Interview - paris 2024 : les héritiers coubertin entretiennent la flamme

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Mirville, village tranquille au coeur du pays de Caux, entre Rouen et Le Havre. Dans leurs tenues de sport blanc cassé aux toiles fines et confortables, raquette en bois et fleuret vintage à


la main, les cousins prennent la pose sur le gazon impeccable du château. Avec eux, on remonte le temps… On a l’impression qu’ils préparent quelque Olympiade du début du XXe siècle et que


Pierre de Coubertin (1863-1937), l’homme qui a ressuscité les Jeux, va jaillir de son bureau pour superviser leur entraînement. Vision pas si fantaisiste. « _Ce château venait de la famille


de sa mère, il y a passé toute sa jeunesse, raconte Thibault de Navacelle de Coubertin, dont les parents habitent toujours les lieux. Un jour, de retour d’un de ses voyages en Angleterre, où


la place du sport dans l’éducation l’inspirait beaucoup, il a fait sur cette pelouse une démonstration de tennis sur herbe en allant chercher des rubans blancs dans un atelier de broderie


local pour délimiter le terrain_. » Aujourd’hui, les arrière-arrière-petits-neveux du baron ne sont pas des stars du sport et l’assument. Tous installés à Paris, ce sont des quadras actifs,


biens dans leur époque. Thibault, qui a un temps vécu à l’Ile Maurice, est entrepreneur. Alexandra, consultante en management. Quant à Diane, la soeur d’Alexandra, après avoir été joaillière


et prof d’anglais (leur mère est Américaine), elle est ambassadrice de l’UNSS, l’Union du sport scolaire, et s’investit dans des projets culturels avec le CIO. Fidèle à l’idéal olympique de


son ancêtre qui – peu de gens le savent – avait intégré aux premiers Jeux des disciplines comme la littérature, la musique ou l’architecture. Luimême obtint une médaille d’or en 1912 pour


son poème Ode au sport. « _Son père était peintre et sa mère musicienne, et il a écrit une vingtaine de livres. On oublie trop souvent la dimension artistique de l’héritage Coubertin_ »,


note Diane, qui se présente comme « _l’artiste de la famille_ ». La place de Pierre de Coubertin dans l’inconscient collectif a toujours été ambiguë. En France, quelque 600 lieux – rues,


stades, écoles – portent son nom. Il reste indissociable des JO et tout le monde le cite à travers la formule: « _L’important, c’est de participer_ » (qui… n’était pas la sienne, il avait en


fait déclaré « _l’essentiel n’est pas d’avoir vaincu, mais de s’être_ bien battu »). Mais il demeure une figure controversée du roman national, qui n’a jamais été décorée, ni panthéonisée.


« _La Légion d’honneur, il l’avait refusée. Ce n’était pas quelqu’un qui voulait briller, il s’effaçait derrière son oeuvre_ », insiste Alexandra. C’est surtout sa personnalité clivante qui


a toujours embarrassé. De son vivant, ce partisan de l’éducation à l’anglo-saxonne se battait contre les institutions, qui le voyaient d’un mauvais oeil. Et au XXIe siècle, certaines prises


de position lui valent de nombreux détracteurs, qui voient en lui un misogyne et chantre du colonialisme, et fustigent son soutien à l’organisation des Jeux de Munich de 1936, dans


l’Allemagne hitlérienne. « _On ne peut pas résumer sa pensée à une ou deux phrases sorties du contexte de l’époque. Les femmes, par exemple, n’avaient pas la place qu’elles ont aujourd’hui_ 


», plaide Alexandra. « _Il faut plutôt regarder les faits : c’est sous sa présidence du CIO qu’elles ont eu accès aux Jeux, dès 1900, et que leur présence a été multipliée par six_ »,


renchérit Diane. « _Il a aussi refusé de se rendre à Munich, malgré les invitations insistantes, et de toute façon, il ne présidait plus le CIO_ », rappelle Thibault. Et de résumer le point


de vue familial : « _L’image que la France a de Pierre de Coubertin nous chagrine, l’homme est davantage compris à l’étranger que dans son propre pays. C’est notre vrai combat : apporter des


éléments pour mieux faire connaître tous les aspects de sa vie_. » Pour redorer son blason, mais aussi faire perdurer ses idéaux dans l’énorme machine olympique, la quatrième génération


s’est organisée en prenant le relais de ses pères. « _En 2016, nous avons créé l’Association familiale Pierre de Coubertin. Sur les 31 représentants de notre génération, 15 en sont membres_ 


», explique Alexandra de Navacelle de Coubertin, son actuelle présidente. Cela lui permet notamment de siéger au CIO, au sein de la commission « _Culture et patrimoine olympique_ ». Et si la


France, pays natal du baron, n’a toujours pas de Musée olympique comme il en existe en Suisse, ses descendants ont bien compris la résonance que Paris 2024 pouvait donner à leur action. Le


16 avril, Alexandra était présente à Olympie pour l’allumage de la flamme. Laquelle s’arrêtera le 5 juillet devant le château de Mirville où, adossé à la façade, trône un buste du père des


Jeux modernes. « _Elle était déjà passée en 1992, avant les Jeux d’hiver d’Albertville. J’avais 11 ans, c’est un souvenir inoubliable_ », glisse Thibault, qui jouera les porteurs pour


l’occasion. Diane, elle, est très impliquée dans l’organisation d’événements culturels à Paris en marge des JO. Le 23 juin aura lieu à la Sorbonne un concert mêlant musique classique et


démonstrations de breakdance pour célébrer les 130 ans du CIO. A ce stade, la présence du président Macron reste incertaine. A la mairie du 7e arrondissement, outre une exposition sur la vie


de Coubertin visible de fin juin à mi-septembre, un cycle de conférences sera organisé en juillet, la semaine précédant la cérémonie d’ouverture. « _On parlera inclusion, environnement,


place de l’Afrique dans les Jeux_ », précise Alexandra. Des représentants de la famille assisteront également en tribunes aux cérémonies d’ouverture et de clôture ainsi qu’aux épreuves. «


_Nous avons obtenu trois accréditations permanentes avec la possibilité d’inviter sur chacune une personne, révèle Alexandra. Ces six places permettront une présence des cousins à tour de


rôle_. » Car c’est bien connu : aux JO, l’important, c’est de participer ! CET ARTICLE ÉTAIT À RETROUVER DANS LE GALA N°1618, DISPONIBLE LE 13 JUIN DERNIER DANS LES KIOSQUES. POUR SUIVRE


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