Benoît, ancien élève de Pascal Vey au lycée Bayen de Châlons : "Je n'ai pas vu l'emprise qu'il avait sur moi"

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Benoît demande à ce que son prénom soit changé car "la honte est toujours présente." Ce jeune homme de 25 ans est aujourd'hui intérimaire et n'a pas réussi à suivre d'études supérieures.


Lorsqu'il était scolarisé au lycée Pierre Bayen de Châlons-en-Champagne, son professeur de français en première et en terminale s'appelait Pascal Vey.


Cet homme s'est suicidé le 7 décembre 2023. Il venait d'être suspendu à la suite d'accusations de viols, harcèlement et agressions sexuelles. Au moins une plainte avait été déposée le 29


septembre 2023. Mais des signalements remontaient à 2021, selon une professeure qui dénonce des dysfonctionnements, soutenue par la FCPE. Agrégé de lettres, le quinquagénaire a en charge la


section cirque qui a fait la réputation de l'établissement.


En classe, Pascal Vey " nous parlait de sa sexualité et critiquait celle des autres, celle de ses élèves", se remémore Benoît. Bien que ce type de propos le mettent mal à l'aise, le jeune


homme accepte de se rendre chez l'enseignant, le soir, seul. De l'un de ses premiers rendez-vous en tête à tête, il ne reste à Benoît qu'une impression vague : "Je me sentais nauséeux,


j'avais chaud au visage, je ne souviens de rien."


Impossible donc d'expliquer dans quelles circonstances exactes des photos de lui dénudées se sont retrouvées chez Pascal Vey. Elles ont été découvertes par la police de Châlons-en-Champagne,


en charge d'enquêter sur le professeur. En tout cas, le jeune homme certifie aujourd'hui qu'il n'aurait pas pu consentir à ce type de clichés, compte tenu de que qu'était à l'époque son


rapport au corps. Il reconnait avoir été séduit par l'enseignant, à une époque où il se sentait fragile.


Irène Legouix, une autre ancienne élève de Pascal Vey se souvient d'un homme "puissant" :  "Tout au long de l'année, il fonctionnait comme un gourou [ car ] on ne savait jamais à quoi


s'attendre avec lui."


Sans être "au courant de ce qui se passait", la jeune femme décrit la relation "toxique" qu'il instaurait avec les élèves. "Il manipulait surtout les personnes fragiles" ajoute-t-elle. "Les


personnes victimes, d'après ce que j'ai compris, c'était des jeunes hommes relativement fragiles, passionnés de litterature (...) Mais on était plusieurs à vouloir avoir de la reconnaissance


de sa part. (...) mais si on n"était pas à l'écoute parfaite, c'était de la méchanceté, des piques."


Irène Legouix conclut : "On n'était pas vraiment ses élèves, on était presque ses disciples".


Depuis des années, des rumeurs couraient au sein du lycée sur Pascal Vey. Mais il ne s'agissait que de on-dit, aucun signalement n’avait encore été fait à la justice. Irène Legouix croyait


même que son enseignant est victime d'homophobie, même si son comportement n'était pas celui d'un professeur ordinaire.


"Il avait des comportements déplacés, qu'à l'époque je ne considérais pas comme déplacés" raconte l'ancienne élève. "Il faisait beaucoup, beaucoup de blagues à caractère sexuel, notamment à


d'autres garçons. Il voulait connaître l'intimité des couples d'élèves".


Désormais l'action judiciaire est éteinte puisque Pascal Vey s'est suicidé. Il avait 53 ans. Son corps a été retrouvé à son domicile le 7 décembre dernier, soit environ deux mois et demi


après sa suspension par l'Education Nationale. Neuf plaintes, dont une pour viol entre 1998 et 2002, ont été déposées.


Benoît, lui, regrette de ne pas avoir engagé de démarche contre son ancien professeur. "Je ne pense pas m'en être sorti à 100%" reconnaît-il. Le jeune homme s'interroge encore sur le fait


qu'il soit bel et bien sorti de son emprise alors qu'il s'est rendu à son enterrement.