Gilbert rozon témoigne de son enfance jusqu’à la fondation de juste pour rire

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Cette amorce de témoignage en milieu d’après-midi, lundi, n’a toutefois pas touché aux événements qu’on lui reproche, ses avocats l’amenant plutôt à raconter sa vie à partir de l’enfance. On


a ainsi appris que, aîné d’une famille religieuse très modeste de sept enfants, il avait commencé à travailler à l’âge de 13 ans comme fossoyeur dans son village de


Saint-André-d’Argenteuil, lorsque le curé lui avait demandé d’enterrer son prédécesseur qui venait de décéder. Gilbert Rozon a raconté avoir découvert le milieu du spectacle à l’arrivée de


la télévision et avoir été fasciné par ce monde. Sa première expérience d’organisation de spectacles s’amorça alors qu’il était étudiant au cégep du Vieux-Montréal avec des tournées de


théâtre organisées à travers la province, époque marquée par un grave accident de la route dans Charlevoix où deux de ses passagers étaient décédés, dont son auteur, meilleur ami et


colocataire. Revenu dans son village, il avait repris le commerce de l’imprimeur local, métier qu’il dit avoir détesté, mais qui lui a permis de devenir un entremetteur entre des personnes


ayant des besoins d’imprimerie particuliers et d’autres imprimeurs capables de les réaliser. «Je me suis investi dans la vente. J’adorais ça.» Il a raconté comment il avait rencontré sa


première épouse, Françoise Gros, une Française rencontrée par hasard à la suite d’un mauvais numéro, qui l’a invité en France où il a redécouvert le spectacle par une fréquentation assidue


d’événements.  De retour au pays, il a réussi à monter une première «Grande virée» à Lachute, un événement dont l’ampleur et le succès inattendu furent une brutale école de production, mais


qui lui permit de répéter l’expérience l’année suivante, jusqu’à ce que la municipalité lui réclame une part de ses revenus sous forme de taxe, ce qui l’amena à déménager l’événement à


Pointe-aux-Trembles l’année suivante. Cette fois, l’événement fut un flop monumental en raison de pluies torrentielles et de grèves dans le transport en commun qui l’endettèrent de près d’un


million $ auprès de ses commanditaires et des institutions financières qui l’avaient soutenu. Malgré tout, l’année suivante, il réussissait à convaincre les institutions financières de lui


accorder un demi-million $ pour monter le premier Festival Juste pour rire qui, lui, fut un succès retentissant. Les avocats ont prévu pas moins de sept jours de témoignage pour Gilbert


Rozon, mais ce témoignage sera entrecoupé par le venue d’autres témoins et le procès fera une pause de deux semaines du 9 au 20 juin, de sorte que sa présence à la barre s’étendra jusqu’au 2


juillet, à moins de changements dans l’horaire. La journée s’était amorcée par le témoignage d’une ancienne employée, Louise Thériault, qui a travaillé à Juste pour rire en 1995 et 1996. 


Mme Thériault a qualifié Gilbert Rozon d’«homme séduisant, puis séducteur». Elle a dit avoir «glissé dans ce jeu-là parce que je trouvais que c’est un homme qui était élégant, il était beau,


il avait quand même un pouvoir».  Elle a dit avoir été flattée par le fait qu’il s’intéressait à elle, précisant qu’elle avait toujours assumé sa féminité et son pouvoir de séduction. «J’ai


participé à ce jeu-là avec lui parce que je voulais aussi le séduire», a-t-elle raconté, ajoutant qu’il était un séducteur drôle, qui l’avait fait rire à l’occasion dans son jeu de


séduction avec elle.  Lorsqu’interrogée sur le genre de patron qu’il était, Mme Thériault a expliqué que la confiance que Gilbert Rozon avait placée en elle pour des tâches plus exigeantes


lui avait donné des ailes, qu’il venait toujours la saluer quand il était au Festival Juste pour rire. «Ç’a toujours été fluide», a-t-elle résumé. Elle a également parlé d’une rencontre avec


Patricia Tulasne, une des plaignantes au dossier, avec qui elle a dit avoir eu un «coup de foudre amical» lors d’une première rencontre. Les deux femmes se sont fréquentées durant un été


avant de prendre leurs distances en raison de valeurs incompatibles, notamment que Patricia Tulasne «avait, par rapport aux hommes, une haine que je ne partageais pas». Louise Thériault a


dit avoir été très surprise en apprenant ce qui s’était présumément passé entre celle-ci et Gilbert Rozon, d’autant plus qu’elle se rappelait avoir été convaincue durant un souper de


production «qu’elle et moi, on était comme un peu dans une rivalité de séduction face au grand patron, qui était à table et dont on voulait avoir un peu d’attention».  Son témoignage devait


reprendre en après-midi. La poursuite de neuf femmes - Patricia Tulasne, Lyne Charlebois, Anne-Marie Charrette, Annick Charrette, Sophie Moreau, Danie Frenette, Guylaine Courcelles, Mary


Sicari et Martine Roy - fait suite à une demande, en 2017, d’autorisation d’action collective contre l’homme d’affaires par un groupe de femmes surnommé Les Courageuses. D’abord accueillie


en première instance en 2018, Gilbert Rozon a obtenu que cette demande soit rejetée par la Cour d’appel en 2020.  Parallèlement, 14 femmes avaient porté plainte à la police, mais le


Directeur des poursuites criminelles et pénales n’avait retenu que celle d’Annick Charrette. Gilbert Rozon avait été acquitté en 2020 sur la base du doute raisonnable. Patricia Tulasne, qui


agissait comme porte-parole des Courageuses, avait été la première à déposer une poursuite civile contre M. Rozon en avril 2021. Les huit autres femmes avaient suivi et l’ensemble des


poursuites avaient été regroupées pour mener au procès qui s’est ouvert en décembre dernier et qui a été interrompu à maintes reprises en raison de débats sur des questions de droit.


Jusqu’ici 42 témoins ont été entendus en poursuite, incluant les neuf plaignantes et sept autres femmes, dont Julie Snyder, Salomé Corbo, Pénélope McQuade et l’ex-conjointe de Gilbert Rozon,


Véronique Moreau, qui ont toutes soutenu avoir aussi subi des abus de nature sexuelle de la part du défendeur. Gilbert Rozon a toujours nié les allégations que le visaient.