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« UNE CATASTROPHE » : LE PATRONAT INQUIET DES FUTURS CONGÉS PAYÉS CUMULÉS LORS DES ARRÊTS MALADIE
« C'est une catastrophe », s'insurgeait Patrick Martin, président du Medef, ce vendredi sur France Inter. Depuis plusieurs mois, le patronat s'inquiète de la nouvelle
jurisprudence de la Cour de cassation. Mi-septembre, cette dernière a en effet estimé, en s'alignant sur une directive de 2003 du Parlement européen, qu'un salarié doit acquérir
des congés payés durant un arrêt maladie. Par conséquent, la justice française considère à présent les arrêts maladie comme des périodes de travail effectif.
Cet alignement sur le droit européen, que les successifs gouvernements français ont ignoré, n'est pas sans conséquence sur les finances des entreprises. Selon le président du Medef, qui
estime par ailleurs que cette jurisprudence pose « un problème de principe », le coût annuel de ce changement du droit du travail représenterait entre 2,5 milliards et 3 milliards
d'euros à la charge des entreprises. « On est obligé de transcrire [cette directive], c'est la Cour de cassation d'ailleurs qui a rendu une décision dans ce sens. Je ne vous
cache pas que ça crée un vent de panique dans les entreprises », explique le président de l'organisation patronale.
Jusqu'ici, sauf mention contraire dans les accords collectifs, un salarié en arrêt pour une raison de santé non professionnelle n'acquiert aucun jour de repos rémunéré. Il récupère
seulement ceux qu'il avait cumulés avant son arrêt. Or, le droit européen prévoit qu'une absence pour une raison de santé ne doit pas influencer le calcul des droits à congé payé.
« Rendez-vous compte. Des arrêts qui produisent des congés payés. Les bras nous en tombent », avait déclaré lors de la présentation de ses vœux pour 2024 François Asselin, président de la
Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME). Dans un mail adressé au _Point_, la CPME confirme avoir reçu le soutien de 25 000 chefs d'entreprise contre l'application
de cet arrêt de la Cour de cassation.
« Sur le fond, découpler travail effectif et congés payés est profondément choquant. C'est la valeur travail qui est ainsi attaquée », a expliqué en octobre la confédération dans un
communiqué. « Il est parfaitement injuste qu'un salarié absent pendant une longue période bénéficie d'autant de congés qu'un salarié présent à son poste », a-t-elle ajouté.
D'autant que cette directive est rétroactive. Si une rétroactivité de trois ans était accordée, cette mesure pourrait coûter en 2024 six milliards d'euros. Mais comme écrit sur le
site du gouvernement, « les effets de ces arrêts de jurisprudence restent à préciser ». Les partenaires sociaux et le gouvernement ont du pain sur la planche.
« On est en discussion permanente avec le gouvernement pour voir comment cette transposition de la directive européenne peut être mise en œuvre sans que ce soit trop ruineux pour les
entreprises », déclare Patrick Martin. Pour l'instant, ni le précédent gouvernement d'Élisabeth Borne ni celui de Gabriel Attal n'ont officiellement annoncé les futures
modifications dans ce sens. D'après nos confrères de BFMTV_,_ Élisabeth Borne a voulu rassurer fin novembre le patronat, en déclarant vouloir « réduire au maximum l'impact de la
mesure ».
La dernière prise de parole de l'exécutif date du 17 janvier dernier. Interrogée à l'Assemblée nationale à ce sujet, la ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin,
déclarait : « Il reste que notre pays doit bien entendu se mettre en conformité avec la législation européenne et que les conséquences financières de la disposition seront en effet très
importantes pour les entreprises. C'est la raison pour laquelle nous allons travailler avec l'ensemble des partenaires sociaux, les représentants des salariés comme les
représentants des entreprises, afin d'aboutir, dans les meilleurs délais, à des décisions sur cette question, qui suscite de nombreuses interrogations chez les chefs d'entreprise
et les salariés. » D'après un communiqué de la CFDT, le gouvernement examinerait plusieurs alternatives pour appliquer le droit européen, dont un plafond à quatre semaines de congés
payés annuels lors d'un arrêt maladie ou l'encadrement des délais de report des congés payés acquis.
En septembre, la CGT s'était félicitée de cette décision de justice. « Les arrêts maladie ne sont pas du repos ! » déclarait le syndicat dans un communiqué. De son côté, la CFTC
s'est réjouie de cette annonce, tout en alertant du devenir des TPE et des PME : « Ce changement soudain risque de fragiliser certaines entreprises françaises [les plus petites
notamment], et avec elles les emplois qu'elles pourvoient. »
À Découvrir LE KANGOUROU DU JOUR Répondre En ce moment même, le Conseil constitutionnel examine les conséquences de cette directive sur la Constitution et se prononcera à ce sujet à la
mi-février. D'après _Les Échos_, le gouvernement annoncera alors le cadre de ce cumul de congés payés. Pour l'instant, les entreprises sont donc dans le flou.
Toujours selon _Les __Échos_, dans une lettre adressée à leurs adhérents, la CPME a conseillé aux patrons soit de « tirer dès à présent les conséquences pratiques des arrêts de la Cour de
cassation […], ce qui représente un coût conséquent », soit de « continuer à appliquer strictement le Code du travail [ce qui] constitue, et il faut en être conscient, une prise de risques
en cas de contentieux ».