entre Donald Trump et le président sud-africain Cyril Ramaphosa dans le Bureau ovale se transforme en


guet-apens médiatique, ce mercredi 21 mai. Devant les caméras du monde entier, le président américain a diffusé une vidéo de plus de 4 minutes montrant, selon lui, « des sites funéraires,


plus de 1 000, de fermiers blancs ». Selon une analyse du _Point_, il s'agissait en fait d'un mémorial honorant un couple de fermiers tué en 2020.


Tout avait pourtant bien commencé. Les deux hommes ont échangé des amabilités et convenu de travailler à la signature d'un accord commercial et d'un partenariat sur les matières


premières. Et puis une journaliste a posé cette question à Donald Trump : « Qu'est-ce qui pourrait vous convaincre qu'il n'y a pas de génocide blanc en Afrique du Sud ? » un


terme que le président américain avait employé le 12 mai dernier.


À LIRE AUSSI LE PRÉSIDENT SUD-AFRICAIN CYRIL RAMAPHOSA À LA MAISON-BLANCHE POUR UNE RENCONTRE SOUS HAUTE TENSION AVEC TRUMPCyril Ramaphosa tente une interception habile : « Je peux répondre


pour lui. » Et d'inviter son homologue à « écouter les voix sud-africaines, leurs histoires, leurs perspectives ». « S'il y avait un génocide de fermiers afrikaners, je peux vous


parier que ces trois messieurs ne seraient pas ici », continue-t-il, faisant référence à deux golfeurs et au milliardaire Johann Rupert, tous Blancs, présents dans le Bureau ovale. Mais


Donald Trump, comme lorsqu'il avait humilié Volodymyr Zelensky avec J. D. Vance, avait préparé son coup.


« Nous avons des milliers d'histoires, de documents, des articles… Je peux vous montrer », commence le président américain. Toutes les têtes, notamment celle d'Elon Musk, debout


derrière le chef du Pentagone Pete Hegseth, se tournent vers le téléviseur.


Ils y voient d'abord l'opposant politique controversé Julius Malema mener le chant antiapartheid « Kill the Boer, kill the farmer » (« Tuez le Boer, tuez le fermier ») repris par


des milliers de personnes. La vidéo continue avec des images filmées par hélicoptère de croix blanches plantées le long d'une route, qu'Elon Musk avait déjà retweetées le 13 mai.


Donald Trump les commente en direct : « Ce sont des sites funéraires, plus de 1 000, de fermiers blancs, et ces voitures sont arrêtées pour se recueillir sur le lieu où des membres de leur


famille ont été tués ».


« Vous ont-ils dit où c'est ? » demande le président sud-africain, qui semble stupéfait. « Je voudrais savoir, car je n'ai jamais vu ça. » « Je ne sais pas. Enfin, c'est en


Afrique du Sud », répond Trump, qui ignore clairement la provenance des images. Il continue toutefois en effeuillant des articles de presse en disant « mort, mort ».


En ligne, de nombreux fact-checkers assurent qu'il s'agit du Witkruis Monument, un mémorial privé, composé de plus de 3 000 croix blanches installées sur une colline pour


symboliser les victimes d'attaques de fermes. Ce n'est pas le cas. La route N1, entre Mokopane et Polokwane, dans la province du Limpopo, est une 2 x 2 voies qui n'est pas


bordée de croix, comme on peut le voir sur Google Street View.


La vidéo originelle, qu'avait relayée Elon Musk, date en fait de 2020 : elle montre un cortège de voitures et les mêmes croix, en hommage à un couple de fermiers blancs, Glen et Vida


Rafferty, tués chez eux, à Normandien, dans l'est du pays. De nombreux locaux avaient alors accusé le président Ramaphosa de fermer les yeux sur la violence contre la population blanche


et planté ces croix en protestation. Selon les médias sud-africains, il s'agissait d'un cambriolage qui a mal tourné, pour lequel les auteurs ont été condamnés respectivement à 21


 ans de prison et à la perpétuité.


À LIRE AUSSI « GÉNOCIDE DE BLANCS » : TRUMP ACCORDE LE STATUT DE RÉFUGIÉ À UNE CINQUANTAINE D'AFRIKANERS À Découvrir LE KANGOUROU DU JOUR Répondre La violence gangrène l'Afrique du


Sud, avec 26 232 meurtres en 2024, soit l'un des pires taux du monde, avec la Jamaïque, l'Équateur et Haïti. Mais selon les chiffres officiels, seulement 8 meurtres de fermiers


ont été enregistrés l'an dernier. Leur ethnie n'est pas précisée.


Une loi controversée, promulguée en début d'année par Cyril Ramaphosa, a remis le feu aux poudres : elle autorise la saisie de terres agricoles appartenant à la minorité blanche, qui ne


représente que 7 % de la population mais détient plus de 70 % des terres. Alors que les États-Unis ferment leurs portes à tous les migrants, Donald Trump, après un lobbying intense


d'Elon Musk, a autorisé mi-mai le statut de réfugié à une cinquantaine d'Afrikaners.