Toulouse : par crainte du confinement les clients se ruent dans les magasins, un supermarché obligé de filtrer les entrées

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l'essentiel "Non, il n'y aura pas de pénurie alimentaire en France". Les membres du gouvernement le répètent à l'envi. Pourtant, dans les supermarchés, c'est la


ruée. Ce lundi après-midi, afin de gérer les flux, et éviter les engorgements aux caisses, un supermarché situé en banlieue toulousaine a été contraint de limiter les entrées de


consommateurs. 15h30, ce lundi après-midi. Dans le hall du centre commercial à Balma, l'image des tapis roulants qui mènent au parking sous-terrain résume tout. Dans le sens descendant,


des Toulousains poussent des chariots remplis à ras bord. Dans l'autre, des clients traînent des cabas vides. Tous les magasins sont fermés, à cause du coronavirus. Exception faite du


supermarché. À LIRE AUSSI : Coronavirus : Christophe Castaner détaille les limitations de déplacements, 3 morts et 284 cas en Occitanie A l'entrée, le personnel de sécurité surveille


les allées venues. Passé les portillons, une noria de chariot se croise, se recroise, et s'entrechoque parfois.  "Allez avance là!" "Si vous aviez bien écouté les médias,


vous sauriez qu'il n'y a pas de risque de pénurie!" Certains osent s'invectiver, se parler. D'autres fuient du regard les autres clients. Masque sur le nez, mains


gantées, ils poussent leur chariot d'une main et épluchent une liste des courses longue comme le bras de l'autre. Amine est de ceux-là. "Les supermarchés, c'est le


meilleur endroit où choper la mort". Ce père de trois enfants poursuit : "Cela fait un moment qu'on se dit avec ma femme qu'il faut faire de grosses courses. Et avec les


mesures de confinement qui se profilent... On s'est disputé, et c'est moi qui suis venu!" Dans son chariot, il y a de quoi tenir un mois (et un ticket de caisse estimé à plus


de 200€) : des conserves, des compotes pour les enfants, des produits d'hygiène, etc. "Le rayon pâtes, j'y suis passé, il n'y a plus rien !"  "AVEC LE RISQUE DE


CONFINEMENT, LES GENS SE SONT PRÉCIPITÉS" Les rayons de denrées de produits de première nécessité ont été dévalisés. Plus de farine, de riz, de viande fraîche, de produits


d'hygiène féminine. Le personnel du magasin fait ce qu'il peut pour réapprovisionner les étals. Au rayon eau, ça dégouline de packs. Ouahida prévoit d'en prendre dix.


"J'ai des problèmes de rein, je ne peux pas boire l'eau du robinet. Je vais prendre aussi du lait pour les enfants." Mais pas de céréales. Plus l'ombre d'un


pétale de riz soufflé au chocolat par ici.  Dans l'allée centrale, ça fourmille. A vous donner le tournis. À vue de nez, près d'un millier de clients s'agitent. Elizete semble


un peu désorientée. Derrière son masque et sous son bonnet rose, elle ne sait trop où donner de la tête. Sur sa (longue) liste chaque ligne est cochée une fois l'article posé dans le


chariot. "Je fais mes courses et celles d'une amie diabétique, son médecin lui a conseillé de rester chez elle. Cela fait 2 heures que je suis là, et je n'ai fait que la


moitié des courses. Cela manque un peu d'organisation. Avec le risque de confinement, les gens se sont précipités..." Pour quitter la cohue, il faut se diriger vers les rayons


habillement ou jardinage. Quasi déserts. Martine et Marie-José flânent un peu. Les deux sœurs prennent l'épidémie de coronavirus au sérieux mais refusent de céder à la panique. Dans


leur sac : un pot de fleurs. Il sera rejoint par du café, des yaourts, du papier toilette. "Quelques bricoles dont on a besoin. On ne prend que ce qui nous manque. Ils disent que les


supermarchés seront réapprovisionnés, on veut les croire." PLUS DE 2 HEURES D'ATTENTE AVANT DE PASSER EN CAISSE À quelques mètres d'elles, une file de chariots est à


l'arrêt. Des mètres de queue avant de voir les caisses. Si certains clients se murent derrière leur masque, le nez rivé sur leur téléphone, d'autres discutent. "Après deux


heures de patience, on se fait des copains!" s'amusent ces quatre dames. Chacune avance ses raisons d'être là. Nicole, née en 1940, voulait être certaine d'avoir assez de


nourriture pour son chat. Elle s'étonne : "Je n'avais jamais vu ça... Et je ne pensais pas le voir ! C'est affolant. D’autant plus qu'il y a un moment où cela ira


mieux. Les gens qui ont fait des réserves seront obligés de tout manger. Ça va ralentir la reprise de l'économie ça..." Pascale, 60 ans, est AVS dans les écoles, et donc au chômage


forcé. À ces pieds, un sac en papier kraft rempli de quelques produits. Dix articles à peine. "Je ne comprends pas la réaction des gens. Moi, je prends comme d'habitude. Il y a


trop de monde. La prochaine fois, tant pis, je ferai le choix d'aller à la supérette à côté de chez moi quitte à payer un peu plus cher." Juste derrière elle, deux copines, dont


Célia, maman d'un petit de six mois. "Les couches, je les achète toujours par lot. J'ai aussi un peu de stock de lait maternel. Mais vraiment je ne m'inquiète pas. Pour


les enfants, on trouvera toujours". LA SÉCURITÉ FILTRE LES ENTRÉES DANS LE SUPERMARCHÉ Au chaud, presque à hauteur de la caisse ces "copines" d'un jour relativisent. Mais


à l'extérieur du supermarché, l'ambiance est tout autre. Depuis une trentaine de minutes, le magasin a décidé de ne laisser rentrer les clients qu'au compte-gouttes.


L'objectif : éviter la concentration massive de personnes dans les rayons. Tous les quarts d'heure entrent 25 personnes. Les femmes enceintes ont des laissez-passer. Certains


s'agacent.  Leila et sa fille Sarah sont sous la pluie depuis près de 45 minutes. "On ne s'attendait pas à ça... C'est un peu galère, reconnaît la mère de famille. Ce


matin j'étais à la boucherie à Bagatelle, il n'y avait plus rien... Les gens faisaient la queue au distributeur d'argent !"  Elle poursuit : "Samedi je ne suis pas


allée faire les courses parce que j'avais peur du monde, dimanche je suis allée voter, et là, je veux seulement faire mes provisions pour la semaine". Elle conclut, philosophe :


"Si jamais on arrive à la pénurie - ce dont je doute - j'espère que les gens qui ont fait des courses pour quatre mois aideront ceux qui en ont besoin quand ils frapperont à leur


porte..."