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UNE SAIGNÉE SANS PRÉCÉDENT DANS LES BUDGETS CULTURELS Depuis décembre, les attaques contre le secteur culturel se multiplient au niveau de l’Etat (baisse du budget et des dotations des
collectivités territoriales, gel de la part collective du pass Culture, etc), comme dans les collectivités locales. Pour visibiliser l’impact global de ces baisses sur l’activité culturelle
- et en particulier dans le secteur des musiques actuelles - le SMA publiait le 16 avril dernier une étude documentée sur le sujet. Les chiffres sont clairs : 65,8 millions d’euros en moins
de la part des régions pour la culture, et une dégringolade particulièrement marquée dans certaines régions comme les Pays de la Loire (-46,9%), la Nouvelle Aquitaine (-21,8%)
l’Île-de-France (-20 %) ou encore le Grand Est (-9,3 %). À ces coups de rabot dans les régions s’ajoutent les restrictions budgétaires brutales dans certains départements comme l’Hérault,
l’Ille-et-Vilaine, la Loire-Atlantique, ainsi que dans certaines villes et intercommunalités comme Toulouse, aggravant ainsi la situation. Par ailleurs, l’étude met en évidence les effets
concrets de ces coupes budgétaires qui provoquent une véritable récession de l’activité culturelle, notamment dans le secteur des musiques actuelles : annulations de dates et d’actions
culturelles, licenciements, menaces de cessation d’activité, augmentation des tarifs pour le public, etc. Dans l’étude, les exemples sont listés par dizaines. En Centre-Val de Loire, le
dispositif de repérage et d’accompagnement artistique Propul’Son est fragilisé et se voit contraint de réduire d’un tiers le nombre de ses bénéficiaires. Dans les Pays de la Loire, la salle
de concert du Quai M, à La Roche-sur-Yon, a dû annuler son festival annuel Quai Metal, qui devait accueillir 1600 personnes et 12 groupes. À Bobigny, c’est le fonctionnement global de Canal
93 qui est précarisé ; la salle a dû par ailleurs déprogrammer des actions culturelles s’adressant à environ 500 collégien·nes et lycéen·nes de Seine-Saint-Denis. LES TRAVAILLEUR·SES DE
L’ART ET DE LA CULTURE EN PREMIÈRE LIGNE Les employés des structures impactées se voient directement touchés par ces baisses de financement, ce dont témoigne l’étude à travers de nombreux
exemples comme celui du Nouveau Pavillon (Pays de la Loire), dont 3 postes de permanents sont menacés, induisant un risque direct de fermeture pour la structure. Mais ce qu’il faut ajouter,
c’est que cette baisse de l’activité culturelle va en réalité avoir des effets en cascade dramatiques sur l’ensemble de la chaîne de production artistique. En effet, moins de dates, cela
signifie moins de cachets et moins d’heures comptabilisées dans le régime de l’intermittence. Et donc, moins d’intermittent·es pouvant renouveler leurs droits. Dans un secteur où la
précarité est déjà monnaie courante, c’est un coup de massue sur les travailleur·ses les plus fragiles, qui vivent souvent de cachets irréguliers, dans divers lieux et structures. Ainsi,
au-delà de l’impact sur les structures et leur programmation, ce sont les travailleur·ses de l’art et de la culture qui sont en première ligne de ces baisses de subventions. SOUMISSION AUX
LOGIQUES DE MARCHÉ, VERS UNE CULTURE À DEUX VITESSES En parallèle, ces coupes accélèrent une concentration des financements vers les plus grosses structures, considérées comme plus visibles
ou plus stratégiques pour les politiques culturelles régionales et nationales. Tandis que les petites structures associatives payent le gros de l’addition, alors que ce sont elles qui font
vivre la scène émergente et diffusent les créations plus expérimentales. Se dessine alors une culture à deux vitesses, comme le montre l’étude : « _Des structures sont contraintes d’annuler
des concerts, perdant ainsi leur éligibilité aux aides du CNM [Centre National de la Musique] par exemple, qui exigent un minimum de dates programmées. Ce cercle vicieux fragilise encore
davantage le secteur, impactant aussi les producteurs de spectacle qui ont de plus en plus de difficultés à faire programmer les artistes les plus émergents de leur catalogue. Le manque
d’informations, les votes tardifs et la tendance à la baisse incitent donc l’ensemble des acteurs à prendre moins de risque, à moins investir, alimentant de fait un processus de récession.
Un tel ralentissement aura nécessairement une incidence sur la place de la découverte et des artistes émergents dans la diffusion »_. Ainsi, c’est tout le tissu culturel de proximité qui est
sciemment asséché. Ce faisant, les pouvoirs publics poursuivent un agenda - déjà en cours de longue date - visant à substituer à une politique d’accès aux pratiques et de soutien à la
création, une logique de vitrine, de marque culturelle, de prestige. Une logique dans laquelle ce sont les projets rentables que l’on privilégie, au détriment de tout ce qui échappe aux
logiques de marché. FACE À UNE OFFENSIVE POLITIQUE GÉNÉRALISÉE, UNE RIPOSTE UNIFIÉE C’est ce même agenda politique qui conduit à la fermeture de lits d’hôpitaux, aux baisses de moyens pour
les écoles ou encore à la privatisation de l’université et qui va continuer de s’aggraver comme l’a clairement annoncé François Bayrou qui vise 40 milliards d’économies en 2026. Alors que
dans le même temps, les budgets militaires explosent : +3,3 milliards d’euros en 2025 pour la Défense, avec des objectifs de 413 milliards sur sept ans. Pour y faire face, il ne suffira pas
de réclamer des miettes en espérant émouvoir les décideurs politiques, ou de chercher à montrer que le secteur est capable de s’adapter pour survivre. Il ne s’agira pas non plus de sauver la
« culture » en tant qu’abstraction, mais bien de défendre les travailleur·ses de l’art et de la culture, et leurs conditions de travail et d’existence. Par ailleurs, il est vital que les
travailleur.se.s de l’art et de la culture fassent front aux côtés des soignant·es, des enseignant·es, des autres agent·es de la fonction publique, etc et que les revendications sectorielles
s’articulent avec des mots d’ordre globaux : contre l’austérité et la dégradation des conditions de travail, contre le réarmement militaire et idéologique.