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Pour la confiance envers les médias, c’est plus compliqué. Mais non moins nécessaire. J’ai passé la fin de semaine en Gaspésie où se tenait la troisième édition de ce qu’est devenu
l’incontournable Festival international de journalisme de Carleton-sur-Mer. Un événement où, pendant quatre jours, un public en or vient à la rencontre de gens des médias et de spécialistes
venus de partout au Québec et au-delà pour parler du métier, y réfléchir surtout. Le célébrer, aussi. On a parlé d’intelligence artificielle, de vérité, de post-vérité, de ces nouveaux
conquérants de l’information qui réussissent le tour de force d’intéresser les plus jeunes au monde autour d’eux. On a parlé de journalisme sportif, des caribous, d’Ukraine, on a eu droit à
une bouleversante pièce de théâtre sur Gaza, des entretiens avec Coco, caricaturiste survivante de Charlie Hebdo, un autre avec Guy A. Lepage mené par Jean-François Lépine. Un programme
costaud, impressionnant. «Ce festival-là est magique. […] Le public pose les meilleures questions que j’ai jamais vues de ma vie», confiait d’ailleurs Laura-Julie Perreault, chroniqueuse
internationale à _La Presse_, mardi matin au micro de Pénélope. Mais il y avait plus impressionnant encore, la concentration de jeunes au pied carré. Des élèves du primaire, du secondaire,
des étudiants en Art et technologie des médias du cégep de Jonquière, d’autres de l’UQAM, tous passionnés d’information, venus au festival pour entendre parler de journalisme, aussi pour
poser des questions. C’était beau à voir, à entendre. À travers le discours pessimiste sur la perte de confiance des gens envers les médias, sur la fatigue informationnelle qui provoque chez
certains une écœurantite aiguë de tout ce qui est nouvelles, de voir des jeunes passionnés d’information a l’effet d’une bouffée d’oxygène sur un feu qui étouffe. Selon une étude de
NETendances de l’Académie de transformation numérique, deux tiers des jeunes s’informent sur les réseaux sociaux, mais ils s’informent. Je trouve que c’est une excellente nouvelle. C’est le
cas de mes deux gars, deux ados tout ce qu’il y a de plus typiques et qui, je ne sais trop comment, arrivent à s’informer à travers le nombre incalculable de vidéos qu’ils regardent sur leur
téléphone. Bon, ils en connaissent parfois davantage sur la politique française que canadienne et québécoise, c’est déjà ça. Mais à l’école primaire Saint-Donat de Maria en Gaspésie, ça
commence encore plus tôt pour les élèves qui ont la chance d’atterrir dans la classe de madame Lise, une passionnée d’actualité qui a décidé d’intégrer les médias à son enseignement. Dans sa
classe de quatrième année, tout est un prétexte pour s’informer, vous imaginez bien le cadeau qu’est pour elle le festival. Lise Cayouette a compris depuis longtemps qu’il n’y a rien comme
un projet concret pour que les élèves aient le goût d’apprendre, que c’est 1000 fois plus efficace que de travailler dans le vide. «Si on vous demande d’écrire une lettre qui ne sera envoyée
à personne, vous allez vous demander, c’est quoi l’intérêt?» qu’elle explique dans une capsule vidéo. Partant de ça, madame Lise s’est alliée avec _Le Curieux_, une formidable revue
d’actualité pour les jeunes que je ne connaissais pas, et elle a mis ses élèves de 9 et 10 ans à contribution pour un numéro spécial destiné au festival. Pendant des semaines, les jeunes ont
appris les rudiments du métier, autant le journalisme écrit que l’univers du balado, et ils ont pigé dans l’impressionnante liste d’invités du festival pour mettre en application ce qu’ils
ont appris. Du lot, peut-être un futur journaliste. Tant mieux si elle a pu éveiller quelques vocations, mais le plus important est ailleurs. Ses élèves ont compris l’importance d’être bien
informé, de départager une information fiable d’une fausse nouvelle. Ils ont pris goût à savoir ce qui se passe autour d’eux, à poser des questions, à aller chercher des réponses. > Ça
leur servira toute leur vie. Dans un monde où on a parfois l’impression que l’information de qualité est à l’étroit, que le terreau dans lequel elle se dépose est fertile comme un sol
d’argile compacté qui empêche l’eau d’atteindre les racines, il fait bon de voir qu’on peut, petit à petit, rempoter la confiance. C’est aussi le pari que relève le festival, plus couru
d’année en année. Et ce n’est pas un hasard s’il se tient dans la Baie-des-Chaleurs, à 75 kilomètres de New Carlisle, village où a grandi René Lévesque. Ce n’est pas un hasard non plus que
le festival soit rendu possible par la fondation qui porte son nom, celui qui a dirigé le Québec ayant d’abord été un éminent journaliste, un redoutable vulgarisateur. C’est à lui qu’on doit
le thème du festival, «être informé, c’est être libre». L’inverse est aussi vrai. POUR RÉAGIR À CETTE CHRONIQUE, ÉCRIVEZ-NOUS À [email protected]. CERTAINES RÉPONSES POURRAIENT ÊTRE
PUBLIÉES DANS NOTRE SECTION OPINIONS.